Annoncé comme le roman le plus abouti de l'auteur de
Lolita, j'ai décidé de commencer par le meilleur morceau.
Quelle erreur!
Des phrases longues comme une nuit aux urgences.
Une narration hachée, entre trois personnages : les deux principaux et le narrateur officiel. Tout s'embrouille à volonté. Enfin, c'est ce que j'ai compris. Car il est difficile de sortir de cet engluement de prose mâtinée d'entomologie et de précis de botanique. Là, je ne parle que des cent premières pages.
Cela me fait penser à cette musique expérimentale, dite contemporaine, ou encore aux délires du modern jazz pour prendre un exemple plus musical.
Trop cérébral.
Bref, un livre qui ne s'adresse pas aux simples petits cons dans mon genre.
Au fil de la lecture qui dure plus qu'un trajet en métro car cette masturbation littéraire s'étale sur plus de 600 pages, on comprend que l'histoire est rédigée par les deux personnages principaux. Et ça passe du coq à l'âne comme un patchwork de littérature.
Soit, c'est bien écrit. Trop bien écrit, même. Et voilà que la langue maternelle de
Nabokov fait irruption avec, pas toujours, la traduction. Est-elle vraiment pertinente? Ou l'auteur n'invente-t-il pas?
Pareil pour tous ces mots inconnus. J'ai vite abandonné le dictionnaire qui n'avait d'autre résultat que de ralentir encore une lecture au ralenti. Je reste persuadé que certains mots sont inventés, tout comme des lieux (la ville de "Chose" : Oxford ou Cambridge?). Reste une belle trouvaille pour désigner un enfant mort-né (terme bien laid) : enfantôme.
Nabokov brouille les cartes temporelles : si les trois quarts de l'action se déroulent principalement entre 1880 et 1892, comment peut-on parler de cinéma… inventé en 1895 par les Lumière Brothers??
On a droit à une partie de scrabble expliquée aux Nuls, puis d'un tour du monde des bordels de luxe, prétentieusement rebaptisés Floramour. Il faut dire qu'en résumé, je n'ai vu dans ce roman encensé que les frasques sexuelles d'Ivan, le personnage central. Ca baise à tout va, éventuellement, ça se bat en duel. Tout est normal. Bien entendu, lorsque sa tendre Ada prend un amant, il va bouder à l'autre bout du monde! Ada est sa cousine, on nous laisse entendre même qu'elle est plus que ça. Et leurs premiers ébats n'attendent pas l'âge réglementaire. Certes,
Nabokov n'a pas attendu ses dernières années pour se délecter de pratiques incestueuses.
Je ne suis pas du genre à m'offusquer pour quelques parties de jambes en l'air (et puis, ce n'est qu'un roman), mais quand il n'y a que ça, c'est lassant.
Finalement, j'ai le sentiment que tout cela servait de prétexte à cette classe snob et hautement cultivée que l'on rencontre parfois dans les salons de velours pour se rincer l'oeil sous couvert de grande littérature.
De la pornographie en robe de soie et smoking. Rien d'autre.
Et puis, sans prévenir, voici que le quatrième chapitre (partie) se transforme en un essai philosophique sur le temps!
Je ne retiendrai que ce passage.
Ivan devient psychologue et, accessoirement, écrivain, incluant même le roman ici présent dans son oeuvre!
Nabokov fait tout de même preuve d'un bel esprit de détachement en pondant une critique censée s'adresser à l'un des écrits du jeune héros mais convenant parfaitement à Ada :
"… fable obscure, somptueusement parée, banale et ennuyeuse, mais émaillée de quelques métaphores admirables qui font tache sur la parfaite ineptie du reste".