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L'Arche (01/01/1918)
4.17/5   3 notes
Résumé :
Deux frères vivant dans une ferme avec leurs parents sont à un tournant de leur existence. Leur amour pour la même jeune fille et une déclaration d'amour vont changer la donne, et c'est toute leur vie qui prendra un tour très différend de leurs rêves de jeunesse.
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Première pièce longue d'O'Neill a avoir été traduite en français, Derrière l'horizon n'est pourtant pas la première des pièces longues du dramaturge. Mais elle serait en fait la première de ses pièces longues qu'il n'ait pas "reniée" (je cite ses traducteurs français Jacqueline Autrusseau et Maurice Goldring) ; il en avait commis quatre autres entre 1914 et 1916. Écrite en 1918, c'est aussi la première de ses pièces à avoir été publiée et elle lui a permis à la fois d'accéder à Broadway et de gagner le prix Pulitzer dans la catégorie Théâtre.


Je n'en suis pas à ma première rencontre avec O'Neill, je commence à être pas mal habituée à la noirceur de ses premières pièces, et pourtant, là, j'ai craqué ; j'ai été déprimée comme rarement après une lecture. Il existe certes des moments de la vie où l'on est plus à fleur de peau, plus vulnérable qu'à d'autres périodes, mais je ne suis pas certaine que ce genre d'explication suffise à expliquer mon malaise. Il me semble que, malgré ma fréquentation assidue d'O'Neill ces derniers mois, la brièveté de ses autres pièces - du moins pour celles à l'ambiance la plus prégnante - me permettait de souffler juste à temps. Or, ici, le désespoir s'étire en longueur, non seulement sur le papier, mais aussi de par la chronologie de la pièce.


Robert et Andrew Mayo, deux frères très unis d'une vingtaine d'années, vivent avec leurs parents dans la ferme familiale, Robert étant revenu il y a quelques temps de l'Université. Il n'a pas poursuivi ses études parce que ses parents n'ont que des moyens financiers très limités, et parce que pour leur père, ça ne vaut rien ; il n'existe d'ailleurs selon lui qu'une seule vie quand on est un Mayo : celle d'agriculteur. Il est entendu cependant pour tout le monde que Robert ne vaut pas grand-chose pour les travaux de la ferme, tandis qu'il est entendu de la même façon qu'Andrew est fait pour ça. Robert rêve d'ailleurs, d'autre chose, Andrew a les pieds solidement ancrés sur terre. La pièce démarre sur un jour décisif, Robert devant s'embarquer le lendemain avec son oncle pour devenir marin au moins pendant quelques années. Mais les deux frères sont pris dans un triangle amoureux, étant tous les deux épris de Kate, leur voisine depuis toujours. Or, sur une déclaration d'amour désespérée à Kate de la part De Robert, qui la croit amoureuse d'Andrew, tout bascule. L'amour de Robert est réciproque, le jeune homme a donc une raison pour ne plus être aussi pressé de s'embarquer - bien que toujours porteur de rêves, d'une volonté d'aller voir au-delà de l'horizon de tous les jours - , et Kate le presse naturellement de rester avec elle. de là, la situation se renverse complètement : le mariage que tout le monde prévoyait entre Kate et Andrew va devenir celui de Kate et Robert, Robert décide de rester travailler à la ferme, et Andrew, poussé par le chagrin, décide d'embarquer à la place de son frère, ce qui lui vaut (attention, la tragédie antique va pointer le bout de son nez !) la malédiction pure et simple de son père, qui lui interdit de jamais revenir dans sa maison. Huit ans vont s'écouler à partir de ce jour fatidique.


On a curieusement reproché à O'Neill d'avoir alterné systématiquement les scènes d'extérieur et les scènes d'intérieur, ce qu'a justifié O'Neill ainsi : "C'est de cette façon que j'ai essayé de créer un rythme, de montrer l'alternance du désir et de la frustration." On n'aurait pu être plus explicite, ni plus convaincant, et c'est tout le théâtre passé et futur d'O'Neill qui se révèle dans cette seule phrase. Et on aurait difficilement pu être plus efficace qu'avec cette construction toute en symétrie et en alternance, qui utilise le décor de la manière la plus juste, la transformant en espace mental. L'extérieur, c'est la route près de la ferme, la colline herbeuse où on se laisse aller, où un enfant joue librement, où la mer est visible. C'est l'espoir, les rêves de jeunesse, les sentiments qui se dévoilent, un idéal encore vaguement à portée de main, et le dernier souffle de vie, le lâcher-prise final. L'intérieur, c'est la maison des Mayo dont on peut observer la dégradation au fil des ans. C'est le lieu de l'enfermement, de la vie étriquée, des regrets, de la lassitude, de l'amertume, et de la mort qui va hanter la pièce.


O'Neill a composé trois actes, avec une première ellipse de trois ans, puis une autre de cinq ans. Après chaque ellipse le décor intérieur s'est assombri, le manque d'argent se fait de plus en plus pressant, la famille sombre davantage, et, pour parfaire le tableau, on apprend à chaque fois qu'un personnage - ou deux - est mort, ou se meurt. On a beau aller respirer à l'air libre, on sait bien qu'on va devoir retourner à l'intérieur, on sait bien que la désagrégation est inéluctable. O'Neill fait planer sur ses personnages comme une fatalité qui les étreint. Ont-ils effectué les mauvais choix ? C'est ce qu'il semblerait à première vue, mais pourquoi ces choix seraient-ils inéluctables ? de plus, du côté des personnages et des lecteurs, on peut retourner les choses comme on veut, il semblerait qu'aucun choix ne soit le bon.


Une chape de plomb descend lentement mais sûrement sur toute la pièce, qui écrase de la manière la plus impitoyable les rêves de jeunesse des trois personnages principaux, le destin les piétinant sans merci. Ceci pendant trois actes. Bien qu'O'Neill leur accorde, malgré tout, comme une respiration ultime (je ne sais pas comment appeler ça)... C'est affreux, c'est terrible, c'est d'une tristesse... Et c'est une réussite théâtrale sur tous les plans : décors, utilisation de la lumière, psychologie des personnages, construction des actes, tout est pensé et écrit pour atteindre à une effroyable efficacité dramaturgique.



Challenge Théâtre 2020
Challenge Nobel
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Pièce dramatique de l'écrivain américain Eugene O'Neill, prix Nobel de littérature 1936.

J'ai retrouvé dans cette pièce en trois actes toute l'intensité dramatique que j'avais perçue dans Long Day's Journey Into Night. C'est à nouveau les liens familiaux qui sont mis à l'épreuve dans ce huis-clos qui se déroule dans une ferme américaine. Les dialogues incisifs et réalistes reflètent le grand talent de l'auteur.

Deux frères qui s'entendent bien, Andrew et Robert, vont se séparer et vivre des vies opposées et différentes de ce qu'ils avaient imaginé quand Robert avoue son amour à Ruth, la jeune fille qu'Andrew désire. C'est donc Robert qui restera à la ferme avec Ruth, alors qu'il n'y connaît rien, tandis qu'Andrew, fermier dans l'âme, s'en va courir le monde contre la volonté de son père.

A partir de là, tout va mal pour Robert et Ruth et on assiste, impuissants, à leurs malheurs, leurs disputes, leurs endettements, leurs rancoeurs l'un envers l'autre et leur espoir que tout reprendra comme avant quand, enfin, Andrew reviendra.

Mais malgré son envie de leur venir en aide, Andrew a d'autres projets, et la ferme continuera à péricliter. Robert tombera gravement malade, Ruth finit en dépression profonde après le décès de son enfant. Quand finalement Andrew revient, c'est pour assister à la mort de son frère qu'il a toujours aimé, alors qu'il n'a plus de sentiment pour Ruth depuis longtemps.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
ANDREW. Tu vas me manquer, plus qu'à n'importe qui, j'ai l'impression. Je me rappelle, l'avant-dernier hiver, quand tu étais à l'Université, comme je la trouvais vide, notre vieille maison. Et encore, tu venais de temps en temps à l'époque. Tandis que cette fois...
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Video de Eugene O'Neill (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Eugene O'Neill
The Iceman Cometh, film réalisé par John Frankenheimer en 1973, d'après une pièce de théâtre écrite par Eugene O'Neill en 1939. Bande-annonce
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