M/T et l'histoire des merveilles de la forêt. Cet étrange et irréel univers est pourtant presque véridique. le narrateur (Kenzaburô Ôé lui-même) raconte son village natal tel que le lui racontait sa grand-mère quand il était très petit, les aînés des environs, et sa mère plus tard. Une histoire remplie de légendes mais aux accents de vérité. Quand on dit que la réalité dépasse parfois la fiction… Ou bien les mythes se mélangent avec. Dans tous les cas, un monde fascinant. Un amateur (et connaisseur) de l'écrivain Kenzaburô Ôé reconnaitront quelques éléments de sa vie. Sa naissance dans un village au coeur d'une forêt, juste avant la Seconde Guerre mondiale, la naissance de son fils handicapé qui deviendra compositeur, etc. Une autobiographie ? Un legs ? La clé pour comprendre son oeuvre unique, tant de la littérature japonaise que mondiale ?
Dans tous les cas, est-ce que j'ai aimé ? Oui, non, souvent, parfois. Cette étrange histoire m'a laissé perplexe plus d'une fois. Un début prometteur, qui « mettait en scène » un décor idyllique, campagnard, propice à la magie de la nature et aux apparitions de créatures fantastiques qui ont bercé l'enfance. D'ailleurs, assez rapidement, l'auteur-narrateur introduit la géante Oshikomé ou le guerrier légendaire Meisuké. C'est qu'on remonte loin, jusqu'à la fondation du village par l'ingénieuse Oobaa et « le destructeur » ainsi que leurs compagnons.
Malheureusement (ou heureusement, selon les goûts), ces légendes sont difficiles à résumer tellement elles sont complexes et éclatées en nombreuses actions secondaires et considérations philosophiques, sociales ou autres. Sans oublier les passages qui mettent en vedette l'auteur-narrateur, qui débutent, finissent ou même entrecoupent les différents chapitres. Et il y a souvent des parralèlles à faire entre les deux trames.
Aussi, cet entremêlement est présenté d'une manière qui me semblait étrange, comme si Ôé passait du coq à l'âne. Par exemple, au début du chapitre 17, il annonce la mort de son père peu de temps après celle de sa grand-mère. Je me serais attendu à plus de détails mais non (est-ce si trivial ?), il passe à l'incident du « nid des vandoises ». J'allais l'accuser d'incohérence – grand mal m'en aurait pris ! – avant de saisir qu'il s'agissait d'une technique. du moins, c'est ce que je crois. N'empêche, ça ne rend pas la lecture plus facile. Ça aura au moins l'avantage de forcer le lecteur à être attentif, à relaxer et à se laisser raconter l'histoire au lieu d'essayer d'échafauder des dizaines d'hypothèses pour donner un sens à cet univers magique. Certaines choses sont ainsi faites et il n'y a pas d'explications à trouver, ou bien ces explications doivent attendre.
En effet, plus on avance dans la lecture, plus on se rend compte qu'on a affaire à un esprit classique (certains diraient borné) et que l'auteur-narrateur nous ramène invariablement à son histoire première et au message qu'il veut transmettre. D'ailleurs, pour être complètement honnête, je le cherche toujours, ce message. J'ai quelques idées, évidemment, mais je crois que je suis encore en train de « digérer » ce roman.