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Critique de colimasson


Pour les provinciaux, Paris résonne déjà comme l'objet d'un mythe. On imagine donc l'émoi que peut susciter cette ville pour un japonais. J.P. Nishi en témoigne. Jeune mangaka japonais, il a décidé de venir se perdre une année dans la capitale française. A nous deux, Paris ! est le récit dessiné qu'il tire de cette expérience.


Réalisé a posteriori, alors que le dessinateur a déjà écoulé son année en France et qu'il a fait son retour au Japon, cet album bénéficie d'un sens de la condensation qui lui permet d'aborder un grand nombre de thèmes et de n'en garder que les plus marquants. La somme des particularités relevées par J.P. Nishi restant encore très dense, malgré cette distance, on imagine le fouillis dans lequel aurait pu se perdre le récit s'il avait été réalisé au jour le jour.


En vrac, J.P. Nishi raconte son premier ballet, sa découverte des lieux de restauration français, le métro, les mendiants, les habitations sous le toit, les soirées, les débats culturels, les librairies et autres lieux de la vie parisienne. le véritable intérêt des descriptions surgit lorsque J.P. Nishi, bien conscient du cosmopolitisme de la population parisienne, s'amuse à comparer les moeurs françaises et les moeurs japonaises mais aussi, plus largement, les degrés d'intégration des différentes populations et les interactions qu'elles entretiennent entre elles.


On s'amuse à voir la stupéfaction du dessinateur lorsqu'il découvre la galanterie, les décolletés, les bretelles de soutien-gorge, ou lorsqu'il s'initie au rituel du baiser, relevant cette difficulté majeure du bruit de bouche qui l'accompagne et calculant le nombre de bises qu'il est nécessaire de faire au cours d'une soirée où sont présentes huit personnes.


On partage avec lui ses difficultés d'adaptation à la compréhension d'une langue parfois abstraite et à la prononciation souvent erronée (on ne dit pas « wasabi » mais « wassabi »), ou au déchiffrage de lettres et de chiffres auxquels il n'est pas habitué.
On partage sa fierté lorsqu'il découvre le succès des « Japan Expo », des mangas en librairie, des restaurants japonais ou de la nourriture locale. Etre japonais peut procurer un avantage indéniable dans le domaine de la drague, mais il faut en contrepartie consentir aux raccourcis fréquents entre chinois et japonais et garder la tête froide devant les provocations racistes.


J.P. Nishi ne découvre pas seulement Paris ; il découvre également une population bigarrée venue des quatre coins du monde. Il s'initie aux dreads après avoir rencontré un de ses voisins originaires du Congo ; il fait la connaissance du propriétaire turc de son kebab préféré ; il travaille avec un musulman ; il partage la passion des femmes noires pour leurs cheveux. Quelques difficultés découlent de cette situation : lorsque coréens, japonais et chinois cohabitent à part égale sur le territoire parisien, comment parvenir à les identifier sans se tromper ?


« J'ai décidé de faire une étude pour différencier les asiatiques de Paris. La nuque des japonais est différente de celle des chinois. Les cheveux souples un peu féminins, c'est une particularité des jeunes japonais. Les teints en blond, c'est généralement des coréens. Ceux avec des chaussures de marque inconnue, c'est des chinois. Les japonaises ont des gestes enfantins. La démarche des japonaises est bizarre. Immédiatement repérable. le ton de voix est pointu : « Kawaiiii »…. »


J.P. Nishi s'amuse beaucoup de ces découvertes parisiennes et s'exalte à découvrir sa diversité des cultures et des populations. Après avoir passé un an dans la capitale, on imagine qu'il a eu le temps de cerner ce qui plaisait le plus aux français dans les mangas, et il use habilement de cet avantage en parsemant son récit de petites touches de folie et de digressions typiques. Pour le reste, le dessinateur a fourni un travail relevé d'observations qui ne sont pas caricaturales, malgré ce qu'on aurait pu craindre. de Paris ou de J.P. Nishi, on ne sait pas vraiment qui a vaincu l'autre.


Lien : http://colimasson.over-blog...
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