AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Apophis


Une belle écriture, mais un premier tome un peu creux (bien que prometteur)

- Univers

L'aspect martial de l'univers rappelle le Japon ancien (le Tahédo n'est qu'un synonyme pour le Bushido), La septième épée de Dave Duncan et les Bene Gesserit de Dune. Les épéistes portent un bracelet avec un certain nombre de marques (comprenez de Dan) en fonction de leur degré d'expertise. Il y a des initiés, des apprentis et des maîtres (sept marques ou plus). Ces derniers sont appelés Tahédorans, et seul un candidat sur 5000 parvient à ce niveau.

Un des protagonistes, Kratos (clairement modelé sur la divinité grecque du même nom, ce qui, vu la qualité de professeur de grec ancien de l'auteur et sa passion pour ce panthéon, n'étonnera personne) est un des seuls à arborer neuf marques et à maîtriser le troisième niveau d'Accélération (pensez à un surboost des fonctions métaboliques pour atteindre une vitesse de déplacement, une perception et des réflexes super-humains) avec le maître du site d'entraînement (qui possède également un dixième rang honorifique). Les autres Tahédorans ne maîtrisent que la seconde accélération et l'écrasante majorité ne dépasse pas la huitième marque.

Les relations entre épéistes sont très ritualisées, tout comme l'est le rapport à l'épée : clairement modelées sur les Katana, ces dernières possèdent toutes un nom. La plus célèbre est Zémal, car elle a été forgée dans les feux de l'enfer par le Dieu Forgeron en personne. Pensez à une arme conférant le pouvoir politique à son porteur à la manière d'Excalibur et possédant la puissance d'un sabre-laser, et vous aurez une bonne idée de la chose. le porteur de Zémal est appelé le Zémalnit : à sa mort, les candidats, tous Tahédorans, s'affrontent pour avoir le droit de la brandir. Cette fois, ils sont au nombre de sept, six hommes et une femme.

Lorsque l'histoire commence, cet univers approche de son an Mil, sur fond de problèmes politiques, militaires et religieux : le porteur de Zémal vient de mourir (et pas de façon naturelle…), alors que dans le sud, l'Envoyé est à la tête d'une croisade qui cherche à imposer par le fer et le feu le monothéisme dans un monde caractérisé jusque là par la coexistence harmonieuse de panthéons divers et variés, et que dans le nord, le Prince Togul Barok se fait de plus en plus ambitieux, ce qui pose un problème vu qu'il est un des Tahédorans pouvant prétendre à la possession de l'épée mythique. S'il venait à l'obtenir, ce seigneur de la guerre mettrait le monde à genoux…

L'aspect magique est à la fois riche et original : à la mort de son maître, un des protagonistes hérite de sa Syfron, sorte de repli de l'espace et du temps contenant la mémoire de ses précédents porteurs, ainsi que pouvoirs et sortilèges. Si un mage est tué, sa Syfron implose, provoquant l'équivalent d'une petite explosion nucléaire. Les mages sont très peu nombreux, sept pour être précis (comme dans le livre de Dave Duncan, ce chiffre est omniprésent et possède de fortes connotations mystiques). Les combats entre mages sont très bien rendus et d'une puissance assez apocalyptique.


En tout cas, sur le volet purement Fantasy, l'ambiance gréco-japonaise (les deux influences se mariant parfaitement) est vraiment très plaisante.

- Un style magistral…

La structure est classique (linéaire) lors des 250 premières pages environ, avant de se faire plus ambitieuse : elle entrelace alors flash-forward, scènes dans le présent et flash-back. L'auteur maîtrise son sujet, on ne se sent (presque) jamais dérouté.

Ce qui frappe avant tout, c'est la qualité de la plume de Javier Negrete (et celle du traducteur, d'ailleurs) : il se révèle être un conteur assez exceptionnel, capable de descriptions très évocatrices de paysages, de villes cosmopolites, de forêts enchanteresses ou de créatures tour à tour merveilleuses ou terrifiantes. Ce roman est avant tout un voyage, et la Tramorée est tangible, vivante, sous le regard du lecteur. de plus, rares sont les auteurs aussi à l'aise dans le registre du merveilleux que dans celui du sang et tripes (sans que ce livre n'appartienne, même de loin, au grim & gritty), dans la description des pratiques arcanes autant que dans celle des passes d'armes des maîtres de l'épée, dans le registre humoristique autant que dans l'art de brosser une scène épique ou horrifique. Mine de rien, être à l'aise et intéressant dans autant de registres, ce n'est pas donné à tout le monde.

Bref, l'auteur maîtrise son sujet sur ces plans, là n'est pas le problème.

- … des personnages, un rythme et une intrigue qui le sont moins

J'ai trouvé les personnages très stéréotypés et relativement pauvres (sans que ce soit catastrophique) pour la plupart. Je veux dire, le vieux maître Samouraï (ou équivalent) bourru et buriné, le quasi-Gandalf, le gentil qui est l'élu des dieux (et qui s'est vu injustement renvoyer de son école sous un prétexte fallacieux…), l'apprenti-sorcier qui a le potentiel pour devenir le plus redoutable sorcier de tous les temps, le méchant qui est le parent caché d'un des personnages, c'est du mille fois vu et revu, hein. Et c'est la même chose pour l'intrigue, qui est très (trop ?) classique (attention : si l'intrigue l'est, le contexte l'est beaucoup moins, comme j'ai déjà eu l'occasion de l'évoquer). Et pour couronner le tout, oui il se passe des choses, mais il y a une espèce de faux-rythme (ou de rythme fluctuant) qui fait que parfois, on lit un peu en diagonale.

En conclusion

Les trois gros atouts de ce roman sont son riche univers, son ambiance gréco-japonaise épique, et surtout le style extrêmement agréable de l'auteur espagnol. Ses défauts sont (dans ce premier tome, du moins) des personnages et une intrigue un peu faibles. Mais au final, c'est un bon livre de fantasy, avec lequel on passe tout de même de forts agréables moments.


Lien : https://lecultedapophis.word..
Commenter  J’apprécie          126



Ont apprécié cette critique (6)voir plus




{* *}