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Critique de ileana


ileana
22 septembre 2017
Une biographie dense et détaillée, pour lecteurs motivés ou pour universitaires. XXème siècle, âge des extrêmes, avait dit Hobsbawm. Idéologies et régimes extrêmes. Spectateur engagé de son temps, Raymond Aron a été particulièrement critique face aux idéologies.

Cette biographie très documentée pèche par un manque de vivacité. Austérité, égalité de ton, exigence d'objectivité. Cependant l'objectivité n'est pas toujours au rendez-vous - un exemple pour illustrer une excessive générosité : « Dans son activité et ses livres, Aron fut à partir de 1955 professeur avant tout, le plus talentueux et le plus prestigieux de la France de l'après-guerre. » p373

Revenons aux choses sérieuses : « L'évènement qui pesa de manière décisive sur la vie d'Aron fut évidemment sa brouille avec Jean-Paul Sartre » (p303), une brouille qui s'étale sur trois décennies.
Autre élément fondateur dans la bio d'Aron, le séjour en Allemagne de 1930 à 1933, années de l'ascension d'Hitler. Témoin de l'histoire, Aron avait 25 ans, il a bien ouvert les yeux, il a tendu l'oreille, désormais il était vacciné.
« Aron disposait de plusieurs longueurs d'avance dans la compréhension du siècle. Face à la vieille Sorbonne positiviste, qui n'avait que Kant et Comte à opposer à Hitler, il disposait d'une intelligence de la situation qui le poussa, parmi les premiers, à faire le choix de Londres. Face aux intellectuels de l'après-guerre, fascinés par Marx et le soviétisme, il disposait d'une réfutation complète et irrécusable des idéologies fondées sur le sens de l'histoire. » P 184

Beaucoup plus tard, en 1981, lorsque l'histoire a confirmé une partie des arguments formulés par Aron, deux jeunes essayistes lui consacrent un long entretien pour la télé. Un bref extrait de la présentation : « Pour notre génération, celle qui est née à la politique en mai 1968, la pensée de Raymond Aron a représenté une sorte de ‘pôle négatif'. Quand nous avons étudié à l'université, elle était cataloguée sous le label ‘réactionnaire'. Elle était moins entendue en tant que telle que perçue au travers d'un filtre idéologique. Bref, c'était intelligent, mais de droite ! » p 643, extrait du texte de J-L Missika et d'Wolton pour le dossier de presse du Spectateur engagé, Antenne 2, 1981. Justement, le livre le Spectateur engagé qui reprend ces entretiens reste une excellente alternative à la présente biographie : c'est bref, vivant et complet, il permet de comprendre la trajectoire et les engagements de Raymond Aron.

Un mot de Max Gallo, dans une lettre à Aron de 1980 : « Mais je m'interrogeais. Faut-il donc que notre besoin d'irresponsabilité et d'irrationalité soit grand pour que Sartre – au-delà de ses immenses talents et de son génie – ait suscité une telle fascination ? le discours responsable et raisonnable, cette austérité font-ils à ce point peur ? » p640.
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