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Critique de michfred


On ne sort pas indemne de cette grande fresque épique et intimiste à la fois,  de cette épopée générationnelle , déployée sur  trois générations d'israeliens (celle des pionniers, celle des guerriers et celle des mutilés), sur trois continents ( la vieille Europe en voie de nazification , le Proche Orient agité  par les multiples guerres consécutives à la création de l'État d'Israël et l'Amérique du Sud , ouverte à tous les possibles , y compris ceux de l'Utopie), et qui brasse,  à grands coups de dés,  le sort de deux familles israéliennes que rien ne destinait à se croiser...si ce n'est le destin !

Destin à deux visages : burlesque et fraternel,  sous les traits prosaïques et cocasses d'Alfredo,   "retrouveur"professionnel de disparus en terre Sud américaine ou destin  nettement plus énigmatique sous les traits de Jamali, joueur de badminton à ses heures  et violoneux devant l'Éternel,  si curieusement moderne et  intemporel qu'on se demande s'il n'a pas une longue, une très longue histoire derrière lui...

Voilà pour le cadre, comme on voit,  très largement ouvert dans l'espace, le temps.. .Le roman lui-même faisant le grand écart entre les genres littéraires: mythe, histoire personnelle et familiale ,  histoire d'Israël et du peuple juif. Tout se mêle.

Rien ne manque en effet :  suspense, histoire d'amour, saga familiale, histoire d'une (jeune) nation et d'un vieux peuple, interrogation philosophique sur la liberté et la responsabilité,  essai , hésitant  entre le pamphlet politique sans concession et la déclaration d'amour inconditonnel à un pays pas comme les autres, mythologie contemporaine  autour du Juif errant, essai sur l'utopie ( réservoir à idées ou régression sectaire et infantile... )

Voilà qui donne au récit des enjeux et une profondeur qui dépassent largement ceux des personnages.

Passionnant sur toute la ligne! Les quelque six cents pages se lisent sans souffler.

Pour l'intrigue , je me contenterai de quelques mots..

Inbar fuit Hannah sa mère, sabra intellectuelle,  remariée avec un allemand et installée à  Berlin. Elle fuit aussi la mort tragique par suicide sans doute de son frère adulé,  Yoavi, qui faisait son service militaire.

Dori recherche Mani Peleg, son père , veuf inconsolable et héros d'Israël, mais traumatisé par la guerre du 1972 Kippour..

Tous deux sont peu heureux en ménage, l'une est exaspérée qu'on lui reproche en permanence de ne pas vouloir d'enfant,  l''autre souffre d'un amour paternel anxieux et invasif.

Tous deux ont un aieul,  elle une grand'mère,  Lili, lui un grand père,  Fima, qui sont tombés amoureux sur le bateau qui les emmenait en Palestine, juste avant l'invasion de la Pologne ,

 Ils ignorent bien sûr ces étranges points communs.

Sans se connaître, tous deux se rencontrent en Amérique du Sud, (Équateur,  Pérou,et enfin cette  Argentine qui faillit être la terre promise de Théodore Herzl.) . Et entreprennent une quête commune. Sous la conduite de l'inénarrable Alfredo.

Dans les chambres d'hôtel où dort Inbar d'étranges dates et noms de villes, faits de la même main, semblent donner les étapes d'une longue errance spatio-temporelle qui recoupe les pas du fameux Juif errant, et les leurs, à elle et à  Dori.

Le Juif errant fera-t-il cesser l'errance de ces deux israéliens en quête d'eux-mêmes et d'une réponse que leur propre pays , secoué par des guerres et des conflits successifs, ne semble plus leur apporter ? 

Est il encore possible que peuples en conflit ou particuliers en détresse décident de faire un pas de côté et prennent "the road not taken"?

Magnifique roman qui secoue nos consciences de lecteur, ouvre grandes les portes du futur, sans dispenser de réponse. 

Tout est peut-être dans le fait de se poser la question.. .
 
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