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3,2

sur 2222 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Incroyable ! Amélie Nothomb nous livre un Jésus torturé par la soif au moment de sa crucifixion.
C‘est le premier livre de l'auteure que je lis en entier car Stupeur et tremblements m'est tombé des mains, les critiques de ce livre sur Babelio m'intriguaient. du coup, j'ai étanché ma soif.
Faire de Jésus un être partagé entre son humanité et son essence divine, en faire un être faillible qui pourrait être le « mec » d'à côté, tellement banal m'a beaucoup plu.
Son Jésus est proche de celui d'Éric-Emmanuel Schmitt dans L'évangile selon Pilate, il y a beaucoup de finesse, d'esprit, d'humour. de belles pensées
Une histoire à l'image de notre société où la faim, la pauvreté, la guerre sévissent et où avoir une spiritualité dans de telles circonstances n'est pas toujours facile.
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Jamais déçu par Amélie Nothomb, Horusfonck!.. Et encore moins par Soif. Et ravi plus encore!
Soif... Comme algèbre d'un ineffable bonheur lorsque l'on retarde le moment de boire.
Amélie Nothomb, qui ne recule devant rien, va prendre la voix du Christ... Vous savez, le Fils de Dieu à l'origine du christianisme.
Les questionnement de Jésus, lors de son atroce supplice, que ne les sommes nous pas posés?... Ce drôle de Père-Dieu et son projet tarabiscoté pour laver les péchés du monde. Jésus, qui en bave sur la croix (et avant, lorsqu'il doit gravir le Golgotha avec une croix plus lourde qu'un cheval mort), Jésus trouve ce plan voué à l'échec!.. Et, au vu des deux-mille ans écoulés, je suis assez d'accord avec lui. Tout ça pour ça, comme titrait certain film...
Mais, au-delà d'un ton parfois désabusé, il y a la grâce qui pointe: C'est Marie Madeleine, l'amour terrestre de Jésus, c'est le souvenir de Joseph, Simon de Cyrène, Véronique, et Marie qui prend son fils mort dans ses bras: Ces instants qui lavent toute l'ignominie d'un supplice absurde et vain.
Voilà.
C'est ma cinquième lecture d'une auteure surdouée et surprenante.
C'est, peut-être, celle que je préfère.
Je la recommande chaudement à tous les incroyants, agnostiques , croyants et super-croyants: Ils y trouveront matière à réfléchir, en porticulier (voire entre-autre, allez savoir) sur l'ultime paragraphe.
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Nous avons tous des héros que nous vénérons.
Pour les protagonistes de Jérôme Attal, ce sont Superman , Winston Churchill.
Celui d'Amélie Nothomb est bien singulier, reconnaissons-le, puisqu'il s'agit de Jésus. Elle va se glisser dans son corps pour quelques jours et souffrir avec lui. Dans des interviews, elle confie avoir eu un intérêt précoce pour Dieu (dès 2ans) !

Voudrait-elle, se demandent certains, régler son compte avec Dieu ? L'écrivaine se justifie en affirmant que « c'est une erreur, une monstruosité ».

Les lecteurs du Pèlerin se souviennent sûrement du chemin de croix que l'écrivaine avait publié peu avant Noël. (1) Ces pages préfiguraient donc ce livre audacieux.
Pour elle « la Passion n'est pas un crime passionnel mais une exécution réfléchie ».
Le titre SOIF fait référence à l'antépénultième parole que l'on prête à Jésus ».

Le « Jésus d'Amélie Nothomb », digne d'une tragédie grecque, revient sur ses miracles et s'étonne de recevoir si peu de reconnaissance. On sourit à entendre cette femme qui trouve son enfant infernal depuis sa guérison ! Il s'interroge sur la mission que le père lui avait confiée.
Il exprime ses regrets, ses envies, ses doutes. On plonge dans ses pensées, non dénuées d'humour. Il ose manifester sa gratitude envers son père pour avoir inventé le corps et salue même son génie. Pourtant ce corps va devoir souffrir, endurer les pires sévices. Car la sentence est implacable. Et inéluctable. Il n'y a pas d'échappatoire.
Il dresse les portraits de Judas, « un problème permanent », de Pierre et Jean. Il évoque son amour pour Madeleine, ébloui par sa beauté.

On assiste à ce qu'il appelle « les simagrées » : en « entrée » la couronne d'épines que l'on enfonce sur le crâne jusqu'à faire saigner. Puis, « le hors d'oeuvre » qui consiste en une séance de flagellation. Dans son « fatras de paroles », il énumère ses chutes et convoque les personnes croisées alors qu'il traîne « ce poids mort ».
Après l'amitié de Simon qui l'aide de tout coeur, voilà l'amour de Véronique. « Deux courages d'une sublimité sans exemple ». Moment ineffable.
Et enfin « le plat de résistance », la crucifixion, regardée par des « happpy few », « des connaisseurs triés sur le volet» qui aiment ces tortures. Il ne nous épargne rien.
Le narrateur aurait pu scander, comme une antienne, son récit par les mots de Damiens  : « La journée sera rude » (2), car lui aussi allait être supplicié.
Pour Amélie Nothomb « cette mise à mort prouve que Jésus n'est pas considéré comme un martyr. C'est pire qu'une humiliation, c'est une flétrissure ». de plus ,voir sa mère sur son chemin de croix est « le comble de la cruauté ».
Jésus en vient à déverser un litanie de reproches à son père pour avoir « inventé de tels supplices ». N'est-ce pas « un vice de forme dans la création », une bévue ?
Pour lui, c'est méconnaître l'amour. D'amour il est question quand il imagine une autre vie auprès de Madeleine. La romancière insiste sur le contact physique, l'étreinte, l'embrassement.

Le verbe « accepte » traduit la résolution du messie. Un état d'esprit caractérisant aussi Edgar Morin qui, dans ses mémoires, fait le constat qu'il faut se résigner.
On peut être étonné de sa façon d'apprivoiser la mort. Il ressent « l'étreinte maternelle, sa douceur extrême » . Ces retrouvailles sont une épiphanie pour lui, d'autant qu'il constate combien la mater dolorosa a rajeuni. Il rappelle que sa mort a inspiré beaucoup d'artistes et considère leurs représentations de son « repos du guerrier », sa vie éternelle, très réussies. Ces Pietàs sont « des hymnes à l'amour ».
L'écrivaine ne cesse de surprendre puisque le monologue se poursuit post mortem. Ce sont des musiques sublimes qui s'élèvent et font danser celui qui venait d'être déposé dans son caveau. Elle aborde le rapport que l'on entretient avec nos disparus.

Amélie Nothomb, romancière érudite, distille sa philosophie tout en évoquant la vie du Christ, glissant des mots grecs (Consultez le dictionnaire Bailly!). Parfois on en vient à oublier que c'est Jésus qui parle quand l'académicienne belge décline la vision de l'amour, de la pluie, de la peur de la mort ou quand elle déploie son argumentaire sur la soif, « cet élan mystique », qui mène à l'amour.

Si vous êtes féru d'Amélie Nothomb, vous avez dû vous demander si elle a réussi à glisser son mot fétiche : « pneu ». Et bien oui, elle a réalisé ce tour de force !
Ajoutons que souvent un mot nouveau vient enrichir le lecteur : ici c'est « pétrichor » comme le note Stéphane Bern . (3)

Il fut demandé à l'auteure, il y a quelques années, ce qu'elle ferait si elle était présidente, mais on n'avait pas eu l'idée de lui demander quels miracles elle aimerait réaliser !

En relatant la vie imaginée d'« un Jésus lucide », l'écrivaine mystique signe un roman apocryphe, déconcertant, atypique, qui peut même être dérangeant. Elle a voulu pointer ce qu'elle appelle le malentendu. Elle décrypte la relation père/fils.
Elle aura réussi à nous faire frissonner devant l'horreur et l'indicible, à susciter de l'empathie, à nous apprendre à « cultiver la soif », en enseignant la jouissance de boire : «  Pour éprouver la soif, il faut être vivant » !
La soif de la lire reste inaltérée.
le rôle d'un écrivain, étant pour elle, « d'aider le lecteur à trouver un sens à sa vie », sa confession amène chacun à questionner sa propre foi.
Un récit sous le signe d' Eros et Thanatos conté avec toujours autant de verve, de traits d'humour. À écouter sur fond sonore de « Personal Jesus » de Depeche mode ! Un roman inattendu qui va bousculer la rentrée littéraire selon Emmanuel Kherad.

(1) Paru dans le Pèlerin du 22 mars 2018
(2) Damiens : mots entrés dans la légende, prononcés par ce personnage hors du commun, au destin cruel. Accusé de régicide, il sera puni d'un supplice épouvantable.
(3) pétrichor : odeur de la terre après la pluie.
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Contrairement à beaucoup de lecteurs babeliotes, j'ai adoré ce récit. En fait, dès que l'on me parle de la vie de Jésus d'une manière différente des sacro-saints évangiles, je suis preneur. Cette vision d'un Christ plus humain, ancré dans une vie humaine quotidienne me réjouit pleinement. Amélie Nothomb donne la parole à un Jésus un peu désabusé, colérique, se dissociant de la volonté de Dieu son père. Car il reste tout de même d'ascendance divine. Il applique les directives divines bien que n'étant pas d'accord et trouvant sa Passion inutile. Trouve stupide et indécent que l'on garde de lui l'image d'un crucifié pour sauver les hommes. Il n'y croit tout simplement pas. Les derniers chapitres sur la résurrection m'ont également beaucoup plus. Au fond, qu'est-ce que la mort ? L'auteur fait survivre l'esprit du Christ à travers un discours plus philosophique.
Je n'ai pas lu beaucoup de livres d'Amélie Nothomb, mais j'ai à chaque fois beaucoup aimé. Celui-ci de même.
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A tout seigneur, tout honneur! Que serait une rentrée littéraire sans un roman d'Amélie Nothomb! Il m'apparaissait donc évident d'entamer cette nouvelle année avec mon avis sur son dernier opus au titre évocateur Soif et à la quatrième de couverture aussi blanche qu'énigmatique avec l'unique "Pour éprouver la soif il faut être vivant." Au niveau Marketing, le moins que l'on puisse dire c'est qu'elle est toujours aussi douée!

Un pari risqué, osé et très audacieux

"Il n'a pas de corps et l'absolu de l'amour que Madeleine et moi vivons en ce moment s'élève du corps comme la musique jaillit de l'instrument. On n'apprend des vérités si fortes qu'en ayant soif, qu'en éprouvant l'amour et en mourant: trois activités qui nécessitent un corps. L'âme y est indispensable aussi, bien sûr, mais ne peut en aucun cas y suffire."

Amélie Nothomb fait un choix très audacieux pour ce nouveau millésime en se glissant dans la peau de Jesus et nous contant son chemin de croix, sa crucifixion et sa résurrection. Tout le monde connait ou du moins en a déjà entendu parler. Les pro et les anti-religion affûtent déjà leurs piques... les uns passent leur chemin "car c'est elle et cela sera sans moi tant cela sera creux", d'autres se ruent dessus comme un verre d'eau salvateur. Mais que vaut ce nouveau millésime ? Un grand cru ?

Le choix de la narration est également très audacieux : Amélie Nothomb emploie le « je », cette première personne du singulier à l'évocation si personnelle, intime. Perturbant, voire déroutant au premier abord, ce « je » envoûte et captive le lecteur au fil des pages. Rien n'est prétentieux ni lourd.
Comme à son habitude, l'autrice aborde beaucoup de sujets, ouvre de nombreux chantiers de réflexion sans pour autant aller plus loin. L'amour, la place et le rôle de l'Homme, la relation au Père, la bienveillance sont judicieusement évoqués.

« Comment s'étonner que la soif mène à l'amour ? Aimer, cela commence toujours par boire avec quelqu'un. »

Un livre brillant, un roman à lire

Soif est un roman court (la marque de fabrique de Amélie) et toutefois dense, percutant et haletant. Il est rondement mené et à aucun moment les pages sont creuses.

L'écriture est superbe, fluide et poétique. Pointilleuse ou piquante, indifférente ou engagée, elle marque assurément le lecteur page après page. A l'image des phrases, les chapitres sont courts exacerbant cette sensation de manque, excitant la soif de savoir.

D'apparence simple et rapide à lire, Soif s'avère être un récit d'une profondeur intense amenant le lecteur à se reconnecter à soi, à ses sentiments et sensations. Philosophique ? Initiatique ? Chacun le qualifiera selon ses propres valeurs ou envies.

« L'amour concentre la certitude et le doute : on est sûr d'être aimé autant qu'on en doute, non pas tour à tour, mais en une simultanéité déconcertante. »

À l'instar de ces plus belles productions, L'hygiène de l'assassin, Stupeurs et Tremblements, Soif fera date dans la bibliographie de Amélie Nothomb. Original, il est brillant et réussi. J'ai beaucoup apprécié et ne peux que vous le recommander. Ne serait-ce que par curiosité... Faites-vous votre propre opinion, et échangeons. N'est-ce pas aussi cela l'intérêt de la lecture ?

Chapeau bas Madame!

5/5 Coup de coeur

Lien : http://www.alombredunoyer.co..
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Le procès est terminé. Ponce Pilate a condamné Jésus le Nazaréen à la crucifixion. Commence la dernière et longue nuit du Christ : dans sa triste cellule, loin du mont des Oliviers, l'homme ne dort pas. Entre confiteor et colère, il ne sait comment se préparer au supplice qui l'attend. Blessé d'avoir été trahi par les miraculés, il se sent plus seul que jamais. « À l'évidence, il n'a pas fallu les soudoyer, ni même les encourager. Ils sont tous venus témoigner contre moi de leur plein gré. » (p. 5) La tentation de la fuite est grande, par peur de la douleur et peur de faiblir. Jésus redoute les coups et les plaies, car il se sait fait de chair, comme l'a voulu son Père. « J'ai la conviction infalsifiable d'être le plus incarné des humains. » (p. 9) Alors, pour espérer et détourner son esprit de la peur, il se raccroche à la soif et à ses promesses aussi douloureuses qu'enivrantes. Il s'impose un ultime désert pour mieux supporter la torture à venir. « Il y a des gens qui pensent ne pas être des mystiques. Ils se trompent. Il suffit d'avoir crevé de soif un moment pour accéder à ce statut. El l'instant ineffable où l'assoiffé porte à ses lèvres un gobelet d'eau, c'est Dieu. » (p. 24)

Viennent le matin et l'épuisant chemin de croix jusqu'au Golgotha. Viennent les moqueries et les crachats. Viennent les mains et les pieds cloués au bois dur de la croix. Viennent les derniers regards échangés avec sa mère et Marie-Madeleine. Et après les derniers sévices, la mort enfin. « Pour éprouver la soif, il faut être vivant. J'ai vécu si fort que je suis mort assoiffé. C'est peut-être cela, la vie éternelle. » (p. 68) L'homme est parti, reste le Christ.

Amélie Nothomb n'oublie rien des dernières heures de Jésus. Ni les chutes sur le chemin de croix, ni les brutalités, ni les secours inattendus, ni la soif, ni la rancoeur envers Dieu. « C'est par amour envers sa création que mon père m'a livré. Trouvez-moi acte d'amour plus pervers. » (p. 47) Elle n'oublie pas non plus la descente de la croix, la mise au tombeau et la résurrection. J'aime que les femmes parlent de la Bible, parce qu'elles le font vraiment bien. Pas mieux que les hommes, mais avec une sensibilité et une intelligence différentes. J'ai déjà dit tout le bien que je pense de Sylvie Germain : lisez Les échos du silence ou Mourir un peu. Amélie Nothomb me surprend ici avec un texte profond et puissant qui change des gentilles réécritures de contes ou des réflexions sur la famille et l'identité. Je ne sais pas si Soif marque un tournant dans l'oeuvre de cette autrice, mais il est certain que j'espère que l'iconique Belge aux chapeaux extravagants poursuivra dans cette voie.
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Mea culpa, j'ai cédé aux sirènes de la Rentrée littéraire après avoir lu un extrait de Soif dans le magazine Lire.
Grand bien m'en a pris !
Truculent témoignage de 150 pages d'un Jésus terriblement humain qui s'apprête à traverser l'un des moments les plus douloureux et célèbres de sa vie : sa mort.
Tout commence lors de son procès devant Pilate, tout finit après sa mort. Entre les deux, le récit jubilatoire d'une montée au Calvaire et l'insoutenable crucifixion que Jésus considère, en gros, comme une belle connerie de son Paternel.
Quel culot de faire parler Jésus, de lui mettre en bouche et en esprit les pensées blasphématoires contre un Dieu le Père un poil pervers, d'en faire un homme omniscient sur qui le temps n'a pas prise puisqu'il cite volontiers Valéry ou Proust, puisqu'il rectifie a priori les écrits que feront de sa fin de vie certains évangélistes. Quel culot mais quel pied !
Nothomb mêle habilement humour et réflexions pertinentes sur la foi, la mort, le deuil, l'amour, et... la Soif.
Cela déplaira peut-être aux croyants qui verront là l'outrecuidance d'une autrice de se prendre pour le Fils ; cela déplaira peut-être aux "religiosophobes" qui verront là un sujet, un personnage qui n'est indubitablement pas en odeur de sainteté. Et c'est peut-être parce que ça déplaira à tous ceux-là que c'est bon.
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Je me demande bien pourquoi je ne lis pas régulièrement les romans d'Amélie ? Probablement pour de fausses raisons du genre « trop court pour moi », « roman court = roman bâclé »
Pourtant, Amélie Nothomb a tout pour me plaire : elle adore le champagne et est intarissable sur le sujet, elle détonne par son physique et ses tenues vestimentaires. Une « excentrique introvertie » !

En tous cas, je ne regrette pas d'avoir eu l'idée de lire « Soif ». Se mettre dans la peau du Christ pour exprimer son ressenti juste avant sa crucifixion, franchement chapeau !
Et je n'ai aucune leçon à donner à Amélie en matière de chapeau !

Le livre est donc écrit à la première personne. le Christ s'adresse au lecteur et nous donne sa version et son ressenti concernant sa condamnation à mort, son chemin de croix et sa crucifixion. Il évoque Marie, Marie-Madeleine, Joseph (son père adoptif), Dieu (son père). Mais également certains de ses disciples (Pierre, Simon, Judas). Il n'hésite pas à rétablir sa vérité, critiquant parfois les évangiles écrits après sa mort.

C'est à la fois érudit, drôle, sérieux et philosophique. Rien ne manque et Jésus s'adresse encore à nous une fois mort, de l'au-delà, car, le Christ ressuscité, son corps est vidé de toute substance mais son esprit est toujours là.

Moi qui suis plutôt du genre athée, je ne suis cependant pas insensible à ce qui touche aux religions et Amélie Nothomb m'a incité à d'aller sur Wikipédia afin de dépoussiérer mes connaissances assez fragiles sur certains faits bibliques dont j'ai évidement entendu parler mais que je ne maîtrise pas (les noces de Cana, les marchands du Temple etc.)

Bref, si l'on veut passer un petit moment bien agréable, « Soif » est à recommander à tous ceux qui ont soif de lecture.
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Je ne suis pas une grande fana d'Amélie Nothomb en général, à part certains de ses romans, mais je dois reconnaître qu'elle est assez forte : elle publie un roman par an depuis 1992 aux éditions Albin Michel, et il paraît qu'en réalité elle en écrit 4 annuellement mais n'en présente qu'un ! Bref, le moins que l'on puisse dire, c'est que c'est une auteure qui consacre du temps à la tâche (4 heures par jour) et pour qui écrire relève d'une discipline voire d'une hygiène de vie. Elle a, dans son passé, eu une éducation religieuse forte et a passé son agrégation de philosophie. Je précise cela car cela permet aussi de comprendre l'origine et les influences que l'on découvre dans son dernier roman, pressenti our le Goncourt : Soif.

Je suis très étonnée par les critiques négatives ou dures qui entourent Soif car pour moi, c'est vraiment l'un des meilleurs romans d'Amélie Nothomb depuis des années. Et pourtant, plus les années passent, et plus elle m'énerve ! Lorsque je l'ai entendu présenter son ouvrage à la Grande Librairie, je me rappelle m'être dit « Mouais… j'ai moyennement envie de le lire ». Mais l'idée d'écrire un livre en mettant Jésus en protagoniste principal et écrit à la première personne m'a attirée, alors j'y suis allée.

Les dix premières pages m'ont semblé particulières, difficile de lire Jésus qui pense malgré tout, même si c'est de la fiction. En plus je suis une femme qui croit donc cela m'a déroutée. Et puis cela m'a complètement embarquée, je l'ai lu en moins de temps qu'il ne faut pour le dire et j'y ai cru.

Finalement, l'histoire de Jésus, tout le monde la connaît. Il sera dénoncé par Judas et crucifié, fine, et son histoire sera instruite pendant des siècles et des siècles. Donc ce n'est pas là que se joue l'intérêt du roman. Non, ce qui est intéressant, ce sont les pensées de Jésus : ce qu'il pense du rôle que lui a confié son père, de son cheminement entre ce qu'a voulu son père (l'amour de tous etc.) et ce qui faisable une fois incarné dans un corps (car l'incarnation éloigne du concept pour la confrontation à la réalité). Ses pensées-là sont enrichissantes à titre personnel, elles posent des questions sans réponse qu'il est bon de se poser parfois. Beaucoup de réflexions intéressantes sur l'amour (le concept) et aimer (l'incarnation), la mort (le concept) et mourir (l'incarnation), mais aussi et bien sûr sur la soif (le concept) et boire (l'incarnation)…. J'ai apprécié beaucoup de passages et en ai même souligné quelques-uns, ce qui est très rare chez moi (voir ci-dessous).

Bref, un roman qui à mon sens mériterait le prix Goncourt, même si j'entends qu'il en laisse indifférent un grande partie !

Jo la Frite

• « Quand on tombe amoureux, on devient présent à un point phénoménal. Par la suite, ce n'est pas l'amour qui se dissipe, c'est la présence. Si vous voulez aimer comme au premier jour, c'est votre présence qu'il faut cultiver ».
• « Encore heureux qu'en amour, cela ne se passe pas de cette manière. C'est à cela que l'on sait si l'on est amoureux : à ce que l'on ne choisit pas. Les êtres qui ont un ego trop gros ne tombent pas amoureux parce qu'ils ne supportent pas de ne pas choisir. Ils s'éprennent d'une personne qu'ils ont sélectionnée : ce n'est pas de l'amour »
• « Les gens changent seulement si cela vient d'eux, et il est rarissime qu'ils le veuillent réellement. Neuf fois sur dix, leur désir de changement concerne les autres. "Il faut que ça change", phrase entendue ad nauseam, signifie que les gens devraient changer ».
• « C'est par amour envers sa création que mon père m'a livré. Trouvez-moi acte d'amour plus pervers ».
• « Ce que l'esprit ne comprend pas, le corps le saisit ».
• « La grande différence entre mon père et moi, c'est qu'il est amour et que moi, j'aime. Dieu dit que l'amour, c'est pour tout le monde. Moi qui aime, je vois bien qu'il est impossible d'aimer tout le monde de la même façon ».

Lien : http://coincescheznous.unblo..
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« Soif »- Amélie Nothomb

La personnalité iconoclaste de l'auteur est tout entière dans ce livre : des réflexions bouillonnantes et des questionnements que l'on rencontre peu car Amélie Nothomb n'a pas une pensée commune. le lecteur reconnaîtra bien sûr très vite que les pensées censées être celles du Christ sont en réalité le fruit des réflexions de l'auteur.

Si le récit de la dernière journée du Christ est connu de tous, le lecteur ne s'attend pas à un regard aussi religieusement incorrect mais tout-à-fait passionnant.

Le roman s'appuie sur un trépied simple en apparence : l'amour, la mort et plus original « la soif », le dernier mot du Christ sur La Croix.

La Soif :

Selon l'auteur, étancher sa soif est Dieu et ça n'est pas une métaphore : « l'amour que vous éprouvez à cet instant précis pour la gorgée, c'est Dieu. », « l'éblouissement ressenti, c'est Dieu », le reconnaître est le Christ. Retardez le moment de la jouissance, l'amour pour Dieu n'en sera que plus puissant.
Le Christ est venu pour enseigner cet élan mystique.

L'amour :
A. Nothomb fait dire au Christ que si Dieu est amour, il n'aime pas pour une raison évidente : il n'a pas de corps. La passion du Christ et de Marie-Madeleine passe par la vue, elle est extrêmement belle, la douceur du contact, le bonheur de se réveiller l'un près de l'autre.
Un très beau passage illustre cet amour très humain et sublime :
«Les lèvres de Marie-Madeleine esquissent des paroles que je n'entends pas. Comme c'est à moi qu'elle s'adresse, je vois la trajectoire dorée de ses mots se diriger vers moi. le crépitement d'étincelles dure plus longtemps que sa phrase, je reçois en pleine poitrine leur impact. Fasciné, je l'imite. Je prononce des mots inaudibles à son adresse et je les vois sortir de moi sous la forme d'un faisceau d'or et je sais qu'elle les incorpore. »

La mort
Le regard du Christ/A Nothomb sur Dieu et la crucifixion n'est pas moins original et irrévérencieux.
Elle fait dire au Christ qu'au départ l'incarnation est une idée de génie mais qu'au final c'est une bévue, un acte pervers, sadique et inutile, comparable aux vegans qui voudraient convaincre de ne plus manger de viande en immolant un agneau.
Inutile, car en quoi ce sacrifice qu'elle qualifie d'infect peut-il sauver les âmes ? Elle prête ses propos au Christ : « Comment croire que mon supplice expie quoi que ce soit ? L'infini de la souffrance n'efface en rien celle des malheureux qui l'ont endurée avant moi et qui l'endureront dans l'avenir. »

Concernant le regard du Christ/A. Nothomb sur le sacrifice, est encore plus acéré :
quel est donc le sentiment de culpabilité qui lui a fait accepter ce rôle accompagné d'aussi horribles souffrances ?
« Aime ton prochain comme toi-même » est en totale opposition à « je me hais au point de m'infliger cette atrocité ».
« L'idée même d'une expiation répugne par son absurde sadisme. » fait dire l'auteur au Christ et quel exemple pour les siècles à venir «Ce que je vis est laid et grossier... ce qui m'écrase le plus est de savoir qu'on va en parler pour des siècles et des siècles, et pas pour décrier mon sort. Aucune souffrance humaine ne fera l'objet d'une aussi colossale glorification..: »!

Avec son style rebondissant, son humour omniprésent, une apparence légère qui peut paraître superficielle, la très originale Amélie Nothomb démystifie le récit fondateur du christianisme, nous amène à nous questionner, à réfléchir sur cette religion et par conséquent sur toutes les autres.
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