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EAN : 9791041400089
480 pages
Points (01/03/2024)
3.72/5   29 notes
Résumé :
Entre un père joueur de poker et une mère timide, Youssef vit à Beyrouth dans un monde imprégné de sensualité et de mystère. Les mélodies de l'hébreu qu'il entend chez lui se mêlent aux sonorités de la rue arabe. La crise de Suez n'est encore qu'une lointaine rumeur. Ce qui l'occupe, c'est l'éveil au sexe, le tumulte de peur et de désir qu'il sent monter en lui.

Vingt ans après, en Mai 68, il s'engage en politique pour rencontrer des filles. Mais l'Hi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
°°° Rentrée littéraire 2022 # 9 °°°

Dans le contexte actuel d'un Liban agonisant, le Tumulte fait revivre son Liban autour de trois temps forts avec les émotions intactes d'un auteur qui assume l'autofiction tant son personnage lui ressemble : Youssef Hosni, né dans une famille juive d'origine syrienne exilé à Beyrouth, jeune homme épris de justice et de liberté, devenu journaliste en France ( notamment l'envoyé spécial du journal Libération durant la guerre du Liban ). Ou comment la violence du monde vient façonner les destins individuels.

Le roman est divisé en trois parties parfaitement distinctes, toute centrée sur un moment fort de l'histoire du Liban. La première partie est une évocation poétique de l'enfance. Située en 1956, on découvre le narrateur à la veille de sa bar-mitzvah. L'éducation sentimentale et l'éveil à la sexualité occultent les questions autour de la crise de Suez et de l'occupation du Sinaï par l'armée israélienne. A treize ans, les préoccupations sont bien loin de la gravité de la guerre. Les pages sont souvent tendres et drôles, toujours empreintes de nostalgie.

Dans la deuxième partie, le récit change de tonalité et se fait plus ouvertement politique. En 1968, la vague libertaire est là et permet à chacun de s'extraire de son origine ethnique ou sociale pour se choisir une communauté d'idées. Youssef fait partie des leaders du mouvement étudiant tendance extrême-gauche. Il fait l'amère expérience des échauffourées avec les phalangistes ( parti politique chrétien ultra nationaliste de Gemayel ) puis de la prison prisons, quelques semaines après la Guerre des Six jours. C'est le temps de l'exode pour beaucoup.

Et dans la troisième partie, en 1982, journaliste installé en France , il retourne au Liban pour couvrir la guerre civile libanaise. C'est le temps des retrouvailles avec les amis de jeunesse dans un Beyrouth ravagée et assiégée par l'armée israélienne soutenue par les Phalangistes. Jusqu'aux massacres des réfugiés palestiniens dans les camps de Sabra et Chatila, extrêmement bien racontés à hauteur d'hommes pour faire sentir l'absurdité tragique de la guerre dans la poussière et le sang.

Ce roman est incontestablement ambitieux. Sa lecture, exigeante, demande un minimum de connaissances géopolitiques du Moyen-Orient ou de faire quelques recherches pour préciser certains points ( ce que j'ai fait assez souvent). La trame narrative peut ainsi sembler parfois peu lisible, voire confuse. Et pas seulement à cause de la masse d'informations historiques délivrées. le fait de proposer trois parties avec autant d'ellipses temporelles ( 1956 puis 1968 puis 1982 ) nécessite une réelle concentration pour raccrocher les informations et suivre le parcours de Youssef.

Malgré cette réserve, j'ai suivi Youssef sans le lâcher, touché par sa sensibilité, son engagement et son amour pour la capitale libanaise, vérifiant l'adage « Beyrouth te suivra jusqu'à ton dernier souffle, où que tu sois. » On ressent toute la passion et la sincérité de l'auteur. Et c'est passionnant de déambuler dans Beyrouth en sentant la main de l'auteur nous guider. On pleure avec lui la perte d'un Liban cosmopolite, ouvert à l'autre, on déplore avec lui la fin d'un rêve national où chacun appartiendrait à son pays avant d'appartenir à une confession. Surtout, on comprend comment le peuple libanais s'est fait déposséder de sa volonté de vivre ensemble dans un pays devenu le terrain de jeu des extrémismes chiites, sunnites, maronites, des pays voisins et communauté internationale plus largement.

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Selim Nassib nous fait revivre par l'intermédiaire de son personnage les temps fort de l'histoire du Liban du 20ème siècle.
Youssef est juif, d'origine Syrienne et vit à Beyrouth
1956 : sa jeunesse, son adolescence. Les premiers émois. La violence faites aux femmes aussi. Ce tableau montre que déjà à cette époque, dans un Liban du vivre ensemble, les communautés ne se mélangeaient pas vraiment. Youssef va à l'école juive, a un seul camarade musulman (fils du professeur d'arabe), ne connait pas le quartier musulman. La crise du canal de Suez, c'est loin, et Youssef à d'autres chats à fouetter.
Cette partie est intéressante pour sa façon de raconter la vie d'une famille dans les années 50 au Liban.
1968 : année des insurrections étudiantes de par le monde. le Liban n'a pas été épargné. La révolte étudiante s'est alors amalgamée avec la cause palestinienne. le roman prend un ton plus politique et notre héros se retrouve emprisonné, prisonnier politique dans son propre pays.
1982 : la guerre civile et ses multiples factions , le départ d'Arafat, l'assassinat de Bachir Gemayel après avoir été élu président du Liban pour se terminer sur les massacres de Sabra et Chatila.

L'histoire du proche Orient à cette époque est quelque chose que je ne maitrise pas très bien. Il faut dire, c'est un bordel sans nom.
Ce livre permet de remettre un peu les choses à place, et de s'interroger sur les faits (Wikipedia est ton ami et un très bon ami dans ce cas).
J'ai trouvé le bouquin très intéressant, et j'en sors un peu moins bête, je suis heureuse !
Sincèrement, je vous le conseille, il est passé un peu sous les radars de la rentrée littéraire de septembre, mais c'est un tort.

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On ne lui prendra pas Beyrouth
J'ai beaucoup aimé la construction de ce livre en triptyque. Premier tableau l'enfant qui est avide de grandir, nous sommes en 1956 et Youssef Hosni a 13 ans, puis l'étudiant en 1968 et les actions en faveur du progressisme, et 1982 le journaliste qui couvre les conflits.
C'est à travers ce roman aux accents autobiographiques la mémoire du Liban qui se déroule sous nos yeux et comment on a laminé ce pays. Les émotions sont intactes et Sélim Nassib nous les fait vivre pleinement.
La première partie est celle de l'enfant qui veut sortir des limbes de cette période, il veut vivre la sensualité, la sexualité devenir un homme.
Au sein de sa famille, il est pressé de tout voir, de tout comprendre et de tout vivre. C'est pour le lecteur une façon d'appréhender les us et coutumes de ce pays.
« Treize ans est l'âge fixé par Dieu lui-même, des forces supérieures se conjugueront à la seconde dite et me feront changer d'état. Alors j'entrerai dans le monde de Rocco, libéré de toute tutelle, responsable de mes actes, comptant dans le miniane et la prière des morts, sexuellement puissant, faisant partie de la tribu, libre de la quitter enfin. »
Sa mère enceinte à 20 ans a finalement été épousée par le père, joueur de poker invétéré, qui n'a rien changé à ses habitudes et qui est recherché pour dettes de jeu et met sa famille en danger. Mais le couple restera ensemble. L'oncle Victor est un pilier, c'est lui qui met la famille à l'abri quand les évènements sont menaçants.
Rocco le copain plus âgé, sorte de petit voyou, va faire des études de lettres et quittera le quartier juif pour vivre au milieu des musulmans.
Fouad autre figure de la jeunesse deviendra avocat.
Youssef fera des études à Paris et fera des aller-retour régulièrement entre Paris et Beyrouth.
« La guerre a changé les choses du tout au tout ... Et tout devient vrai : ce n'est pas une guerre parmi d'autres, vite venue vite passée, mais un évènement historique majeur capable de déclencher l'exode de toute une communauté — jusqu'à atteindre les êtres les plus rétifs au changement . »
C'est un livre très réaliste, d'une densité qui peut décourager et qui aurait mérité une trilogie.
La narration est puissante, l'écriture rythmée et le lecteur ressent bien la nécessité de témoigner sur ce Liban qui est toujours en effervescence et dans l'actualité.
Je trouve que la forme du roman fait perdurer ce passage de témoin et comme l'écrit l'auteur :
« Beyrouth te suivra jusqu'à ton dernier souffle, où que tu sois, c'est elle qui te fermera les yeux. »
Lu dans le cadre du Prix du Roman FNAC 2022 et toujours en lice.
©Chantal Lafon


Lien : https://jai2motsavousdire.wo..
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3 périodes de la vie de l'auteur associées à 3 périodes de l'histoire du Liban.
1956: L'enfance de l'auteur dans un Liban où plusieurs communautés culturelles et religieuses réussissent à cohabiter ensemble
1968: La jeunesse de l'auteur, ses premiers amours et ses engagements politiques qui le conduisent jusqu'à la prison dans un pays qui commence à se fracturer.
1982: L' auteur journaliste en France depuis plusieurs années revient au Liban pour couvrir la guerre. Il retrouve ses amis mais découvre un pays ravagé par la guerre, Beyrouth dévasté et assiégé par l'armée israélienne.

Un livre passionnant que je conseille à tous les amateurs de géo-politique, qui se laisse lire malgré la complexité du sujet et nous oblige à aller plus loin pour faire quelques recherches sur l'histoire tumultueuse de ce pays fascinant.
Sélim Nassib nous fait partager ses émotions et sa colère mais aussi son désarroi devant l'éclatement de son pays. A lire absolument.
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In the mood for…Beyrouth, mon amour.

Aujourd'hui je voudrais vous parler d'un roman courageux, atypique et puissant.
J'y ai trouvé un véritable rythme, un balancement entre violence et tendresse, presque comme l'illustration de la lutte interne du protagoniste, Youssef. Ce roman est divisé en trois années distinctes, avec une unité de lieu, Beyrouth. Mais derrière ce même nom, en treize ans, ce sont des réalités bien différentes que Youssef explore : en effet, la ville change de visage.

Tout d'abord, 1959.
C'est l'adolescence, la langue française, l'école juive, les amis musulmans comme des mystères, le père très silencieux mais dévoré par sa passion du jeu, la mère enfermée dans sa colère et sa cuisine. Et la découverte du désir.
Puis, 1968.
Les années de l'engagement politique, de l'espoir que les confessions ne soient plus un facteur de division entre les Libanais. L'échec de l'idéal.
Enfin, 1982.
En pleine guerre civile, Youssef, devenu journaliste en France, ressent le désir de retrouver sa ville natale. Il couvre donc le conflit, de l'intérieur. Les amis retrouvés, les fractures, les alliances. La ligne de téléphone qui fonctionne une fois sur dix, l'électricité coupée. La chaleur. Les bombes. La terreur. L'héroïne pour tout tenir à distance.
Partir, rester ? Mais peut-il seulement vivre loin de Beyrouth ?

Pour ce roman, Sélim Nassib a remporté le Prix France-Liban 2022 de l'ADEFL.
Lien : https://www.instagram.com/in..
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critiques presse (2)
LePoint
19 décembre 2022
Il faut ce courage admirable, de la part d'un écrivain qui jamais ne se donne le beau rôle, ni l'inverse, pour nous entraîner avec son héros frère au cœur de ce Tumulte, un titre peu attractif au départ, mais dont on mesure l'exactitude après être sorti de ce voyage au bout du bruit et de la fureur qui vous marque au corps et au cœur. La marque des très grands livres.
Lire la critique sur le site : LePoint
LeMonde
20 octobre 2022
Sélim Nassib est cette voix, aujourd’hui, et Le Tumulte s’avère en ce sens un grand livre de découverte autant que de mémoire, où l’auteur s’est choisi un double de fiction.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
J’avance lentement la main et saisis le coin du drap qui lui couvre le ventre. Avec douceur, je le soulève. Ce que je découvre en dessous, c’est qu’elle ne porte pas de culotte comme nous mais toutes sortes de bizarreries. C’est peut-être normal puisqu’elle est kurde. Une étoffe grossière lui passe entre les jambes, fait le tour des hanches et se noue autour de la taille. Incroyable que ce tissu plié sur plusieurs couches soit le seul barrage. Il est un peu lâche, il suffirait de l’écarter un peu.
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Chez nous, on parle français. Sauf papa qui ne parle jamais, ou rarement. Le français, c’est maman. La frangié, c’est comme ça que ses sœurs l’appellent. Ça lui est égal : elle continue de me pousser vers le français comme s’il était son seul miroir, mon seul avenir. Elle s’y retranche. La France a quitté le Liban depuis plus de dix ans mais même de loin elle reste « la tendre mère » qui veille et protège, la source qui pourvoit en images, en rêves. L’arabe, lui, est réservé aux échanges avec les épiciers ou les bonnes, mais c’est aussi la langue de tout ce qui est sale. Niquer, bite, putain, maquereau, masturber, enculer, tous ces mots n’existent pas en français. Le français est une langue aussi bien élevée que moi, en costume de velours à bretelles et chemise de satin, innocent petit garçon à sa maman, respectueux.
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Ton père, lui, vient d’Irak. Elle appuie toujours sur ces mots, ton père, et quand elle s’adresse à une tierce personne, elle dit lui, sans jamais l’appeler par son nom. Mais tu n’es pas irakien ! Je ne comprends pas. C’est quoi, alors, être syrien, être irakien ? C’est avoir les papiers, et nous ne les avons pas. Mais l’accent, est-ce que nous l’avons, l’accent ? Ça dépend.
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Il me fait épouser sa cambrure parfaite, toujours plus haut, et me porte jusqu’au point où il accumule toute sa puissance. J’arrache mon plaisir avec férocité, je le dispute à l’attraction du trou, je l’agrippe comme un avare qui croyait avoir tout perdu. Depuis le sommet, je fixe le rocher plat aux crêtes coupantes où je vais m’écraser, je n’y peux plus rien. Ce moment d’arrêt où je suis chaudement tenu prisonnier, ce court instant de lévitation est précisément ce que je cherche. Une seconde de suspens, une seule, volée au cours normal du temps, et la décharge prodigieuse me précipite la tête en avant.
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Mais le long de ses coursives lambrissées décorées façon La croisière s'amuse, des combattants errent, le regard perdu, la kalachnikov à la bretelle. La collusion incongrue de la guerre et du divertissement fait qu'on ne sait plus très bien dans quelle histoire on est.
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Videos de Sélim Nassib (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Sélim Nassib
Deux auteurs nous emmènent en voyage littéraire au Liban, entre quête des origines, amour pour ce pays et évocation de la guerre civile.
Selim Nassib, journaliste et écrivain, est né à Beyrouth. Dans "Le Tumulte" (L'Olivier, août 2022), il propose un livre en deux parties : derrière son protagoniste Youssef sont racontés un récit de jeunesse, les années étudiantes et militantes dans le Liban des années 1960, puis l'invasion par l'armée israélienne et le retour comme journaliste accrédité pour Libération. Sabyl Ghoussoub est né à Paris et a grandi en France, mais ses origines sont au Liban. Ecrivain, chroniqueur pour "L'Orient le Jour" et photographe, il publie "Beyrouth-sur-Seine" (Stock, août 2022).
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