Les dessins sont magnifiques, c'était un plaisir de tourner les pages pour les découvrir.
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Il y a indéniablement de bonnes planches, des dialogues très naturels présentés dans des phylactères flottants, mais l’omniprésence du doute voire de la dépression de l’artiste, si elle a le mérite de représenter « la vérité », ne sert pas la force vitale du récit.
Lire la critique sur le site : BoDoi
Pourquoi le lire ? Pour le sens que la bédéiste tire de l’absurde ou du banal – les nombreuses scènes du quotidien, par exemple, s’insèrent avec justesse dans la discussion. Pour les confessions parfois étonnantes, jamais complaisantes, des artistes interviewés.
Lire la critique sur le site : Chatelaine
— Maman ? Tu pleures, maman ?
— Billie !?! Qu'est-ce que tu fais debout, ma cocotte ? Tu dormais tout à l'heure…
— Pourquoi tu pleures ?
— Je ne pleure pas, ma chouette.
— Oui tu pleurais, je t'ai entendue… C'est le film ?
— Oui, c'est le film…
— Pourquoi ils crient ?
— Parce qu'une vague géante a noyé leur navette…
— C'est ça qui te faisait pleurer ?
— Je pense que c'est la trame sonore. Des fois, ils en font trop.
— Ah. Je suis certaine qu'un chien ça empêche d'être triste pendant les films !
— Bel essai, mais non.
— Ah. Alors est-ce que je peux regarder le reste avec toi ?
— Non cocotte.
— Mais maman, j'ai pas d'école demain !
— C'est vrai. OK alors.
— Yééé ! Je t'aime, maman.
— Moi aussi, Billie.
— Comme producteur, tu as travaillé avec des dizaines d'artistes... Tu as dû développer une sorte d'instinct pour déceler les bons, non ? Mettons que tu en as un devant toi, tu dois pouvoir reconnaître facilement s'il a du talent ?
— Je n'ai jamais développé d'instinct pour déceler si la personne devant moi était un « vrai » ou un « bon » artiste…
— Dommage…
— Ce que j'ai développé au fil des ans, c'est la capacité de savoir assez rapidement si je suis devant quelqu'un que je peux aider, avec qui je pourrais bien travailler. Pour mon travail de producteur, j'aime utiliser l'analogie de la sage-femme. L'idée, c'est d'aider le film à sortir du réalisateur.
— Ça me rappelle mon accouchement.
— Quand le réalisateur vient te voir, il faut d'abord vérifier s'il est vraiment enceinte, et où il en est de sa gestation.
— Eh bien moi, j'étais enceinte de neuf mois, mes contractions avaient commencé. Mais je ne criais pas. Ils devaient me trouver calme…
— Parfois, des réalisateurs, des auteurs, des artistes viennent te voir mais n'ont pas véritablement besoin de ta contribution pour sortir le bébé.
— Dès que la douleur a commencé, j'ai réclamé la péridurale. Ils ne me l'ont jamais donnée. « Plus tard, quand t'auras mal pour de vrai », qu'ils disaient. Quand ils ont compris que j'avais mal pour de vrai, deux heures plus tard, j'accouchais déjà. J'aurais été mieux avec une sage-femme…
— Il y a aussi des gens qui dénigrent l'écriture au « je »…
— Ça n'a pas de sens pour moi inventer un personnage romanesque qui me ressemble vaguement…
— Ah ça, tu peux faire un film porno avec un bon directeur photo, on dira que c'est du grand Art. Mais parler de ton accouchement, de tes larmes ou de ta cellulite, ils appellent ça de « l'intime », en sous-entendant que ce n'est pas de l'art, ou que ça a moins de valeur…
Alors moi, ce que je leur balance…
… c'est que le privé…
… c'est politique.
POW
— TABARNAK ! QUELQU'UN A PÉTÉ LE SAC DE BALLOUNES !
— Ça les déstabilise, et après on peut parler de contenu. Tiens, tu peux aussi citer Hannah Arendt, ça les aide à te considérer.
— Pense à Deleuze et Kraus, qui peuvent également donner un coup de main. Il faut persévérer mais on peut finir par te prendre au sérieux.
— Merci les filles, je note.
— Peu importe le genre, on écrit ce qu'on a besoin d'écrire…
— Oui… fais le livre que tu as besoin de faire, c'est ce qui compte…