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Gérard Clarence (Autre)
EAN : 9782226015198
327 pages
Albin Michel (09/06/1982)
4.21/5   53 notes
Résumé :
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Lire Vidiadhar Surajprasad Naipaul (on comprend mieux l'utilisation des initiales V. S.), c'est forcément se confronter au monde. Né en Amérique (Trinidad), d'une famille originaire d'Asie (Inde), citoyen Européen (Royaume-Uni), c'est bien en Afrique qu'il nous conduit, dans cette courbe du fleuve.

Et quoi de mieux que ce citoyen du monde pour penser la décolonisation, les jeux de pouvoir et d'influence en un même lieu et sur quelques années des Arabes, des Européens, des Indiens et de ce peuple d'Afrique qui se cherche un avenir. Sans jamais porter de jugement définitif sur quiconque, l'auteur nous donne à voir les errements qui vont plonger ces régions dans les tourments les plus terribles. A part le voisinage avec l'Ouganda, nous ne saurons jamais quel pays est précisément évoqué, également parce que les destins funestes de nombre de ces pays d'Afrique Noire se sont malheureusement ressemblé.

La prouesse est surtout réalisée dans l'imbrication entre les différents destins internationaux, continentaux, nationaux, locaux... et jusqu'aux destins individuels des personnages. Tout se répond de manière tellement fluide qu'aucune frontière ne peut être tracée. On le voit notamment avec le narrateur : d'abord surtout observateur des évolutions qui l'entourent, il semble refuser de s'impliquer. Mais la vie et ses désirs vont l'obliger à prendre des risques qui vont lui créer des liens d'abord rassurants puis enfermants.

Le propos est riche et profond et on craint au début qu'il nuise à la narration, mais des évènements viennent sans cesse relancer l'intérêt. La galerie des personnages annexes est également essentielle, dans sa complexité foisonnante. Même l'esclavage est traité à travers le personnage de Metty, dans toutes ses ambiguïtés et avec un angle original qui fait ressortir une authenticité parfois dérangeante mais tellement intéressante dans la réflexion qu'elle amène.

Ce fleuve nous enserre totalement comme il enserre les personnages, protection et prison. On est tour à tour admiratifs et inquiets, comme les habitants face à ces jacinthes d'eau, "nouvelle chose du fleuve", qui l'orne et l'étouffe à la fois. Un Nobel méconnu qui gagne vraiment à être découvert.
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Avec cet envoûtant récit d'un auteur - citoyen du monde avant l'heure, ou plutôt avant que ce concept soit verbalisé dans les années 90 dans la foulée de la mondialisation naissante, je découvre V.S Naipaul vers lequel je suis déjà sûre que je vais revenir.

Ce que j'ai particulièrement aimé dans ce roman, c'est son angle, qui paradoxalement apporte une grande proximité avec son sujet: le regard distancié mais douloureux sur l'Afrique post coloniale de Salim, un Indien dont la famille est implantée depuis plusieurs générations sur la côte est, et qui sentant les bouleversements des temps nouveaux qui s'annoncent part s'implanter au coeur du continent pour tenter de réaliser son destin en même temps que de développer de nouvelles racines. Dans la ville non nommée, non située dans laquelle Salim reprend un petit commerce, l'activité repart sur les ruines des désordres tribaux avant que de nouvelles menaces politiques ne grondent, pendant que Salim s'interroge sur son identité, sur sa qualité d'étranger de l'intérieur, sur l'avenir de l'Afrique.

Le climat languissant, la pesanteur perceptible de l'atmosphère, la lenteur dans l'action et la puissance d'évocation de la nature luxuriante qui entoure et parfois enfouit la ville font de cette lecture une expérience très immersive, en même temps qu'elle apporte une réflexion d'une grande acuité sur la situation politique de l'Afrique à la fin des années soixante dix et sur les migrations et pertes de repères à venir.

Même si je suis passée à côté de la relation amoureuse délétère qu'il noue avec une jeune européenne désenchantée, dont je n'ai pas compris ce qu'elle apportait au propos, j'ai aimé plonger dans ce texte qui se lit avec tous les sens et une grande concentration. et qui comme l'a souligné à juste titre le jury du Nobel "condamne à voir la présence de l'histoire refoulée".

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Une grande épopée. Celle de Salim, un Indien vivant avec sa famille sur une côte africaine. Il va tenter sa chance à la courbe du fleuve, là où il y avait un ancien village de colons, mis en fuite ou en déroute et où il va ouvrir un magasin.

Même en traduction, l'écriture de Naipaul est belle. Simple mais belle. de ces écritures qui vous donne envie de continuer sans désemparer, tout en vous procurant la joie de lire une belle littérature.

Très heureuse découverte.
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Un récit à la première personne, fait par Salim, dont la famille d'origine indienne est installé depuis un certain temps en Afrique. Mais l'Afrique change, et Salim le pressent, et décide de quitter la région côtière où sont installés les siens et va vivre dans un autre pays, à l'intérieur des terres. Il observe tous les soubresauts du continent, entre décolonisation, révolutions, dictatures, guerres ethniques. Il n'est qu'un observateur, qui subit, qui n'anticipe même pas vraiment ce qui arrive et qui nous livre un tableau assez catastrophique et dépourvu d'espoir du devenir du continent et au-delà de la nature humaine en général, et de la planète en cours de mondialisation. C'est sombre, pessimiste mais en même temps terriblement juste.

Un livre sans concessions, caractérisé par un style élégant, mais sans fioritures, dépouillé tout en restant subtil.
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On retrouve dans ce beau roman tous les thèmes chers à Naipaul : l'exil et le voyage, le multiculturalisme, la colonisation et ses suites ravageuses, des pays qui se cherchent et se créent après la décolonisation. Page après page, des images grandioses et des visions d'une Afrique qui ne sera plus jamais la même s'offrent au lecteur à travers le parcours du héros à la recherche lui-même de sa propre identité.
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Donc, presque aussitôt après avoir été érigé - avec sans doute des discours consacrés aux soixante années à venir de la ligne - [le monument] avait été renversé. En même temps que tous les autres statues et monuments coloniaux. Les piédestaux avaient été dégradés, les grilles de protection aplaties, les projecteurs écrasés et abandonnés à la rouille. Les ruines avaient été laissées telles quelles; on n'avait faut aucune tentative pour mettre un peu d'ordre. Le nom des rues principales avait été changé. Des planches grossières portaient les nouveaux noms grossièrement écrits. Personne n'utilisait ces noms nouveaux, car personne ne les appréciait particulièrement. Ce qu'on avait voulu, c'était simplement se débarrasser des anciens, effacer le souvenir des intrus. La profondeur de cette rage africaine, cette volonté de détruire, sans souci des conséquences, était effrayante.
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Il nous faut apprendre à piétiner le passé Salim, je te l'ai dit. Il peut exister certaines parties du monde (des pays morts, paisibles ou dépassés) où il est permis de chérir le passé et songer à léguer ses meubles et sa porcelaine à ses héritiers. Au canada ou en Suède peut-être. Certaines régions agricoles françaises, pleines de châtelains dégénérés; certaines villes -- palais en ruines de l'Inde, ou villes mortes de l'époque coloniale en Amérique du Sud. Partout ailleurs les hommes sont en mouvement, le monde est en mouvement et le passé ne peut être qu'une cause de douleur.
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L'Afrique était mon pays natal, avait été celui de ma famille pendant des siècles. Mais nous venions de la côte est, ce qui faisait toute la différence. La côte n'était pas vraiment africaine. Elle était arabe, indoue, perse, portugaise et nous qui y vivions, étions en fait des gens de l'océan Indien. Nous tournions le dos à la véritable Afrique. Bien des kilomètres de brousse et de désert nous séparaient des gens de l'intérieur ; nous regardions vers la mer, vers les pays avec lesquels nous commercions : l'Arabie, l'Inde, la Perse. C'étaient aussi les pays de nos ancêtres. Mais nous ne pouvions plus dire que nous étions Arabes, Indiens ou Persans ; quand nous nous comparions à ces peuples, nous nous sentions Africains.
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J'étais jaloux surtout de l'idée qu'il s'était toujours faite de son importance et de son destin. Nous vivions sur le même morceau de terre ; nous regardions les mêmes paysages. Et pour lui le monde était neuf et le devenait toujours plus. Pour moi il était terne et dépourvu d'avenir.
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Le monde est ce qu'il est ; ceux qui ne sont rien ou ne cherchent pas à être quelqu'un, n'y ont pas leur place.
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Video de V. S. Naipaul (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de V. S. Naipaul
Discours de V. S. Naipaul à l'occassion de l'obtention du prix Nobel de littérature en 2001.
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