AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Denis3


Denis3
16 septembre 2022
Un fort beau témoignage - car ce n'est ni un livre d'histoire ni un pur travail de journaliste - de Catherine Nay, témoignage d'une époque qu'elle a vécue, comme journaliste et comme femme.

De Chirac à Hollande, tous les présidents, et quelques seconds couteaux ou familiers, passent la revue.

Chirac, homme qui cultivait les paradoxes: chaleureux et bon vivant, mais aussi ambiteux, tenace et têtu. D'une culture rare - expert en civilisations asiatiques et africaines - il aimait à se profiler en auvergnat pur jus. Son ménage était un noeud gordien de tensions qui n'éclataient (presque) pas au grand jour : le plébéien avait épousé une dame de la noblesse " de lapin", disait-il. L'homme d'action inébranlable avait le coeur brisé par le malheur de sa fille anorexique. Alors, simple distinction entre l'homme public et l'homme privé ? Non, à mon sens Jacques Chirac était un homme à dimensions multiples, qu'il gérait sans doute séparément. Quelqu'un d'une complexité ordonnée.

Après la fameuse dissolution, Jospin en premier ministre. Crispé, braqué sur la ligne médiane de sa "majorité plurielle", aimable dans la vie privée mais incapable de montrer la moindre chaleur en tant que politique.

L'Ultramarin en passant, la sortie de la marginalité, les racolages de bonimenteur, puis le " détail de la seconde guerre mondiale" et le "four crématoire", la chute ...

Séguin, plombé par son éternel spleen existentiel, dû à ce père biologique qui ne l'aura jamais reconnu. Doué mais sans colonne vertébrale, en fin de compte un énorme gâchis.

Le phénomène Sarkozy. Là aussi un père biologique qui a plaqué, mais une réaction inverse : on prend la vie d'assaut, on attaque tout de suite - ils vont voir ce qu'ils vont voir ! On brûle les étapes, on conquiert, on leur rentre dans le lard. Comme si l'on voulait montrer sa valeur à son père absent - espérant qu'il rentre ? - et impressionner sa "mère" - pour qu'elle reste ? Dans le rôle de la femme à impressionner : Cecilia, celle dont on se fait le champion. le soir ou Sarko est élu, son père, fugeur comme toujours, commente " j'aurais préféré que mon fils soit président des Etats-Unis". Et Cécilia le quitte. La dynamique s'éffondre. Il s'en remettra, grâce à Carla. Mais quel crash ! Un homme doué, surexcité, et si fragile.

Hollande. Une version lessivée de Jospin? J'en ai bien l'impression. A part le bouquin qui aura causé sa perte, laissera t-il une trace ?

Ces politiques sont des hommes. Ils ont leurs forces, leurs fragilités. Comme nous, ils sont obligés d'assumer, de gérer leur caractère, leur passé. Ce ne sont ni des ectoplasmes ni des robots. Oui, souvent ils font preuve d'une ambition démesurée ( pourquoi ? voilà la question intéressante) et d'une immense estime de soi au détriment de leurs concurrents. Giscard croyait que Chirac était un technocrate plutôt idiot, Chirac le lui rendait bien, et il estimait - au début - que Balladur n'aurait jamais d'ambitions présidentielles. Sarkozy traitait Dominique de Villepin d'amateur et refusait de voir en lui un concurrent. Seguin disait qu'il n'y avait eu que deux types intelligents, lui et De Gaulle. Quand à de Villepin, il allait les niquer tous. Un aveuglement extrêment dangeureux. Et parfois - comme Chirac et peut-être Mitterand - ils ne savent pas s'arrêter à temps.

L'écriture de Catherine Nay me plait tellement que je vais rajouter sa biographie de Chirac à ma liste, peu-être aussi celle de Sarkozy.

Bonne lecture !



Commenter  J’apprécie          303



Ont apprécié cette critique (27)voir plus




{* *}