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Olivier Philipponnat (Éditeur scientifique)
EAN : 9782207259566
240 pages
Denoël (07/05/2009)
3.76/5   42 notes
Résumé :
Femmes terrassées par la fortune qui a cessé de leur obéir. Hommes brutalement dépouillés de leurs atouts. Mères abîmées dans le regret du "temps aboli". Fils et filles hantés par la malédiction de l'hérédité. Rarement l'ironie d'Irène Némirovsky aura fait autant de ravages que dans ce volume plein d'"avertissements à distance". Si fragile que soit le sort d'Anne, Marcelle ou Camille, un fil les relie à la vie. Il court d'un bout à l'autre de ces douze nouvelles, in... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Sans aucun doute Irène Nemirovsky touche les coeurs, avec un baume fait maison, avec une pointe acérée aussi, et surtout avec l'inattendu qui éveille, surprend, souvent contrarie, et toujours réfléchit sur les comportements nés d'un vécu, meurtris par un événement ou par une histoire.
La danseuses est prête à entrer en scène, mais avant elle cherche dans Les cartes l'amour, la fortune et le succès qui ne viennent plus. "Elle répète machinalement : amour, fortune, succès, mais elle n'y croit plus. Voilà son mal."
Chercher de fausses routes, pour finalement arriver nulle part, serait-ce, peut-être une façon choisie par la vie pour nous dire que sa ruse a bien marché ?
Magie, maître de son destin ? il y a des philosophes et des adeptes de l'existentialisme, mais souvent la vie sourit et nous fait vivre des moments qu'elle a choisis pour nous avec des erreurs et des mailles manquées !
La Grande Allée - une triste vérité fait entendre sa voix : suivre la foule, écouter et respecter aveuglement des structures sociétales où la réflexion manque et la guerre guette et gagne.
Film parlé, celui d'Eliane, vieille entraîneuse et de sa fille Anne qui oublie sa rancune envers sa mère quand la nécessité est plus forte. L'oeil d'Irène Némirovsky, collé à la caméra en vrai cinéaste, suit chaque geste chaque expression des visages, les déplacement des personnages dans le temps et dans l'espace en flash-back, longs travellings, fondus enchaînés, champs contre champs où le dialogue est percutant. La maîtrise de l'image est parfaite.
Les vierges, c'est un cri, celui du personnage Camille. Épouse, mère, femme abandonnée, une vie de douleur, sans bonheur, elle a la quarantaine mûre maintenant et parle à sa soeur et aux amies vieilles filles vierges, de son vécu, mais avec "l'inimitable prestige de l'expérience... comme un musicien, un artiste, un créateur de génie à de petites demoiselles de pensionnat qui jouent la Sonate au clair de lune avec des hésitations, des fausses notes et des repentirs."
"...je n'ai jamais été heureuse... ce n'est pas du bonheur. C'est un goût que l'amour seul peut donner à la vie, un goût de fruit, sapide, juteux, presque un peu âpre..." C'est "la vie toute crue."
"J'avais été malheureuse, c'est vrai... J'envie vos existences tranquilles mais...j'ai été riche, vous comprenez, j'ai été comblée, et vous, vous n'avez jamais rien eu... Alors, ma tante Alberte, laissa tomber son tricot, porta ses mains à ses paupières et, tout à coup, éclata en sanglots.
-Qu'est-ce qu'il y a Alberte chérie ? Je sais, je comprends, tu as pitié de moi, tu pleures...
- Pitié de toi ? répondit Alberte. Oh ! non ! pas de toi, Camille."
La vie peut blesser, faire très mal, salir, mutiler, mettre en petits morceaux, mais c'est tout ce qu'on a, comment sentir son goût si on ne la vit pas en la regardant droit dans les yeux ?
Des être dupés par Dame Fortune, moqués par la Vie, et bafoués par le Destin qu'on veuille accepter ou pas, mais leurs cris s'élèvent et traversent les temps avec celui d'Irène Némirovsky, ils ne sont pas seuls.
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J'ai beaucoup lu Irène Némirovsky, et j'ai aimé ce que j'ai lu.

Pour commencer, c'est une femme dont le destin tragique me fascine. Je ne vais pas reporter ici sa biographie, je vous invite simplement à quelques minutes de curiosité sur internet pour en savoir plus.

Pour poursuivre, son oeuvre est pleine de talent. Talent de l'écriture mais aussi de la narration avec un sens du témoignage aigu, naturaliste, réaliste, touchant. Irène Némirovsky parle à nos sens, à nos émotions, elle fait mouche le plus souvent.

Irène Némirovsky est une autrice de l'entre-deux-guerres. Elle dépeint les moeurs et les us de cette période à nulle autre pareille. Cette parenthèse de misère et de faste, de convalescence, de dépression, de folie et d'émancipation.

A travers les nouvelles de ce recueil, elle donne encore une fois rendez-vous à ses lecteurs dans le Paris nocturne, populaire, bourgeois, petit-bourgeois, laborieux, fastueux. Certaines nouvelles s'éloignent de Paris pour se perdre en province mais elles n'ont pas la force d'évocation des nouvelles citadines. Irène Némirovsky nous fait entrer dans les lupanars, dans les intérieurs, dans une vie quotidienne souvent pénible. Histoires de famille, de filiation, d'amour, d'ambition, de rédemption ; les nouvelles sont variées avec parfois même une pointe de fantastique. Irène Némirovsky maîtrise l'art de la nouvelle.

Le point commun de ces douze récits ? La saveur d'une langue parfaitement maîtrisée, la richesse d'une culture protéiforme, la sincérité d'une autrice envers ses personnages. Ma nouvelle préférée est "Les Vierges" qui donne son nom au recueil et qui dresse des portraits de femmes "en vérité", faisant fi du politiquement correct d'alors.


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J'ai choisi de ne pas lire dans l'ordre présenté les douze textes de ce recueil, de commencer par les plus courtes afin de m'imprégner de la « façon » Némirovsky et de lire en ayant une idée de la vie de l'autrice afin de profiter d'une richesse de narration, miraculeusement sortie de l'oubli. Aussi je place dès maintenant une courte biographie, plantant un décor compliqué, singulier et tragique.

D'origine juive ukrainienne, Irène Némirovsky est née en 1903 à Kiev. Enfance dorée sans amour. Toute la riche famille fuit la Russie à la révolution et s'installe dans le sud de la France. Elle écrit et connaît le succès dès son premier roman, David Golder (1929), puis avec le bal (1930). Après l'exode, elle se réfugie dans un village du Morvan avant d'être arrêtée par les gendarmes français, puis déportée et assassinée à Auschwitz, l'été 1942. Agée de treize ans, sa fille aînée, Denise, emporte dans sa fuite une valise contenant une relique douloureuse : le manuscrit ultime de sa mère, Suite française, qui ne sera publié qu'en 2004 (prix Renaudot). Depuis les rééditions et éditions posthumes s'enchaînent et une nouvelle notoriété vient couronner le talent littéraire d'une autrice au terrible destin. Cette autrice nous permet de mieux comprendre le XXème siècle et surtout d'accéder à la détresse d'une femme, d'une artiste dans la tourmente des exils et des tentatives de s'en sortir par l'écriture.

Echo : Cette très courte nouvelle de 6 pages est une des plus belles. Comme un écho de l'enfance. On y sent toute la détresse et l'humour qui met à distance certaines réminiscences douloureuses. Son père, qu'elle admirait, avait eu peu d'intérêt pour elle, occupé par ses affaires, souvent en voyage ou à jouer des fortunes au casino. Pourtant elle l'adorait et l'admirait. Il s'agit ici, d'un petit garçon mais c'est Irène que j'ai vue. Et quelle chute, une des plus réussies du recueil.

La voleuse : mise en scène de trois générations de femmes et des vies brisées par l'incompréhension, le manque d'amour. La petite fille butée, tenace, c'est Irène ?

Les vierges : cette nouvelle, titre du recueil, est très réussie. Une histoire de femmes, comme souvent dans ces courts récits. La condition des femmes décrite ici : la violence comme communication de Camille ou le morne célibat d'Alberte, de Blanche, de Marcelle. N'est-ce pas la vie de ses parents qu'elle met en scène à travers le récit de Camille ?

Magie : Cette nouvelle décrit, de belle façon romancée, l'ambiance alors qu'Irène a 15 ans et qu'en janvier 1918, les Némirovsky gagnent en traîneau la Finlande puis s'installent dans un hameau avec d'autres russes qui attendent comme eux de voir quelle tournure prendront les événements. Neige, solitude des exilés de la révolution russe, jeux et séances de spiritisme, coups de feu dans le silence, la guerre civile sévissant aussi dans cette région. « Les cartes », questionnent également le destin qui est maléfique. La menace est là et le bonheur fuyant, toujours ! Et « Les revenants » évoquent des souvenirs bien lointains de l'enfance...

La peur : trois pages et quelques lignes pour dire l'absurdité des armes, de la guerre. Superbe ! « La grande allée » aussi sur le même thème.

L'inconnue : une célébrité piégée. le calcul des arrivistes, l'amour comme piège tendu dans l'ombre. Effrayant !

L'ami et la femme : curieuse histoire de cette femme punie pour ne pas être restée fidèle à son ami décédé. Les clichés, les préjugés, misogynes – mais pas seulement – reflets de l'époque et de sa classe sociale, éclatent ici et dans l'ensemble de l'oeuvre de cette autrice. Elle interroge rarement la réalité, elle la dépeint seulement telle qu'elle la voit, une sorte de naturalisme, pas du tout social, elle qui a aussi publié chez Gringoire ou Je suis partout, des publications collaborationnistes d'extrême droite.

Ces nouvelles sont de qualité inégale, mais toutes nous disent beaucoup de la vie d'Irène Némirovsky. C'est une autrice qui sait peindre ses personnages, avec humour, ironie bien souvent ! Un miroir est tendu vers ce passé qui traverse la Russie, la guerre, la haine de classes sociales fortunées, la solidarité parfois des petites gens. Elle avait écrit plusieurs scénarios de films, sans succès. La nouvelle « film parlé » – dans un style différent des autres –, illustre ce travail de préparation d'une oeuvre à écrire ou un film à tourner et elle met en avant cette soif d'amour maternel qu'elle n'a pas eu.
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Des nouvelles diverses, des oeuvres de jeunesse de cette auteure décédée dans les camps nazis.

Née dans l'empire russe, sa famille a fui la révolution soviétique à travers la Finlande avant de s'installer à Paris. Des nouvelles se situent dans le cadre de leur fuite nordique avec les longues nuits qui se prêtent aux fantômes.

C'est une belle écriture, avec des portraits de femmes, mais des portraits impitoyables mêlés d'ironie, démontrant une finesse d'observation hors du commun.

L'ensemble est un peu inégal et n'a pas la puissance de la Suite Française. C'est une lecture intéressante, mais on refermera le livre sans une émotion bouleversante.
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Ce recueil contient douze nouvelles : Film parlé, Echo, Magie, En raison des circonstances, Les cartes, La peur, L'inconnue, La voleuse, Les revenants, L'ami et la femme, La grande allée, Les vierges.

Toutes m'ont enchantée.

La première et la dernière ainsi que "La voleuse" m'ont fait grande impression. L'engrenage fatal du monde de la nuit à Paris, dépeint avec puissance dans ses mécanismes inexorables, sans jugement pour les pauvres humains dévoyés, les hommes de passage et les femmes définitivement englués. "La voleuse", ou comment une matriarche sait à la fois maintenir l'honneur du clan et aimer. "Les vierges", beau à couper le souffle. L'écriture est magnifique, subtile, rageuse : elle peint un monde cruel dans lequel le salut ne se trouve que dans les interstices, comme les mauvaises herbes entre les pavés des villes.

J'aime Irène Nemirovsky.
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Citations et extraits (33) Voir plus Ajouter une citation
- Moi, je suis l’aînée d’une famille de dix enfants, comme vous le savez. Dix enfants dans une famille de pauvres, dans un logement étroit, vous pensez que je devinais bien des choses. Moi, je n’ai jamais rêvé à l’amour, ni au mariage, ni à la maternité. Je connaissais l’envers de tout ça, l’air faraud du père qui s’en va au café et qui laisse la mère à la maison « se débrouiller avec ses gosses ». Se débrouiller, oui, ou mourir à la peine comme elle l’a fait, la pauvre femme. Elle est morte en mettant au monde le onzième enfant, le dernier, mon frère Louis. Et qu’on ne vienne pas me parler des bébés et du bonheur de les soigner, de les dorloter. Je sais ce que c’est, moi, je sors d’en prendre, j’étais l’aînée, vous comprenez. C’était moi qui aidais à la lessive, au ménage, à la confection des biberons. Moi qu’ils réveillaient avec leurs pleurs, moi qui voyais ma pauvre mère, lasse, flétrie, à trente ans, l’air d’une vieille, sans jamais un moment de répit, travaillant à la maison, travaillant au jardin, toujours un gosse pendu à sa main ou à sa jupe, un autre dans ses bras. Oh ! non, je n’ai jamais désiré un homme ou des bébés. Dieu merci, je suis bien tranquille, je gagne ma vie, j’ai mon jardin, ma petite maison, des fleurs, des bêtes. J’étais faite pour cette vie-là et pas pour une autre.
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Comment décrire le silence de ces nuits du Nord, sans un souffle de vent, sans un gémissement de roues, sans un cri joyeux, sans un appel, sans un cri?

(p. 94)
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« Quand je t’embrasse, il me semble que je bois un verre d’eau de source », disait-il. Mais à chacun de ses retours il devenait encore plus étrange, plus lointain, plus étranger. Il ressemblait au René de 1914 comme un homme ressemble à l’enfant qu’il a été. Au fond, je te dis beaucoup de paroles pour expliquer une chose si simple. Nous avions eu le même âge. Maintenant il était vieux. Peut-être l’âge que l’on a se mesure-t-il moins au jour de la naissance qu’à celui de la mort ? Il devait mourir à vingt ans. Il semblait que quelqu’un se hâtait de l’amener à maturité pour le cueillir vite, comme un fruit. Et moi, comme j’étais maladroite. Tantôt je lui parlais de la guerre ; il répondait avec mauvaise grâce et le plus souvent il ne répondait pas. Tu te rappelles, même après, lorsque tout fut fini, les anciens combattants ne parlaient jamais de la guerre. Et on les louait beaucoup pour leur réserve, pour leur pudeur. Parfois, j’ai pensé que s’ils ne parlaient pas, c’est que personne, au fond, ne les questionnait. Nous, les femmes, nous ne les interrogions pas, parce que, d’abord nous avions peur : c’était trop sauvage, trop horrible, trop triste et cruel… Et ensuite une femme est toujours jalouse de la guerre.
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Ma vie est assez dure et assez difficile pour ne pas y mêler des sentiments ou des passions.

(p.99)
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Parfois j'ai pensé que s'ils ne parlaient pas, c'est que personne, au fond, ne les questionnait. Nous, les femmes, nous ne les interrogions pas, parce que , d'abord, nous avions peur: c'était trop sauvage, trop horrible, trop triste et cruel... Et ensuite une femme est toujours jalouse de la guerre.
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Elle fut l'une des romancières les plus en vue des années 30 puis on l'a oublié après sa mort en déportation… jusqu'à sa redécouverte il y a quelques années. Son nom ? Irène Némirovsky;
« Suite française » d'Irène Némirovsky, c'est à lire aux éditions Denoël.
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