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Critique de SZRAMOWO


Étienne Choulier et Stefan Meinhof, deux linguistes enseignants à La Sorbonne cherchent "l'idée" qui les sortira de leur routine d'enseignants et leur ouvrira les portes de la gloire.
Choulier, "était un professeur très peu impliqué, c'est dire qu'il parlait beaucoup mais qu'il ne s'exprimait guère."
Il y a chez eux du Bouvard et Pécuchet et le nom Meinhof fait penser à Louis-Lazare Zamenhof l'inventeur de l'Espéranto.
Ils s'isolent dans le sud de la France et lisent jusqu'à s'en donner la nausée, les idées des autres. Ils imaginent que cela va les entrainer à maîtriser le processus de création.
Une liste élogieuse de noms dans le domaine de la linguistique, Ferdinand de Saussure, Émile Benveniste, mais aussi des poètes comme Paul Valéry...
Très vite ils constatent qu'en s'imbibant des découvertes des autres ils ne parviennent pas à faire jaillir "l'idée" dont ils rêvent dans leur tête bien pleine et peut-être pas assez bien faite pour paraphraser Montaigne...
Aussi se demandent-ils, comment vient une idée et à quoi reconnait-on que c'est une idée nouvelle ?
Vaste sujet ! Ils partagent cette vision de l'idée qui s'impose d'elle même, sans effort intellectuel de celui qui la conçoit pourtant !
Bien avant l'ère du portable, ils inventent le mode avion mais subissent aussi ses inconvénients "Parce que plus on coupe les liens qui nous relient aux autres, et plus on pense à ces liens bêtement coupés."
Une leçon qui emprunte certainement à l'expérience personnelle de l'auteur qui ne rechigne ni à l'humour ni à la dérision.
"Un laborantin s'est il jamais lié d'amitié avec les souris de son laboratoire ?"
"Les hommes sont grands par ce qu'ils cherchent, et petits par ce qu'ils trouvent"
Comment une découverte influence-t-elle le monde ? Semble se demander les deux compères.
La vie continue en dépit de leur rage à découvrir, et ils oublient de vivre, abandonnant leurs contemporains à leurs tracas quotidiens. Tracas quotidiens qui ne peuvent passer pour un détail quand la guerre embrase l'Europe et le monde...
"(...) - cet après-midi de juin 1940 -, le grand linguiste avait été moins prolixe, la peur l'empêchant d'être poétique, et franchement il n'en avait pas mené large."
Pourront-ils encore dire avec Hölderlin "Mieux vaut se faire abeille et bâtir sa maison dans l'innocence, que régner avec les maîtres du monde, hurler avec les loups, gouverner avec les nations."
Le roman pose avec des airs de ne pas y toucher la question de la relation du chercheur avec la société et aussi celle de l'utilité sociale des intellectuels.
"Songez aux religieux byzantins, occupés à discuter du sexe des anges lorsque les troupes turques assiégeaient Constantinople."
Je découvre Laurent Nunez avec ce roman et je m'aperçois que sa façon d'écrire, son style sa faconde, sont assez loin de ce que m'en avait inspiré la plupart des critiques.
Un auteur résolument ancré dans la réalité des thématiques sociales actuelles et les traitant avec brio.
Je ne peux résister à citer quelques passages particulièrement drôles :
"Quand fond la neige, où va le blanc ?"
"(...) on trouve toujours quelqu'un, quelques semaines ou quelques mois plus tard, qui court plus vite que le dernier grand vainqueur de la dernière grand course !"
"Cette idée qu'il vient d'avoir, elle est si simple ! Si évidente ! L'obscurité devient au bout du compte son alliée : il se concentre et ne voit que cette trouvaille qui s'approche de lui.
Sa main se referme lentement sur elle."
À lire je vous dis !
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