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Sean Phillips (Illustrateur)
EAN : 9781401268145
256 pages
Vertigo (07/02/2017)
5/5   1 notes
Résumé :
He died as a child, decades before his time, and spent the next 30 years in Hell thanks to a mix-up in the afterlife’s bureaucracy. Then a miracle occurred, and the Kid escaped perdition for Earth. His mission: become the new Messiah. His gift: the ability to summon any human, god or devil who ever existed—or who anyone once believed existed—with the cry of a single word…

“ETERNITY!”

Redeeming humanity, however, is trickier than it seem... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Ce tome regroupe les premiers épisodes d'une série qui fait suite à Kid Eternity (1991) de Grant Morrison & Duncan Fegredo. Il comprend les épisodes 1 à 9, initialement parus en 1993/1993, écrits par Ann Nocenti, dessinés et encrés par Sean Phillips (à l'exception de l'épisode 7 dessiné et encré par Sean Scoffield), avec une mise en couleurs réalisée par Daniel Vozzo. Il comprend également l'histoire courte (8 pages) parue dans Vertigo Jam 1 (1993) également écrite par Ann Nocenti, dessinée par Duncan Fegredo et encrée par Sean Phillips.

Kid Eternity était un jeune garçon qui est mort avant son temps, du fait d'une erreur administrative dans la gestion des décès par les entités en charge de la gestion de l'au-delà. Il a passé 30 ans en Enfer avant de pouvoir revenir sur Terre dans un corps d'adulte. Willie Dodge est en train de jouer un air sur une guitare, pour ses 2 compagnons SDF autour d'un brasier improvisé dans un fût métallique. Kid Eternity est en train faire un cauchemar, dans lequel il se retrouve face à Keeper (l'individu sensé lui servir de mentor), puis à lui-même enfant juste avant qu'il ne meurt et ce garçon qu'il a été lui tire dessus. Il se réveille avec une blessure au torse. Val Hoffman et Jerry Sullivan sont en train de monter dans la cage d'escalier pour rejoindre l'appartement de Kid Eternity. le révérend Murphy pelote les fesses de la soeur présente dans l'église mais elle le repousse sèchement. Kid Eternity s'assoit dans le confessionnal pour évoquer sa mission avec le révérend Murphy.

À la sortie de l'église, Kid Eternity décide qu'il a besoin d'un guide spirituel et il fait apparaître Helena Petrovna Blavatsky (1831-1891, une des fondatrices de la Société théosophique) pour l'aider. Dans l'Olympe, Aphrodite, Athena, Zeus, Mercure discutent de la mission de Kid Eternity sur Terre : éveiller la conscience humaine. Pendant ce temps-là, il s'est rendu chez Hemlock (une pirate informaticienne) pour l'inciter à concevoir et à enfanter un ange. Plus loin Cupidon a décoché ses flèches sur Val Hoffman et Jerry Sullivan, mais à son insu elles ont été remplacées par des flèches de haine. Dans les limbes, Judas Iscariote prend une coupe avec Beelzebub. Un peu plus tard, Kid Eternity emmène Hemlock dans l'appartement du premier individu susceptible de procréer avec elle pour concevoir un ange, mais il est mort. À la place, ils font connaissance avec Charlie Flood, surnommé Dog.

Cette rapide introduction ne couvre même pas l'ensemble des événements du premier épisode. Il est possible de continuer comme ça, et d'évoquer les principales aventures de Kid Eternity. Il bénéficie d'une séance de psychanalyse conduite conjointement par Sigmund Freud et par Carl Gustav Young. Puis il se fait draguer par Hera, il se rend à Krumville pour déguster la meilleure tarte à la myrtille. Il passe à la télévision en ressuscitant Marylin Monroe, puis il séjourne dans un asile psychiatrique haut de gamme. Autant tous ces événements surviennent bien au cours de ces 9 épisodes, autant ils ne reflètent en rien l'expérience de lecture que constitue cette première moitié de la série. le lecteur rencontre des personnages incroyables, comme ce cafard et son fils qui s'interrogent sur le fait que le chemin qui mène au Paradis est soumis à des effluves immondes. Il écoute une conscience extraterrestre logée dans un champignon psilocybe, attendant d'être ingérée par un être humain qu'elle pourra illuminer. Il regarde le Kid ressusciter des personnages historiques aussi célèbres que Sigmund Freud, ou plus confidentiels comme Neal Cassady (1926-1968, le compagnon de route de Jack Kerouac). Il suit des fils narratifs qui disparaissent sans prévenir, au profit d'autres sans rapport, tout en découvrant des flux de pensée dissertant sur des sujets hétéroclites.

Il suffit de prendre un épisode en exemple pour se faire une idée de cette narration riche et exigeante, non-conformiste. Sara et Fetish (2 démones mineures) sont en train de papoter, allongées nues sur une couverture dans un endroit sans caractéristique. Fetish explique qu'elle est tombée amoureuse. Les dessins de Sean Phillips semblent un peu grossiers, avec des traits de contours râpeux, comme s'ils n'avaient pas été peaufinés. Il représente la nudité frontale, sans qu'elle ne suscite de réaction érotique. Il représente les perles dans les cheveux de Fetish, comme des points jaunes dans sa chevelure noire, presque lumineuses. Fetish discute du fait qu'elle peut faire souffrir Kid Eternity grâce à son charme et sa séduction, tout en se demandant si elle ne va pas prendre sur elle de ne pas le faire, pour éviter de lui causer de la peine. Elle laisse tomber une carte sur laquelle est dessinée une main, indiquant que quand sa chute sera achevée et qu'elle touchera le sol, tout sera terminé. Dans la mesure où la page suivante passe à la lecture d'un livre par d'autres personnages, le lecteur se dit qu'il s'agissait d'un prologue sibyllin à dessein. Il retient ce jeu de séduction par une femme consciente de son pouvoir sur les hommes.

La page suivante propose des visuels qui semblent accolés les uns aux autres, des couvertures de livre, avec leur titre, et une main qui en feuillette un. À nouveau, il semble qu'il s'agit de dessins rapidement dégrossis à l'encre, avec une composition de page qui ne fait sens qu'à la lecture du dialogue, apposé sous forme de ballons, car les personnes qui parlent ne sont pas représentées sur la page. Il est question de tentation, de pêché et de fluctuation du caractère entre vanité et humilité. La discussion se poursuit sur la page suivante et le lecteur découvre qu'il s'agit de la suite de la psychanalyse conduite par Freud et Young sur Kid Eternity, opposant leurs 2 points de vue, l'un sur le refoulé sexuel, l'autre sur les mythes éternels de l'humanité. Kid Eternity regarde un couteau suisse évoluer dans le ciel, comme un oiseau. Sean Phillips réussit à rendre cette séquence visuellement intéressante, et concrète, alors même que la scénariste procède rapproche psychanalyse et poésie basée sur des associations.

La scène change encore pour montrer Val Hoffman et Jerry Sullivan au lit, vêtus de pyjamas en train de regarder la télévision. Val explique que les objets technologiques (le téléphone) sont en train d'acquérir une conscience et d'agir selon leur propre volonté, refusant de se conformer aux diktats des êtres humains. le lecteur a à peine le temps d'apprécier ce retournement de l'ordre naturel, sur la base dessins vaguement descriptifs, qu'il tombe sur une page où les 3 Parques commentent la situation de ce couple, et le fait que les actions de Kid Eternity font sauter des coutures de leur ouvrage. Page suivante, ce dernier découvre Fetish qui se fait appeler Ghetto Girl qui lui explique que dans la mesure où il a pensé un instant à une relation charnelle avec elle, c'est comme s'il l'avait fait. La page suivante, Athéna tance vertement Héra et Aphrodite qui sont en train de s'amuser en observant Kid Eternity. Phillips compose une page avec 4 images distinctes qui ne sont pas séparées par des bordures. Puis la narration passe aux 4 vagabonds autour de leur brasero dans un fût métallique.

Est-ce vraiment aussi décousu que ça ? Non car il est possible de suivre le fil d'une intrigue qui court d'épisode en épisode. Kid Eternity va jusqu'au bout de son idée d'aider à la conception et à l'enfantement d'un ange issu de l'accouplement de 2 êtres humains, puis essaye d'autres méthodes pour accomplir sa mission d'éveil de la conscience de l'humanité. Oui, c'est vraiment décousu parce que la narration d'Ann Nocenti développe des idées comme elles apparaissent dans le fil narratif, pour passer à tout autre chose à la page suivante. Oui aussi, parce que certains fils narratifs disparaissent sans sembler avoir abouti à une conclusion d'une forme ou d'une autre. Passé mi-parcours, les dieux de l'olympe n'apparaissent plus par la suite, sans raison visible. Finalement Zeus aura-t-il eu le dessus sur Héra ? Mystère, et cela ne préoccupe strictement personne. Autour de l'intrigue principale relative aux tentatives d'éveil de la conscience des êtres humains, Ann Nocenti évoque de thèmes hétéroclites : la création d'une réalité virtuelle du simple fait de l'existence des ordinateurs, la multiplicité des interprétations cumulatives de la vie intérieure par le biais de 2 écoles de pensée psychanalytiques, le cumul des souffrances des êtres humains, l'interprétation de la réalité par les yeux d'un cafard, l'exil et l'anonymat de plus en plus marqués des individus qui choisissent d'aller habiter en dehors des métropoles en s'en éloignant progressivement, l'impossibilité de penser sa vie d'une autre manière qu'égocentrée, l'abrutissement produit par la télévision, mais aussi la manière dont il est possible de s'en rendre maître, les traumatismes de l'enfance qui forment la personnalité, l'absence de causalité dans la vie d'un individu, etc. Elle procède à a fois de manière thématique et par associations libres, proposant à chaque fois un point de vue personnel qui va plus loin que les simples lieux communs.

Pour une telle démarche narrative, une simple mise en images descriptives aurait été inadaptée et frustrante. Sean Phillips n'a d'autre choix que de se montrer aussi inventif qu'Ann Nocenti, tout en réalisant des images concrètes permettant de fournir un ancrage aux envolées poétiques de la scénariste. Dès les pages 4 & 5 du premier épisode, le lecteur constate qu'il regarde des silhouettes de Kid Eternity en train de flotter sur un fond rouge. Il est saisi par son habit blanc immaculé, sans aucune marque ou pli. C'est à la fois un costume distinctif, mais aussi une absence, un vide aussi absolu que stérile. La mise en page correspond à un rêve dans lequel le personnage se voit flotter d'un état à l'autre. Lors de la séquence en Olympe, l'artiste représente les dieux grecs drapés dans leur toge, avec des images accolées sans bordure de case, comme disposées sur des nuages. le lecteur en déduit qu'il s'agit d'une vue de l'esprit, d'une métaphore d'une vie spirituelle et que la représentation n'est pas à prendre au premier degré. Lorsque la narration repose essentiellement sur des cartouches de flux de pensée, Sean Phillips peut passer à un dessin en pleine page, comme un tableau illustrant le propos. Il peut aussi découper un dessin en pleine page, en plusieurs cases, pour figurer une succession temporelle en passant spatialement d'une case à l'autre.

Dans l'épisode 6, le lecteur observe une disposition étrange : la bande de chaque haut de page est composée du bas de cases tronqués de la page précédente, et le bas de page est composé des hauts de cases tronqués de la page suivante. Cette disposition traduit le flux continu débité par l'écran de télévision, comme pour gommer la discontinuité introduite en passant d'une page à une autre. Lorsque les personnages se retrouvent dans un environnement réel, Sean Phillips utilise des photographies dont le contraste a été poussé à fond pour épaissir les noirs. Dans l'épisode 6, lors de l'apparition de Marylin Monroe, il réalise une page composée de 12 cases identiques de la tête de Marylin, évoquant les sérigraphies d'Andy Warhol. Quand Cristabel distribue ses dessins aux autres occupants de l'asile psychiatrique, le lecteur voit des dessins d'enfant, en cohérence avec les capacités graphiques de Cristabel.

Cette première partie des aventures de Kid Eternity déstabilise complètement le lecteur. Il se souvient qu'Ann Nocenti a expliqué à plusieurs reprises qu'elle imagine ses scénarios à partir d'un concept qu'elle développe ensuite sous la forme d'une histoire. Il découvre un récit de prime abord décousu, sautant du coq à l'âne avec des dessins un peu frustes. Au fur et mesure qu'il progresse, il a l'impression que la scénariste oublie ses fils narratifs d'une séquence à l'autre, et que le dessinateur perd pied une séquence sur deux. Il lui faut un peu de concentration, mais aussi de souplesse, pour lâcher un peu prise et apprécier ce qui s'apparente à une discussion à bâton rompu, intelligente et poétique, avec une mise en images inventive, sur la base d'un dosage délicat entre visuels concrets pour ancrer la narration, et visuels métaphoriques pour laisser la narration prendre son envol. 3 étoiles pour un lecteur venu chercher un récit traditionnel, 4 étoiles pour un lecteur ne pouvant se départir d'un point de vue cartésien. 5 étoiles pour un lecteur prêt à papoter avec des créateurs cultivés et non conventionnels. Finalement les errements de l'intrigue et de la pensée de Kid Eternity sont ceux des auteurs qui sondent les archétypes sociaux, les évidences psychologiques, l'irrationalité de la réalité, l'absurde de la condition humaine et la nécessité d'essayer quand même.
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