Citations sur Les enquêtes de l'inspecteur Sweeney : Meurtre au dix-h.. (10)
Le commissaire dévisagea son nouvel inspecteur. Dire qu'il s'apprêtait à confier une affaire de cette importance à un débutant, à ce? à ce? Mince, songea Wilkinson, il ne ressemble à rien le jeunot !En effet, le problème avec Sweeney, c'est que l'on ne pouvait rien en dire. À cause de cette? À cause de sa? En fait, Sweeney n'était qu'une barbe. Une barbe rousse, courte, mal peignée, mal taillée, mal foutue vraiment, qui éclipsait tout le restant de son apparence. Parce que Wilkinson avait beau chercher? Non, décidément, à part cet insupportable collier de barbe rousse?De taille moyenne, Sweeney ne se distinguait par aucun signe particulier. Il ne portait pas de lunettes. Les traits de son visage étaient définitivement anéantis par l'omniprésence de cette auréole pileuse qui lui enflammait joues et menton ; ses yeux, noirs et minuscules, y apparaissaient comme immobiles, inexpressifs, tout juste ouverts-un-point-c'est-tout. Quant à ses vêtements? bah ! Un tee-shirt de couleur sombre, qui n'avait jamais croisé la route d'un fer à repasser, un pantalon de toile grise, qui ignorait les plis les plus élémentaires, et des chaussures brunes et tristes, semblables à celles d'un pasteur anglican. Un désastre ! La silhouette de Sweeney paraissait n'avoir pour seule finalité que de lui servir à déplacer son horripilante barbe rousse d'un point à un autre.Étonnant pour un jeune homme, se dit encore Wilkinson. Une vraie dégaine d'étudiant attardé. Mais bon, il faudra s'y faire ; la nouvelle génération sans doute? se persuada finalement le commissaire.
Si Wilkinson s'était jusqu'à présent distinguer par son côté rasoir, Sweeney sentit qu'il n'allait pas tarder à en découvrir une face beaucoup plus tranchante.
S'aidant de son sand wedge comme d'une canne, Sweeney dégagea ses jambes de sous la table verte. Puis il quitta le chapiteau blanc tout en sifflotant une sorte de gigue improvisée.
Quel drôle d'oiseau celui-là ! Jugea McDermott, derrière la vitre opaque de ses lunettes. Décidément, il ne ressemble à rien...
Intérieurement, Sweeney jubilait. Sans que son interlocuteur ne s'en doute, grâce au stratagème du dictaphone, il venait de réussir à prendre le contrôle de l'entretien.
L'inspecteur décolla son corps d'Ecossais pâlichon de ses draps trempés de sueur. Puis, à la recherche d'une improbable fraicheur, il se dirigea vers la salle de bains de sa chambre de motel.
Sweeney avait passé la nuit précédente à Aberdeen, chez tante Midge. Il était allé lui confier Berthie, son teckel à pedigree, en prévision de son départ imminent pour les Etats-Unis.
- Et où est-ce que je vais ?
- Ah oui, c'est vrai. vous êtes sûrement déjà allé aux Etats-Unis ?
- Ben... non, jamais.
- Mais vous n'en loupez pas une vous, décidément... Etat de Géorgie, Augusta, vous voyez où ça se situe ?
- ...
- Sweeney, rappelez-moi de vous offrir un atlas pour votre anniversaire...
La silhouette de Sweeney paraissait n’avoir pour seule finalité que de lui servir à déplacer son horripilante barbe rousse d’un point à un autre.
L'aube irlandaise s'éveillait assaillie par la tempête. L'océan furieux se précipitait en hurlant, recouvrant les côtes de granit sous sa robe écumeuse.
En effet, le problème avec Sweeney, c’est que l’on ne pouvait rien en dire. À cause de cette… À cause de sa… En fait, Sweeney n’était qu’une barbe. Une barbe rousse, courte, mal peignée, mal taillée, mal foutue vraiment, qui éclipsait tout le restant de son apparence. Parce que Wilkinson avait beau chercher… Non, décidément, à part cet insupportable collier de barbe rousse…