Nous sommes dans le New-York survolté et désenchanté des années 30. Les répercussions de la crise de 29 sont encore bien présentes et l'alcool coule à flots malgré la prohibition.
Les conversations partent dans tous les sens, les membres de la pègre et les bourgeois parvenus courent frénétiquement et se croisent dans les speakeasies, bars clandestins, avant de s'engouffrer dans les taxis pour finir la nuit. Les classes sociales se mélangent et l'ambiance est électrique, le racisme et l'antisémitisme sont latents.
Parmi les silhouettes floues qui composent le tableau impressionniste et pointilliste du début du roman, deux d'entre elles se détachent et les ressorts de l'intrigue sont enfin posés.
Ce sont celles de Gloria Wandrous, une belle jeune femme en quête d'émancipation et à la sexualité débridée, et de Weston Liggett, cadre des beaux quartiers, marié et père de deux filles.
Les deux personnages, à la croisée des chemins, entretiennent une liaison torride mais, victime de prédations sexuelles, Gloria sera rattrapée par son passé et Weston, à la recherche de respectabilité et de conformisme social, manquera de courage.
Leur histoire démarre avec une robe déchirée et se poursuit avec le vol, par vengeance, d'un manteau de vison.
Inspiré des flappers, jeunes femmes délurées des années 20, le personnage de Gloria est magnifique. Tiraillée entre son désir de vivre à cent à l'heure et ses remords, elle ressemble au héro de
Rendez-vous à Samarra, le roman le plus célèbre de John O'Hara, aspirée comme lui dans une spirale infernale.
Ponctuée de dialogues percutants et de scènes visuelles, l'écriture de l'écrivain nous rappelle qu'il était scénariste à Hollywood.
Ce livre était intitulé Butterfield 8 à l'origine, puis Gloria dans la première version française. Dommage qu'il ait été rebaptisé
L'enfer commence avec elle.
J'attends avec impatience les autres titres de John O'Hara qui sortent aujourd'hui au compte-goutte.