Avec sa couverture déjà déstabilisante par le regard étonnamment plein d'effroi de l'héroïne, ce tome m'a surprise et déstabilisée aussi. L'autrice s'y essaie au soap avec un succès étonnant et j'ai encore adoré les évolutions qu'elle nous propose dans cette narration toujours aussi subtile.
Mari Okazaki, c'est avant tout une grande artiste et elle le montre encore ici. Elle joue avec les métaphores une fois de plus ici, que ce soit avec celles liées à la nature, à l'eau ou encore plus surprenant à la nourriture. Et malgré cette variété et ce décalage parfois, c'est d'une rare poésie et d'une grande force. J'ai adoré la puissance de sa narration ici où de nombreux silences en disent long sur les sentiments profonds des personnages, mais également où des échanges chaotiques inattendus qui ont une ambiance soap font puissamment réfléchir.
On enchaîne ainsi des instantanés du quotidien de Kaoru avec des scènes de tension vraiment nécessaires pour faire évoluer le récit et j'ai adoré les deux ! J'ai été touchée par le chapitre d'ouverture sur la place du repas dans la relation de Kaoru et de Yagai avec un rappel des exigences des emplois du temps de chacun et avec la bienveillance que chacun montre vis-à-vis du bien-être de l'autre, le tout avec une jolie virée au marché de Tsukiji dont on sent toute la vie. C'était surprenant de voir ça ici mais magique !
Mais les vraies évolutions ont lieu ensuite avec toujours un beau mélange entre quotidien anecdotique et moment phare pour faire avancer les choses. Ainsi, lors d'un barbecue improvisé, une dispute éclate et permet à Shiro d'avouer enfin ses sentiments. C'est totalement ubuesque, très drôle aussi avec une mise en scène vraiment piquante et percutante de l'autrice, qui s'inspire avec talent et humour des soaps, et fait en sorte que Shiro en prenne sérieusement pour son grade, mais c'est aussi totalement nécessaire tant on ne pouvait en rester là. Ça fait de la peine pour lui d'un côté mais en même vu ce qu'il fait subir à cette pauvre Iku, avec qui il sort en en aimant une autre, il le mérite bien aussi.
Mari Okazaki nous fait à nouveau les portraits de femmes fortes dans ce tome. Kaoru a appris à prendre soin d'elle et du Dr Yagai. Elle s'épanouit dans leur relation et dans ses deux jobs. Iku, elle, tire enfin les choses au clair et ose enfin rabrouer ce crétin de Shiro. Quant à la nouvelle collègue de Kaoru, Konno, elle réalise enfin avec quel pauvre type elle sort, après un dernier coup bas de sa part et elle en ressort grandie. J'ai adoré le chapitre lui étant consacré, qui croque avec honnêteté et cocasserie une femme qui s'est sentie flattée qu'on s'intéresse à elle parce qu'elle se dévalorisait, qui a ainsi accepté beaucoup de choses, mais qui finit par reprendre le contrôle. C'était jouissif ! On aimerait qu'il en soit de même pour Kaoru au vu des dernières images qui nous laisse sur un terrible cliffhanger en rapport à sa relation avec Yagai.
Ainsi dans ce tome, j'ai été surprise de lire des chapitres parfois quasiment indépendant, tels des épisodes de sitcom où l'autrice se plaisait à mettre encore plus en scène le quotidien de ses personnages. Que ce soit l'épisode sur l'importance de bien manger pour les héros, celui sur la déclaration au barbecue, celui sur cette femme trop amoureuse qui accepte tout, ou celui sur une potentielle révélation forte concernant le couple phare, on sent que l'autrice s'amuse et creuse à la fois ses personnages pour nous amener vers le final de sa série.
J'ai à nouveau été fascinée par sa narration et la puissance de ses cadrages, ses portraits, ses métaphores qui en disent tellement long sur ce qui ronge chacun et sur ce qu'il recherche dans sa relation de couple. Cette absence de texte à plusieurs reprises m'a frappée dans le bon sens et obligée à m'interroger encore plus sur le sens de ce qu'elle voulait raconter et à m'attarder encore plus sur ses sublimes dessins. C'était du pur bonheur.
Maintenant, j'ai été très émue par cette relation Yagai-Kaoru que je sens de plus en plus fusionnelle mais aussi de plus en plus familière et naturelle malgré sa fragilité. C'est un éphémère que j'ai tellement envie de voir durer et en même temps Kaoru mérite tellement aussi de s'épanouir et de s'affirmer comme ses collègues femmes dans cette série, que j'espère que l'autrice lui en laissera l'opportunité en trouvant le bon équilibre. Plus qu'un tome pour voir si ce sera le cas !
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