Code 93

De Ritter n’était pas plus avancée et Ronan s’expliqua :
— Tu te pointes sur un lieu de deal, t’attends la visite d’un beau déchet, héroïnomane de préférence, ça parle plus facilement. Tu le laisses acheter sa came et tu le filoches sur quelques mètres. Quand t’es au calme, tu l’interceptes, tu lui prends sa dose et ensuite tu peux lui demander ce que tu veux, il aura très envie de te parler.

Les cheveux blancs coupés court et le visage avouant une cinquantaine bien tassée, Damiani n’aspirait plus qu’à décrocher son grade de commandant à l’échelon fonctionnel pour faire gonfler sa retraite et partir dans la maison qu’elle avait fait construire pour sa famille, quand ce mot avait encore un sens. Elle voulait juste poser son flingue, sa carte de police et ses congés, pour profiter de ce qui lui restait de projets.

Elle ne pleurerait pas tant qu'il serait là. La tristesse c'est personnel, ça ne se partage pas.

La télévision n’offrait de toute façon rien d’autre. Séries sur les flics, films sur les flics, reportages sur les flics. Il n’avait jamais compris pourquoi les gens les détestaient autant en vrai qu’ils les adoraient en fiction.

Séries sur les flics, films sur les flics, reportages sur les flics. Il n'avait jamais compris pourquoi les gens les détestaient autant en vrai qu'ils les adoraient en fiction.

Les deux policiers restèrent un instant silencieux devant le cadavre avec cet étrange sentiment d'être plus vivants que d'habitude.

Il imaginait les parents anéantis, dans le silence d’une chambre vide, fouillant les albums de famille à la recherche du cliché le plus ressemblant sans pouvoir s’empêcher de prendre le plus joli. Résultat, une mosaïque improbable de portraits de gamins qui se marrent comme des baleines sous le mot « Disparus » en lettres capitales rouges. Ça foutrait un coup au moral de n’importe qui.

Trois mots dansèrent devant les yeux de Coste. Zombie, autocombustion et vampire. Une vraie série Z comme l'aurait filmée Ed Wood.

Sam pressa Ronan, il n'avait pas envie de passer l'après-midi à arpenter les abords de la cité Gagarine de Romainville.
- Sérieux, speed un peu, on va se taper des coups de sonnette si on veut le faire correctement. On commence par les tours nord et on fera retour par les sud.
- Tu te la joues pisteur indien ? C'est où, le nord ?
- Lève les yeux et cherche les paraboles sur les fenêtres, elles sont toutes dirigées vers le sud, c'est une constante. Maintenant que tu sais où est le sud, ça va aller pour trouver le nord ?
- A tes ordres, Pocahontas.

C'est pas Hollywood, ici, c'est la Seine-Saint-Denis.