Pour entreprendre une guerre, il suffit de se sentir agressé. La tragédie devient inéluctable pour qui refuse de payer sa dette envers les autres.
Je regrettais ma bibliothèque et le confort que les livres procurent. Sur les étagères de mon cabinet de travail, en secouant la poussière qui les recouvre, j'aurais déniché le volume dont le contenu m'aurais permis de m'évader.
Travailler , afin de pouvoir exister, cette équation là, personne n'a pu la remplacer par une autre.
Les pieds montent et tanguent dans l’espace …
Les pieds montent et tanguent dans l’espace — qui s’en trouve poli —, atterrissent et, de nouveau, rebondissent. Rien de violent, rien que de la souplesse. L’eau, l’air et le vent sont leur royaume. La sécheresse du sol ne trouble pas la vision que je m’en fais : ces pieds sont vraiment miraculeux, leur détente est un bonheur que tout fétichiste se doit d’adorer. Moi qui cours après le mirage, quelle impression de bien-être, quelle récompense ! D’infimes frémissements me transmettent le rythme de ces pieds, et c’est l’extase à chaque pas !
La distance se creuse entre nous. Dans le soleil progressent Alice et Harlem ; elles sont arrivées au bout de la pente débouchant sur la courbure de la route, prochaine amorce d’une ligne droite jusqu’à l’horizon. On sent que leurs jambes esquissent un virage. C’est d’un même élan que leurs pieds vont et viennent, cadence quelque peu lassante et, cependant, assez véloce pour suggérer des variations que seul pourrait rendre visible un ralenti de cinéma.
///Actes Sud/Février, 2001
Nous avons longé le convoi. Loin en arrière suivaient les BM13, ces armes absolues dont les soviétiques avaient doté les Forces armées tchadiennes, plus communément dénommées FAT. Il y a plus d’un an de cela, les Libyens-eux aussi équipés par les soviétiques-, à Faya-Largeau, avec les BM16, avaient écrasé plusieurs centaines de nos soldats.
Comme tous les habitants du village, j’avais le culte de l’effort. La pêche à la claie consiste à construire un enclos permettant de surprendre les poissons dans leurs « nids » : ceux-ci étaient aménagés par mon oncle de trois à cinq semaines avant la pêche inaugurale. Cette forme de pêche exigeait des branches de mimosas, la mise en place de lits aux cailloux triés sur volet et le dépôt – un acte à la fois magique et savant – des appâts.
Là-bas, le pont enjambait le fleuve comme pour retarder un adieu pas tout à fait consommé.