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EAN : 9782382670491
464 pages
Mnémos (12/04/2023)
3.39/5   22 notes
Résumé :
Witch World, le Monde ensorcelé !

Simon Tregarth, un ancien soldat, se retrouve perdu à tout jamais dans cet étrange monde au passé infini où magie et science se livrent une lutte acharnée.

En entrant au service des sorcières d'Estcarp dont le pouvoir est menacé par les terribles Kolderiens, Simon, épaulé par les vaillants Fauconniers et aidé de Jaelithe, l'amour de sa vie, changera à tout jamais la destinée du Monde ensorcelé.
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Paru pour la première fois dans les années 1960, la série « Witch world » est l'oeuvre d'André Norton, une autrice américaine particulièrement en vogue pendant toute la seconde moitié du XXe siècle, et dont les éditions Mnémos proposent aujourd'hui une réédition. L'ouvrage regroupe deux livres (« Le Portail » et « L'emprise ») qui mettent en scène le personnage de Simon Tregarth, un ancien soldat originaire de notre monde mais qui, pour fuir de puissants ennemis à propos desquels l'autrice ne s'étend pas, est amené à traverser un portail menant vers un tout autre univers que le notre. Là, notre héros va croiser par hasard la route d'une sorcière qui va l'entraîner au pays d'Estcarp, territoire dirigé par des femmes dotées de pouvoirs magiques et dont l'intégrité est menacée par ses puissants voisins, les royaumes de Karsten et d'Alizon qui préparent depuis des années leur invasion. Doté d'une solide expérience de la guerre et plein de ressources, Simon va très vite s'intégrer dans ce monde abritant de puissantes formes de magie et va même se révéler indispensable au royaume d'Estcarp auquel il propose ses services. Son aide est acceptée avec d'autant plus de diligence que, à l'ouest, une autre menace se dévoile peu à peu : une force d'invasion dotée de puissants artefacts dont le niveau de technologie est étrangement supérieur à ce que le nouveau monde de Simon a jusqu'à présent été capable de produire. le pitch est relativement classique et le roman coche toutes les cases attendues de ce type de fantasy : portails magiques, combats héroïques, histoire d'amour contrariée, rencontre avec des peuples ou espèces possédant leurs propres spécificités… L'intrigue est bien rythmée et nous balade à différents endroits de la carte, ce qui permet à l'autrice d'enrichir son univers au fur et à mesure des pérégrinations du héros. Ces dernières nous offrent de beaux moments d'action puisque le chemin de Simon et de ses compagnons va être amené à croiser sans arrêt la route des Kolderiens, ces mystérieux envahisseurs aux capacités surprenantes. Là où l'histoire trouve ses limites, c'est justement dans la redondance de cette confrontation entre Estcarp et Kolder puisque, quelque soit le problème rencontré par le héros, on devine rapidement que ce sont toujours les mêmes qui se cachent derrière les attaques fomentées contre les sorcières et leurs alliés.

Le roman n'a donc rien d'original aujourd'hui en terme d'intrigue, mais l'introduction signée par l'autrice Mercedes Lackey permet de bien mesurer à quel point ce récit a pu être considéré comme précurseur à l'époque de sa sortie. Parmi les aspects de ce récit perçus comme novateurs figure évidemment le choix de mettre en scène une société matriarcale et, plus largement, celui d'accorder aux femmes une place aussi importante dans l'intrigue. Seulement beaucoup d'eau a coulé entre les années 1960 et aujourd'hui, si bien que le traitement des personnages féminins proposé ici paraît au contraire particulièrement daté. Certes, Estcarp est présenté comme dirigé par des femmes, mais dans les faits on voit bien peu ces sorcières qui délèguent la protection du royaume aux hommes. Or, c'est auprès de ces derniers que l'on passe l'essentiel de notre temps, et ce sont eux qui, de fait, prennent les décisions cruciales sur le terrain concernant la stratégie à adopter ou la façon de gérer les troupes. L'origine de leur magie ne manque elle aussi pas de faire tiquer puisqu'elle est évidemment liée à leur pureté, et donc à leur virginité. Les personnages féminins mis sur le devant de la scène n'échappent pas quant à eux aux principaux stéréotypes de genre qu'on rencontre dans de nombreuses oeuvres de fantasy (et pas que). La sorcière que Simon va croiser (on ne connaît pas son nom pendant une bonne partie du roman) est ainsi présentée comme une puissante magicienne mais passe son temps à se faire capturer, et sa libération nécessite évidemment toujours l'intervention d'un tiers, qui est généralement notre héros. La seconde figure féminine importante du roman est l'héritière de Verlaine, un petit royaume possédant une importance stratégique pour Estcarp comme pour Karsten. Déterminée et indépendante, la jeune femme séduit dans un premier temps par sa volonté de ne pas se conformer au rôle de potiche qu'on lui a assigné. L'autrice insiste bien également sur son physique tout à fait banal et presque ingrat, ce qui change il est vrai des sempiternelles bombes capables d'accrocher le regard de n'importe quel mâle croisant son chemin. le second livre balaye toutefois une partie du travail réalisé avec ce beau personnage, Loyce devenant alors prompte à des crises de panique ou fondant en sanglots dès lors qu'elle se retrouve soumise à une situation dangereuse.

Heureusement, Simon est là pour tout régler. Il est bien sympathique, Simon, avec son sang-froid, sa vivacité d'esprit et sa facilité à se lier avec les autres. Sympathique mais fade. On a typiquement affaire au héros passe-partout, presque transparent parfois, dans une tentative louable mais, à mon sens, peu efficace, de permettre à tous les lecteurs de mieux se glisser dans la peau du personnage. C'est un peu l'archétype du super-héros : c'est un leader né qui sait toujours comment réagir, il parvient à lui tout seul à venir à bout de problèmes jusqu'ici insolubles, il est apprécié de tout le monde, bref, c'est le gars parfait que tout le monde voudrait avoir dans son camp. Ce n'est pas désagréable, loin de là, seulement on est désormais davantage habitué aux personnages tourmentés, ou du moins pas irréprochables, aussi cet aspect là vient-il renforcer encore davantage l'impression que l'on a affaire à un récit quelque peu démodé. On peut d'ailleurs étendre le reproche aux choix qui sont opérés concernant l'univers évoqué, certains aspects étant totalement passés sous silence alors qu'on se serait justement attendu à ce que l'autrice nous fournisse des explications sur le sujet. C'est le cas notamment en ce qui concerne le fonctionnement de la magie des sorcières qui, de l'avis même des intéressées, est totalement opaque et n'intéresse vraiment aucun des personnages. C'est magique, c'est tout. Il en résulte une absence de profondeur générale qui limite l'immersion dans cet univers certes agréable à arpenter mais qui sonne finalement un peu creux.

« Witch world » est une oeuvre parue initialement dans les années 1960 et qui, à l'époque, a durablement marqué les lecteurs en raison du caractère novateur de certains choix réalisés par l'autrice André Norton. Soixante ans plus tard, force est de constater que la série de l'autrice a un peu vieillie, notamment en ce qui concerne le traitement de ses personnages puisque les romans sont construits à la fois sur l'archétype aujourd'hui dépassé du héros parfait, mais aussi et surtout sur des stéréotypes de genre qui ne passent plus. On prend malgré tout plaisir à suivre le périple de Simon Tregarth dans ce monde plein de magie et en proie à une invasion étrangère impliquant des technologies avancées, quant bien même l'intrigue a tendance à devenir redondante et à occulter certains aspects par facilité.
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Avant de vous parler de ce roman, il me semble important de poser le contexte en parlant de son autrice. Andre Norton (Alice M. Norton de son vrai nom, mais allez savoir pourquoi, elle a préféré prendre le nom d'un homme 👀) a été une figure importante de la SF/Fantasy américaine à son époque (1912-2005), reconnue par ses pairs et le public. Autrice très prolifique, elle a marqué des générations d'écrivains. Witch World est sa série-univers la plus connue. Elle regroupe plusieurs cycles et une trentaine de romans, dont certains écrits en collaboration.
Je ne la connaissais pas (et je suis persuadé de ne pas être la seule) donc un grand merci à Mnémos pour ce travail de mémoire.

Le Cycle de Simon Tregarth regroupe les deux premiers tomes du Cycle d'Estcarp. Ce dernier est le 1er et principal cycle, composé d'une dizaine de tomes. Les 5 premiers ont déjà été traduits par le passé dans la collection Pocket Junior SF que je connaissais très bien. C'est étonnant d'ailleurs que je ne l'ai pas lu à cette époque.

Il s'agit d'une duologie introductive. Les deux tomes s'enchaînent et concluent un premier arc, mais laissent présager moult aventures à venir. Ce n'est donc que le début. On y suit Simon Tregarth, un ancien colonel en fuite, sauvé in extremis grâce à un portail qui le mène dans un autre monde. Mais à peine arrivé, il est témoin de la poursuite effrénée d'une jeune femme par des hommes armés jusqu'aux dents. Bien sûr, il va se porter à son secours et prendre fait et armes pour sa cause. Car oui, la damoiselle (pas si en détresse que ça) est du royaume d'Estcarp, dirigé par une caste de puissantes femmes-sorcières qui doivent se défendre depuis des années contre des voisins plutôt hostiles. Mais dernièrement, la vraie menace vient de la mer avec le mystérieux et très dangereux peuple Koldec qui annihile tout sur son passage.

L'univers de Witch World est un étrange mélange des genres entre portal Fantasy, sword & sorcery, quelques éléments de SF et saupoudré d'un brin de féminisme avant l'heure. On a donc un monde de Fantasy médiévale classique, mais où existent également des technologies très avancées. Tout en naviguant entre les intrigues politiques des différents royaumes, se posera la question des origines de Koldec, des portails, des sorcières, etc.

Ces deux premiers tomes datent de 1963/64. C'est définitivement old school, mais étonnement, ça se lit plutôt bien (je m'attendais à avoir plus de difficulté que ça). Les pages se tournent, les péripéties s'enchaînent et on va parcourir ainsi de long en large une bonne partie de ce monde (un grand merci à Stéphane Arson pour la carte détaillée qui m'a bien servi).
Si l'histoire en elle-même n'a pas à rougir de son côté classique, il m'a, cependant, manqué plus de développement et de nuances que ce soit au niveau de l'intrigue (la facilité avec laquelle Simon va choisir son camp ou être accepté dans ce monde par exemple), du worldbuilding ou des personnages. À part le questionnement sur le rôle homme/femme que j'ai trouvé très intéressant pour l'époque, le reste me laisse un petit goût de pas assez. Il est vrai que c'est un texte écrit à la base pour un public ado ce qui peut s'expliquer, mais c'est surtout, je pense, qu'il souffre de la comparaison avec les standards actuels. C'est donc, à mon avis, un texte à vraiment remettre dans son contexte afin de mieux l'apprécier et ne pas avoir trop d'attentes.

Mon principal problème a été le manque d'attachement aux personnages (en général et principaux en particulier). Il n'y a que Loys de Verlaine que j'ai de suite adoré. C'est la fille d'un petit baron détestable et pilleur d'épaves, promise contre son gré au dirigeant de Karsten (un des royaumes ennemis d'Estcarp). Bien décidée à se faire la malle et vivre sa vie, elle va croiser la route de nos héros et se retrouver embarquer dans leurs aventures. Vraiment, un super personnage que j'ai beaucoup aimé à la narration (mais c'était bien trop court) ! 👍

Je ne peux pas en dire autant pour Simon Tregarth 😅. Ce qui est plutôt embêtant, car l'histoire est racontée à 80 % de son point de vue. Je l'ai trouvé assez creux alors que bon, l'autrice ne nous fait pas le coup du jeune premier. C'est un homme adulte, un soldat avec du vécu et un passé pas très net (mais à peine abordé et vite oublié) donc des aspérités, il devrait en avoir, mais en fait non. Même après 400 pages, je ne sais toujours pas qui il est vraiment.
L'autrice nous propose pourtant un héros qui se questionne énormément. Il a une affinité avec ce monde qui lui est étrangement familier et contre toute attente, il va développer un pouvoir comparable à celui des sorcières. Ce dernier point aurait pu m'agacer (pour une fois que les meufs ont un pouvoir, il y a un mec pour débarquer de nulle part et se l'approprier), mais Andre Norton va ingénieusement choisir d'aller vers la complémentarité plutôt que dans l'opposition.

Autre personnage important : Jaelithe, la sorcière que Simon rencontre et ‘sauve' dès son arrivée. Elle n'aura pas de nom jusqu'à la fin du 1er tome parce que connaître son nom, c'est avoir du pouvoir sur elle 👀. J'aime pourtant ce que l'autrice a voulu faire avec ce personnage. Cette nana a son propre agenda, elle a des responsabilités liées à son pouvoir et elle n'a pas le temps de ménager la fierté ni la masculinité de Simon. C'est même quelque chose qu'elle n'envisage même pas 👏😄. C'est pourtant un personnage que j'ai eu beaucoup de mal à cerner et à aimer pour les mêmes raisons : il m'a manqué de matière et de développement. Elle est lointaine, intouchable, et puis surtout, on n'a quasiment jamais son point de vue. On ne la voit qu'à travers notre héros.

Ce qui m'amène à la vision de la femme dans cette oeuvre (point mis en avant par l'éditeur et qui m'a fait m'y intéresser). Si Estcarp est fondé sur un système matriarcal, c'est bien le seul du coin. le reste du monde étant d'une misogynie très ordinaire (d'ailleurs, les femmes dans cet univers se limitent à des maîtresses/concubines, des épouses/futures épouses et les sorcières). Ces dernières descendent du Peuple aîné, un peuple fondateur à la longévité impressionnante dont seules certaines femmes sont capables d'utiliser le Pouvoir. C'est donc elles qui dirigent le royaume. Comme dit plus haut, leur nom doit rester secret (donc pas d'identité) et, toujours afin de préserver leur pouvoir, elles doivent rester vierges 👀👀👀. Ce dernier point les expose (évidemment) au viol systématique par leurs ennemis, mais aussi au retrait de leur féminité. Elles renoncent à leur statut de femme (parce que c'est bien connu, on ne peut être une femme qu'en ayant eu du sexe et en étant mère) et elles sont décrites à plusieurs reprises comme n'étant pas désirables et maigres, voire masculines (alors que les courtisanes/maîtresses ne sont que rondeurs et volupté… et stupidité et cupidité 😅).
Encore une fois, outre que c'est un ordre établi qui va être questionné par l'autrice, c'est à remettre dans son contexte. Les sorcières d'Estcarp ont inspiré Mercedes Lackey, on pourra aussi en retrouver des échos dans l'ordre du Bene Gesserit de Dune ou dans les Aes Sedai de la roue du temps. Si, à mes yeux aujourd'hui, la place de la femme dans Witch World est très discutable, Andre Norton a définitivement fait bouger les choses. Rien que le fait d'avoir un héros qui ne couche pas avec tout ce qui bouge et qui n'hypersexualise pas les femmes qu'il croise, c'est pour moi extrêmement rafraîchissant. Je pense aussi que l'autrice souhaitait montrer que même un système matriarcal n'est pas sans faille et que la solution se trouve plutôt dans l'équilibre des forces/sexes. Je le disais plus haut au sujet de Simon et de son accès au Pouvoir, Andre Norton choisit l'angle de la complémentarité et elle le démontrera avec le couple Simon/Jaelith.

Pour conclure, je dirai que Witch World est une lecture enrichissante surtout prise dans son contexte. Car malgré les péripéties, ce mélange particulier de SF et de Fantasy et les images féminines fortes, il m'a manqué de matière et de nuances. C'est le genre de lecture que j'aurai adoré ado, mais qui ne me suffit plus aujourd'hui. Cela dit, je suis ravie d'avoir découvert cette autrice qui a su questionner le genre à son époque et qui a ouvert la voie à d'autres.

Merci infiniment aux éditions Mnémos pour le service presse et pour m'avoir donné l'opportunité de découvrir cette grande dame.
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Simon Tregarth est un soldat qui s'est illustré pendant la Seconde Guerre Mondiale. Or, peu après sa démobilisation, il est accusé de participer à des trafics clandestins et est traqué par une organisation secrète. Son salut, il le doit à un certain Jorge Petronius, un docteur illuminé qui propose de le soustraire à sa condamnation en l'envoyant dans une autre dimension grâce au célèbre siège périlleux, tiré des légendes arthuriennes. Peu convaincu par les propos farfelus de l'homme, il n'en croit pas ses yeux lorsqu'il débarque dans un lieu inconnu qui ne reste pas longtemps déserté puisqu'une femme, pourchassée par des hommes et des chiens sanguinaires, surgit dans son champs de vision. L'urgence de l'instant ne lui laisse pas le loisir de réfléchir et ni une ni deux, le voici qui vient en aide à la femme et se retrouve très vite à endosser le rôle de gardien du pays d'Estcarp, peuplé de sorcières menacées par les états voisins.

Dans Witch World, Andre Norton nous ouvre les portes d'un univers imaginaire mixte mêlant de la fantasy épique à de la science-fiction. Ici, il fait office de dimension parallèle que l'on pénètre par le biais d'un portail magique. Ainsi, on passe d'un monde moderne accusant le coup de la Seconde Guerre Mondiale à un espace-temps immémorial où la magie semble avoir remplacé la science. En effet, ici le pouvoir est entre les mains des femmes qui disposent de joyaux leur permettant de manipuler les esprits, de changer d'aspect physique et d'exprimer ainsi une certaine supériorité. Or, ce matriarcat dérange les royaumes voisins gouvernés par des hommes qui considèrent ces sorcières comme une menace et se sont adjoints la mission de les traquer pour les asservir.

Andre Norton nous dépeint un monde déchiré car livré à une lutte sans merci, nourrie par la défiance, la haine et le machisme. Cependant, cet antagonisme va servir les desseins d'un ennemi invisible qui a infiltré les lieux sans bruit. Celui-ci se sert du même genre de portail emprunté par Simon Tregarth lui-même pour accomplir ses bases oeuvres. A travers son ombre, l'autrice enrichit son monde de nouvelles perspectives. La science entre en action à travers le progrès qui cherche ici à supplanter la magie. Cette science est néanmoins dévoyée car l'autrice teste dans son récit des expérimentations scientifiques visant à créer une armée infaillible et décérébrée afin de coloniser les différents royaumes préexistants.

Dans Witch World, l'autrice joue donc sur les anachronismes d'une modernité qui investit la médiévalité ambiante pour nourrir un imaginaire insolite.

Witch World est un cycle marquant qui laisse s'exprimer un puissant féminisme. L'intrigue se concentre autour d'une poignée de femmes détentrices d'un pouvoir. Elle revisite donc la figure de la sorcière qui est à la fois puissante en son royaume et pourtant persécutée, passée les frontières. Andre Norton a repris l'image populaire et historique de la chasse aux sorcières à travers la notion d'indépendance féminine qui dérange la société misogyne. Sous sa plume la magicienne prend les traits d'une femme forte, actrice de son destin. Elle n'est plus cantonnée à occuper un rôle décoratif. L'autrice casse volontairement la représentation sexualisée de la femme, reléguée au simple rang d'objet de désir et de concupiscence. Mieux encore, elle prend la tête de l'aventure en menant la quête. En dépit du fait que le personnage principal soit un homme, c'est une femme qui demeure l'atout décisif à la réussite de la mission.

Andre Norton signe une intrigue clairement avant-gardiste pour son époque où la femme n'est plus la demoiselle en détresse à sauver. Emancipation et liberté s'immiscent entre ces pages pour porter un récit novateur et inspirant.

Avec Witch World, Andre Norton signe un récit fondamental pour les littératures de l'Imaginaire en ouvrant notamment la voie à toute une génération d'autrices, à l'image de Mercedes Lackey et Marion Zimmer Bradley.

Andre Norton laisse un héritage conséquent. Or, en rééditant son oeuvre majeure de fantasy, les éditions Mnémos veulent témoigner de son influence sur l'Imaginaire et sur les autrices qui ont pris sa relève... suite sur Fantasy à la Carte.




Lien : https://fantasyalacarte.blog..
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Les éditions Mnémos (merci !) m'ont proposé de découvrir ce livre qui constitue apparemment un classique de la littérature de l'imaginaire, fraîchement réédité par leurs soins. Witch World est une saga qui comprend une trentaine de romans et le Cycle de Simon Tregrath regroupe les deux premiers tomes, le Portail et L'Emprise (précédemment traduits sous les titres L'Arche du temps et La vallée dans l'ombre). Je dois avouer que je ne connaissais ni cette oeuvre, ni son autrice (oui, c'est une femme qui se cache derrière ce pseudonyme masculin) pourtant prolifique.
Je vous en propose une critique qui risque d'être souvent sous forme de « oui, mais… », dans le sens où chaque élément positif appelle une nuance. Ainsi, je suis sortie de cette lecture quelque peu mitigée.

Tout d'abord, j'ai été frappée par ce mélange de fantasy – avec de la magie, des sorcières, un univers médiéval, des forteresses et ruelles tortueuses, des bateaux à voiles, etc. – et de science-fiction – voyages spatio-temporels, technologies futuristes liées à l'énergie, à des systèmes sophistiqués de chauffage, d'éclairage ou de communication, sous-marins des Kolderiens. Si Estcarp utilise certaines de ces technologies sans en connaître la provenance, elles sont bien souvent créées et utilisées par les Kolderiens, les ennemis déclarés de ces deux tomes, et sont donc vues comme quelque chose d'abject et de nocif, apportant la mort et non le progrès.
Néanmoins, en dépit de cet aspect plutôt original, j'ai eu du mal à être passionnée par ce récit qui m'a semblé somme toute assez classique et convenu (même s'il ne l'était sans doute pas lors de sa publication originale !). Cette duologie a des allures d'introduction : on voyage sur ces terres nouvelles pour Simon Tregarth comme pour nous, on rencontre les différents protagonistes, on assiste à la mise en place d'enjeux, de questions et de dangers, mais le tout reste superficiel et manque de profondeur, que ce soit dans la psychologie des personnages, dans la résolution des problèmes, dans les scènes d'action qui ne semblent jamais réellement mettre les héros en difficulté, etc.

Andre Norton met en place un matriarcat : des sorcières – seules des femmes pouvant être les détentrices du Pouvoir – dirigent Estcarp. Les sorcières sont respectées, indépendantes, puissantes (mais non parfaites, se montrant parfois fermées face à des possibilités nouvelles) et instaurent une politique relativement pacifiste : Estcarp se défend contre les royaumes adjacents qui rêveraient d'agrandir leurs territoires et de mettre à bas ce gouvernement féminin, mais ne partage pas ce rêve d'expansion au détriment de ses voisins. À ces sorcières s'ajoute Loyse de Verlaine, fille de noble promise à un mariage arrangée, qui se battra pour gagner sa liberté en utilisant uniquement son intelligence, sa ruse et son courage, un personnage qui m'a vraiment enthousiasmée dans le premier tome.
Cependant, les noms étant des sources de pouvoir (une idée que l'on retrouvera dans Terremer d'Ursula K. Le Guin notamment), les sorcières ne peuvent révéler le leur (et n'utilise pas de surnom). Ainsi, malgré toute leur force, elles ne sont définies que par des pronoms, ou « la sorcière », « la femme d'Estcarp », etc., ce qui nuit à l'identification par la lectrice ou le lecteur et empêche toute proximité. Pendant le premier tome, il y a Simon, Koris, Loyse et la sorcière, qui, même si elle a un rôle important, en est moins visible d'une certaine manière (sans parler du fait que l'on a jamais accès à ses pensées) ; j'avoue que j'aurais aimé que ce personnage féminin soit davantage mis en valeur, que la distance avec elle soit un peu abolie. de même, leur Pouvoir est prétendument lié à leur virginité, ce qui pose quelques questions tout de même. de plus, Simon et Koris restent au premier rang et Loyse, fiancée (de son plein gré) dans le second tome, perd alors toutes ses qualités d'aventurière, adoptant le rôle banal et passif de demoiselle en détresse, tombée entre les mains des méchants Kolderiens – ma plus grosse déception vient finalement de ce recul que j'ai trouvé absolument regrettable.
Certes, il ne faut toutefois pas oublier que ces deux tomes ont été écrits en 1963 et 1964 et qu'ils mettaient tout de même déjà bien en valeur leurs protagonistes féminins par rapport à d'autres romans de l'époque, mais ils pâtissent de la comparaison avec d'autres oeuvres.

[Petit spoiler, même si la quatrième de couverture indique déjà que Jaelithe est, pour Simon, « l'amour de sa vie » et qu'il n'y a pas de réelle surprise quand à la suite de leur histoire.]
Dans le second tome du cycle, j'ai apprécié le discours autour de la liberté dans le mariage. Jaelithe, après des années à vivre sans attaches comme sorcière, n'entend pas se laisser brider par leur union et continue de parcourir le territoire en solitaire comme elle le faisait, sans ménager la sensibilité de son époux. Pour Simon, c'est un apprentissage… qui commencera par des pensées exaspérantes, mais permettra de repenser sa relation avec sa femme et aboutira à un réel respect entre eux, avec une collaboration qui renforcera leurs pouvoirs respectifs. J'apprécie énormément retrouver des considérations de ce genre, psychologiques, humains, plutôt que de l'action à outrance. (J'en profite pour signaler que Andre Norton propose un héros qui, même s'il m'a laissé totalement de marbre, n'est ni un séducteur invétéré, ni un gros bourrin, et que c'est quand même bien appréciable.)

Cette lecture n'était pas inintéressante, mais je ne suis pas franchement convaincue pour autant. Ces récits ont des qualités et des points de vue attrayants, mais il m'a manqué tout simplement d'éprouver un intérêt réel et fort pour les personnages comme pour l'intrigue. Or, les premiers ne m'ont fait ressentir aucune empathie, aucun atome crochu, et la seconde n'a pas su me captiver. J'ai bien conscience que certains points sont à replacer dans le contexte des années 1960, mais cela ne change pas mon manque d'enthousiasme pour cette histoire.

À l'heure actuelle, j'ignore totalement si je poursuivrai la découverte de Witch World au fil des rééditions de Mnémos. La longueur de la saga me refroidit ainsi que le manque d'investissement émotionnel lors de cette lecture, mais peut-être la saga se bonifie-t-elle au fil des tomes. Affaire à suivre.
Lien : https://oursebibliophile.wor..
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C'est un peu poussif, je trouve que ça n'a pas très bien vieilli, autant en termes de style que de structure, et je me suis un peu ennuyée. La com autour de ce roman (enfin ces deux romans, pour être précise) qui bénéficie d'une nouvelle traduction (que je trouve bof, mais je ne connais pas la première version ni la VO) promettait une épopée féministe, et le résumé des personnages féminins indépendants et déterminants, mais personnellement je n'ai rien trouvé de tout ça. Les femmes restent ici assez cruches, leur construction est fade et leurs « rôles déterminants » ne le sont en grande partie que grâce à celui des personnages masculins qui, eux, sont à mon avis plus fournis et plus soignés dans leur construction. le véritable personnage principal de cette histoire reste d'ailleurs un homme, comme le sous-titre de cette édition (Le cycle de Simon Tregarth) l'indique.
Quand au thème des sorcières, bon… mouais. On a des femmes magiciennes, qui vivent plus ou moins en autarcie entre femmes, et qui perdent supposément leurs pouvoirs quand elles « deviennent des femmes », aka quand elles ont des relations seksuelles. Voilà voilà. 🙃
Bref, je n'ai rien trouvé de très exceptionnel à ce roman, contrairement à ce à quoi je m'attendais. C'était sûrement hyper novateur quand ça a été écrit, il y a une cinquantaine d'années, mais je trouve que ça pris beaucoup de poussière.
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critiques presse (1)
Syfantasy
15 mai 2023
Witch World est donc une nouvelle pierre à l'édifice de résurrection éditoriale de Mnemos, qui ne cesse de confirmer son statut d'éditeur de qualité, comme un certain Callidor...
Lire la critique sur le site : Syfantasy
Citations et extraits (1) Ajouter une citation
C'était une facette de sa personnalité , et il fallait l'accepter.Nul ne pouvait prétendre annexer tout l'espace mental et émotionnel d'une autre personne.Après tout , lui aussi avait une part de lui-même à laquelle elle n'avait pas accès .Mais l'essence même de leur union ,c'était de prendre ce qu'elle avait à offrir sans poser de question, et de donner en retour tout ce qu'il possédait ,librement et sans arrière-pensée.
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Video de Andre Norton (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Andre Norton
À l'occasion de la sortie de Witch World - le Cycle de Simon Tregarth d'Andre Norton dans une nouvelle traduction enfin complète, nous vous proposons de revenir sur l'histoire d'une Grande Dame de la SF et de la fantasy. Récompensée par le Grand Master of Fantasy Award, un prix porte désormais son nom. Découvrez une autrice hors du commun et un cycle de science-fantasy romantique et féministe qui a inspiré de nombreuses écrivaines !
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