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EAN : 9782234063396
150 pages
Stock (09/09/2009)
3.27/5   20 notes
Résumé :

Depuis toujours, HEC s'enorgueillit de former des as de la finance et des champions du marketing. Or, la faillite économique actuelle ne découle-t-elle pas pour une large part du triomphe de cet hyper-capitalisme que les diplômés de cette institution ont justement appris à mettre en oeuvre et à servir ?

Il ne s'agit pas, dans ce livre, de stigmatiser une école, mais d'interroger l'esprit des grandes écoles de gestion et de management : l'... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
J'admire le courage de Florence Noiville, qui n'a pas peur d'admettre qu'elle se soit trompée en s'inscrivant à la HEC, l'École des Hautes études commerciales de Paris, à Jouy-en-Josas à 10 km de Versailles. À considérer ses talents littéraires, on peut effectivement se poser la question : mais que faisait-elle donc dans cette galère ? Car ne nous faisons guère d'illusions, celles et ceux qui entrent à HEC et autres hauts instituts commerciaux, n'ont qu'une seule ambition : gagner le plus possible de fric dans un minimum de temps. Ce genre d'institut n'a lui-même qu'une seule vocation : la formation de futurs hauts cadres dans les banques (de préférence les banques d'affaires et d'investissement) et des grosses entreprises, selon le credo du libéralisme économique pur (ou devrais-je dire à outrance) de maximalisation des profits, sans beaucoup d'égards pour l'environnement, la santé publique et la justice sociale. Je n'ai rien contre ces instituts, ils sont indispensables pour former une élite, ce que je leur reproche c'est justement de ne pas être suffisamment ouverts aux réalités et problèmes fondamentaux de notre époque.

Le petit livre de Florence Noiville "J'ai fait HEC et je m'en excuse", analyse en peu de pages (89) de façon pertinente les maux de ce genre d'instituts. Elle met en exergue qu'ils n'ont virtuellement rien appris de la dernière crise économique de 2008-2009, provoquée par ces hauts cadres de banques et leurs constructions débiles, comme les "junk bonds", pour stimuler des larges crédits sans garanties. En 1929, le Krach de Wall Street avait pourtant déjà démontré que cette bulle artificielle pouvait exploser avec tous les malheurs que nous connaissons par la lecture d'entre autres le chef-d'oeuvre de John Steinbeck "Les Raisins de la colère". La dernière crise économique mondiale, intervenue sous la présidence de ce génie de fiston Busch, n'a eu pratiquement aucun écho dans les programmes de ces écoles de formation de nos futures élites. Pour eux apparemment "l'éthique c'est du pipeau !" Ainsi, "le cours d'éthique des affaires n'est pas obligatoire...(et) le cours sur le commerce équitable a été annulé... faute de participants."

L'auteure a parfaitement bien résumé la réalité de ces écoles par l'abréviation MMPRDC "Make More Profit, the Rest we Don't Care" ou : Faites plus de bénéfices, du reste on s'en fout ! Les femmes et hommes diplômés de ces écoles sont quasiment conditionnés par cette idée fixe de maximalisation des profits. Cela devient un sérieux problème quand elles ou ils entrent en politique. C'est le cas de l'actuel ministre des finances de la Belgique, qui souffre d'une fixation de l'École de Chicago - encore pire que HEC - et des théories de l'ultralibéraliste Milton Friedman (1912-2006). Dans une réaction à un article paru dans un magazine flamand, j'ai écrit qu'il est le pire ministre des finances que le royaume a eu depuis à peu près 1831 (la Belgique date de 1830). Qu'il appartient au parti de la droite flamande de Bart de Wever n'est bien sûr pas un hasard.

Florence Noiville a été conséquente avec elle-même, lorsqu'elle a réalisé ce que ces techniques de MMPRDC apprises, peuvent être néfastes, elle a abandonné une carrière à haut salaire - et une perte de revenus importante - pour se recycler dans le littéraire avec succès. Elle est l'auteure d'une excellente biographie du Nobel, Isaac Bashevis Singer (2003), de "So British !: 23 visages d'écrivains d'Outre-Manche" (2013) ; de 3 romans : "La Donation" (2007), "L'Attachement (2012) et "L'illusion délirante d'être aimée' (2015) plus 8 livres pour la jeunesse. Entrée à 33 ans au "Monde des livres", elle y est aujourd'hui responsable de littérature étrangère.
Son mari, Martin Hirsch, est directeur général de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris et l'auteur de "La pauvreté en héritage : Deux millions d'enfants pauvres en France", paru en 2006.

Elle n'est, par ailleurs, pas un cas isolé et dans son livre elle cite de sa promotion d'autres recyclés : un qui est devenu jésuite, un autre musicien et une psychanalyste.
J'ai été ravi d'apprendre un peu plus sur Muhammad Yunus (°1940 à Chittagong au Bangladesh actuel), fondateur de la Grameen (= village) Bank, la première banque de microcrédits, le père du "social business" et prix Nobel de la Paix, en 2006. le "banquier des pauvres" a commencé sa carrière en prêtant 27 dollars, de sa poche, à un compatriote pour monter un petit commerce. Il est l'auteur de "Vers un nouveau capitalisme" (2008) et de "Pour une économie plus humaine" (2012). Des ouvrages que devraient lire Dump-Trump et son entourage de conseillers et ministres millionnaires.

En conclusion, je suis pessimiste sur un véritable changement de mentalité dans ces super écoles. Aussi longtemps que pour un tel institut le "ranking" (classement), publié chaque année dans le "Financial Times", est considéré comme absolument primordial et que l'un des critères de ce classement est basé sur les rémunérations des anciens élèves, ce n'est pas demain qu'on sortira de l'auberge. Les modifications intervenues dans ces écoles depuis la dernière crise mondiale - qu'elles n'ont pas vue venir du tout - sont, malheureusement, plutôt "cosmétiques" : on ajoute des cours (le plus souvent facultatifs d' ailleurs), comme par exemple "Entreprise et pauvreté", "l'altermanagement" ou "social business", qui sont suivis par une minorité infime d'élèves. Ces jeunes qui préfèrent aller travailler à la City de Londres ou pour la banque Morgan Stanley à Manhattan, New York, au lieu de Médecins sans frontières, pour des raisons évidentes de sous.

Il y a de l'amère ironie, si l'on pense que HEC est incapable d'appliquer sa propre (ancienne) devise : "Apprendre à oser" !
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« FLUCTUAT HEC MERGITUR », MAIS LA DERIVE POSE PROBLEME
(« Fluctuat nec mergitur : battu par les flot mais ne coule pas »)

Quand j'ai entamé cet essai de 2009, il m'est immédiatement venu à l'esprit le livre de 2010 de Zoé SHEPARD « Absolument dé-bor-dée ! ou le paradoxe du fonctionnaire ».
Initialement, j'avais choisi ce titre, qui est l'antithèse de ce que prône HEC, pour commenter le livre de Florence NOIVILLE.

Puis, la locution latine s'est imposée ; malgré la tempête économique, le navire qui a contribué à la créer ne coule et ne coulera pas, mais sa dérive « dérive »…

Très rafraîchissant ce petit bouquin de 109 pages !

En cette période de concours aux « Grandes Ecoles de Commerce », sa lecture pose bien la problématique rencontrée :
• la finalité d'HEC, ESSEC, ESCP et consorts est de « produire » un méta-produit standardisé (les diplômés) correspondant à la demande du marché (de l'emploi)
• jusque là tout va bien - le filtre de l'école fonctionne bien et le marché est approvisionné
• soudain, le marché se modifie radicalement – les méta-produits standardisés jusque-là livrés ont conduit à une impasse et à la crise de 2008
• que font les opérateurs de l'Offre (ces mêmes écoles) ? – comment font-ils évoluer leurs gammes ? leurs offres ? comment s'adaptent-t-ils aux nouvelles conditions du « marché impasse » ?
• ils recouvrent d'un vernis transparent appelé « éthique » l'offre ancienne en jeunes diplômés et c'est tout ! – du bête marketing de lessivier destiné à la ménagère de 50 ans !
• et pourtant, «Adaptation de l'Offre », « Différenciation », « Innovation », « Réactivité », « Business models » et autres « globish » sont l'essence même de cette école…
• Cherchez l'erreur. DARWIN et son « s'adapter ou périr » adorerait.

En fait, Florence NOIVILLE a bien compris les limites du système ; comme probablement bien d'autres condisciples ; mais à la différence des autres, elle a le courage de le dire, de l'écrire ; tout comme Zoé SHEPARD qui ose critiquer les dérives de l'administration. le changement par les femmes…

L'écriture est directe, simple, sans envolées lyriques – un bon style journalistique.
Tout y passe :
• tout d'abord l'attrait légitime pour HEC, avec l'image associée
• puis la découverte du cynisme : priorité au leitmotif « MMPDRDC » (Make More Profit, the Rest we Dont Care about)
• les premières interrogations : « tu vois à HEC, j'ai davantage appris à briller dans l'instant qu'à construire sur le long terme »
• ensuite la révélation : « de 1980 à 2005, l'écart des rémunérations aux USA est passé de 1 à 40 à 1 à 411... avec pour conséquence de voir les 300 000 américains du haut de l'échelle gagner autant que 150 million d'américains se trouvant en bas »
• les premières analyses : « chacun… plaide pour une réhabilitation des « humanités », philosophie, psychologie et sciences humaines, histoire économique, éthique… » - « on nous encourage peu à penser hors du cadre » (NB : ce qui est normal pour de futurs cadres...)
• les premières concessions : « chacun se bricole un sens comme il peut, mais sans trop le dire… on en distingue les dysfonctionnements mais c'est sans doute le moins mauvais » - « coupable mais pas responsable »…
• le premier fatalisme : « « seule Mme le proviseur du lycée Janson-de-Sailly s'étonne : avec ce qui se passe (la crise de 2008) je pensais que la demande pour les prépas HEC serait moins forte mais pas du tout » - « l'éthique, c'est du pipeau »
• enfin l'ironie : « en histoire de l'économie, nos professeurs insistent beaucoup sur l'idée de Confucius. Celle qui montre qu'en général l'expérience est « comme une lanterne qu'on porte sur le dos » : elle n'éclaire que le chemin parcouru ».

En fait HEC et autres écoles mondiales de ce type, constituent des bulles, hors réalité, qui ultérieurement vont créer d'autres bulles, cette fois bien plus dangereuses pour nous tous.

Conclusion : Oui, le système des « Grandes Ecoles » est « Absolument dé-bor-dé ! » car effectivement les HEC participent au premier chef à la construction de notre société - à sa façon ce document confirme, si besoin était, le caractère suicidaire de notre espèce biologique – Fluctuat hec mergitur : certes, le bateau ne coule pas mais la « dérive » pose problème …

P@comeux - 2014/05 ©
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Plaidoyer d'une ex de HEC qui fait son mea-culpa sur les enseignements des écoles de commerce suite à la crise financière. le désenchantement mais aussi la prise de conscience qui tarde à venir dans ces institutions.
Instructif.
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Un témoignage très pertinent qui remet en question tout le système de formation de nos "élites" à la lumière de la propre expérience de l'auteur. Une réflexion sur les lois économiques qui nous régissent en système capitaliste, sur la raison d'être des grandes entreprises dans nos sociétés, et sur ce que doit être une véritable formation des cadres dirigeants -qui devrait inclure un aspect éthique- .
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
"Depuis sept ou huit ans, il ya une grande appétence chez les étudiants pour l'humanitaire.
Sauf que leur cerveau gauche livre bataille à leur cerveau droit.
Jusqu'au krach, lorsqu'ils devaient finalement choisir entre Médecins sans frontières et Morgan Stanley, ils n'hésitaient pas une seconde et fonçaient chez Morgan Stanley.
- Ah, tu vois dis-je triomhante. ça, ça va changer ?
- Oui, me répond-il... Il n'y a plus de place chez Morgan Stanley !" (p.103)
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"Une fois par an à San Diego, il y a un marché des profs.
Un bon prof de finance, même jeune, se recrute aujourd'hui autour de 150 à 200 000 euros.
On le recrute pour ne surtout pas enseigner, mais pour faire de la recherche et publier des articles dans des revues qui feront gagner des places à HEC dans les classements - tout en croisant les doigts pour qu'entretemps il ne soit pas débauché par une autre business school qui le paiera encore mieux !" (p101)
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"Pourquoi des études si sélectives conduisent-elles à un monde de "golden panurges" où des moutons bardés de diplômes, suivant des bergers anonymes, sont capables de se précipiter d'un même élan dans les ravins des crises les plus profondes ?
Et pourquoi continue-t-on de croire que ces troupeaux sont l'emblème de l'esprit d'entreprise, de la témérité et de la réussite ?" (p.107)
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Souvent, ce sont des individus instruits, altruistes et sympathiques qui sont ainsi payés pour détruire des emplois et vendre du vent. La plupart ne croient pas eux-mêmes vraiment à la nécessité de le faire, ils pensent qu'ils n'ont pas de véritable choix. (…)
Comment l'éducation la plus haute peut-elle empêcher à ce point de se sentir maître de son destin ? Pourquoi des études si sélectives conduisent-elles à un monde de « golden panurges » où des moutons bardés de diplômes, suivant des bergers anonymes, sont capables de se précipiter d'un même élan dans les ravins des crises les plus profondes ? Et pourquoi continue-t-on de croire que ces troupeaux sont l'emblème de l'esprit d'entreprise, de la témérité et de la réussite ?
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"La fois suivante, le même type a répété: "How can we make more profit ?"
J'ai gardé cette phrase en tête, elle résumait parfaitement le système, le système MMPRDC, Make More Profit, the Rest we Don't Care about"." (p.24)
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Videos de Florence Noiville (23) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Florence Noiville
“Ni communiste, ni dissident, ni de gauche, ni de droite”, l'auteur tchèque Milan Kundera a toujours refusé d'être assigné à une seule identité. Il se dit avant tout “romancier”. Comment alors écrire l'histoire de celui qui a toujours souhaité préserver son oeuvre de regards biographiques ?
Pour en parler, Guillaume Erner reçoit : - Florence Noiville, journaliste, critique littéraire, écrivain - Christian Salmon, écrivain et chercheur au CNRS
#litterature #biographie #kundera
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