FW Krüger était issu d'une famille de cadres militaires. Il a suivi la tradition familiale en entrant à l'école des cadets et en devenant officier. Très conscient de la catégorie sociale d'où il provenait, même si la Iere Guerre le fait douter franchement de la hiérarchie, le fait se qualifier de cochon des tranchées mais tout monde doit rester à sa place, il garde encore profondément ancrée l'idée de ses origines sociales. Sauf que ces dernières vont être passées sous les douches acides de la défaite, du Traité de Versailles, des crises économiques de 1923 et 1929 et de la rencontre avec le NSDAP. Ces acides vont produire une alchimie avec une psychologie et des positions politiques déjà bien orientées totalement mortifère. Mais attention Krüger ne devient pas hors sol. Non bien au contraire, le nazisme et les différents postes qu'il occupe à partir de son entrée au parti jusqu'à ses affectations sur les fronts de 1944 en passant par la conduite de la politique d'extermination des Juifs.ves de Pologne sont bien ancrés dans le sol, dans la terrible époque et dans le caractère, l'esprit et le dévouement de Krüger. Pas de remise en cause. Et le plus terrible : totalement fanatisé par l'idéologie mais pas de délire, une rationalité et un sens du réel de son époque. Abjecte.
En posant le contexte historique, en restituant les relations entre la hiérarchie nazie fréquentée par Krüger et en analysant finement les aspects militaires, politiques, socio-économiques, sociétaux et psychologiques de Krüger,
Nicolas Patin nous livre un portait saisissant d'un homme qui ne fut pas un simple exécutant, un fonctionnaire assis dans son bureau. Il nous livre un portrait exhaustif d'un homme somme toute ordinaire (d'où le titre) qui est parfaitement conscient de son environnement et qui aime les décorations et autres honneurs le confortant dans ses choix. Un homme qui a fait une guerre qui a duré 30 ans ! Depuis 1914 à 1944-45.
Pour se faire,
Nicolas Patin a été aidé par une documentation d'une préciosité pour un historien : une grande partie des volumes du journal intime de Krüger. Comme les historiens ont pu accéder au journal de Goebbels
Nicolas Patin a décortiqué celui de Krüger. Avec un fait de taille pour l'historien dans ce décorticage : alors que Goebbels souhaite profondément être publié et faire oeuvre d'histoire et de sciences politiques abandonnant progressivement les éléments privés dans son journal, Krüger n'aspire pas à l'édition du sien. du coup, il est certainement plus vrai et plus franc moins retravaillé et pensé que celui de Goebbels. Et ce point est important dans la compréhension du mécanisme d'un bourreau ordinaire qu'était Krüger et bien d'autres.
J'ai souvent du mal avec les biographies. Là je dois dire que j'ai été captée par cette vie horrible dans les actes, les pensées et les mesquineries mais aussi dans ce cliché du nazi bien élevé, bon Papa, bon mari. Il y a juste un point où j'ai été un peu perdue : les analyses psychologiques du portrait. Parfois un peu abstraites pour moi.