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EAN : 9782810009176
688 pages
L'artilleur (30/10/2019)
2.83/5   3 notes
Résumé :
Le 22 juin 1994, le Conseil de sécurité de l'ONU autorise par la résolution 929 le déploiement d'une force multinationale sous commandement français au Zaïre et au Rwanda pour mettre en sécurité les personnes en danger au Rwanda. Or, depuis plus de vingt ans, journalistes, membres d'ONG, chercheurs et surtout le régime du Rwanda accusent la France d'avoir participé à la préparation puis à l'exécution du génocide. Un officier français reprend d'ailleurs les mêmes ac... >Voir plus
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En 2019, le journaliste et essayiste Charles Onana fait paraître Rwanda, la vérité sur l'opération Turquoise : quand les archives parlent enfin (L'Artilleur). Dans cet ouvrage, il est intéressant de constater que Charles Onana est l'un de ces personnages prolixes dans l'espace médiatique qui utilisent l'opération Turquoise comme un outil permettant de contrer, à l'instar d'autres historiens, une version falsifiée des événements communément rapportée.

Très logiquement il procède à une contextualisation historique des événements car ce qui se passa dans les années 1990 ne fut que le plus récent épisode d'une lutte immémoriale entre Hutus et Tutsis. Considérer la « tragédie rwandaise » avec les « lunettes du génocide » reviendrait ainsi à occulter « l'essentiel ». Un « essentiel » que Charles Onana entend replacer au coeur du récit en réintégrant dans celui-ci la conquête militaire du pouvoir menée par le FPR, les massacres de civils hutus auxquels ses troupes se livrèrent, l'exode massif de populations qu'elles provoquèrent, l'assassinat, le 6 avril 1994, du président Habyarimana et la reprise immédiate des hostilités par la rébellion.

Quant à la stratégie de communication déployée par l'organisation politico-militaire, elle est un élément non moins « essentiel » que l'auteur entend réintégrer au centre de l'analyse. Une fois ces éléments pris en compte une double évidence se fait jour : les tueries qui dévastèrent le Rwanda furent le fait des deux parties en conflit et, surtout, c'est le FPR qui fut manifestement, au regard d'un décorticage des faits, le véritable « responsable et planificateur » du génocide parce qu'il initia et poursuivit l'affrontement quoiqu'il arrive.

Il est alors aisé prendre la mesure de l'efficacité de la « campagne de diversion et de dissimulation » menée par le FPR en direction des médias et des organisations non gouvernementales. L'organisation s'attacha à imposer l'idée que le Gouvernement intérimaire rwandais (GIR), mis en place après l'attentat du 6 avril 1994, avait entrepris dans tout le pays un génocide contre la composante tutsie de la population. L'efficacité de cette intense action de lobbying fut telle que, sous l'effet de la charge émotionnelle, la qualification de génocide appliquée au massacre des Tutsis fut considérée par tous, Nations unies y compris, comme une évidence.

Le « génocide » et sa planification ayant envahi tout l'espace médiatique et social, ajoute l'auteur, une « chape de plomb » fut posée sur les massacres commis par le FPR contre les populations hutues. Ces crimes devinrent « invisibles ».

Il ne s'agissait pas seulement pour le FPR, écrit Charles Onana, d'occulter sa véritable nature et de détourner les regards des multiples crimes contre l'humanité qu'il perpétrait. Il fallait également dissimuler un complot ourdi par la rébellion et ses alliés occidentaux, dont les États-Unis : un plan d'invasion du Zaïre destiné à assurer à ceux-ci, en échange de leur soutien, le contrôle des ressources minières du Kivu. L'exode de quelque deux millions de Rwandais au mois de juin 1994 aurait ainsi été partie intégrante de la stratégie du FPR bien en amont du génocide : l'encerclement de la population à partir du nord et de l'est du pays provoquant sa fuite massive au Zaïre devait créer le prétexte qui serait invoqué par la suite pour une invasion programmée.

Selon Charles Onana, l'« escroquerie » au génocide eut une ultime fonction. Dès l'annonce de l'opération Turquoise, le FPR entama, rappelle-t-il, une virulente campagne médiatique accusant Paris de vouloir secourir les forces génocidaires et empêcher sa victoire. Diaboliser l'initiative française au moyen de l'accusation de complicité de génocide visait à empêcher le déploiement de troupes qui allaient constituer un obstacle sur la route de la rébellion vers le pouvoir. Lorsque ces troupes furent finalement déployées, et le commandement de Turquoise installé à Goma, porte d'entrée du Zaïre, il fallut tenter de neutraliser par le discrédit une force qui gênait l'afflux programmé de Rwandais dans ce pays.

La presse américaine, puis la presse française, accuse l'auteur, relayèrent la campagne du FPR, taisant son rôle dans la montée des tensions ainsi que ses crimes. Les médias français firent alliance avec les rebelles, ouvrant leurs colonnes à leurs thèses. Rédigés sans distance critique, sous l'emprise de l'émotion, s'exonérant de toute exigence déontologique, démontrant une méconnaissance totale de l'histoire politique du Rwanda, de nombreux articles accusèrent la France de complicité de génocide.

Tout ce dont l'opération Turquoise fut alors accusée, est en réalité dépourvu de fondement. Aucun document, aucune enquête ou témoignage crédible ne corroborent des allégations que, du reste, les faits démentent. Comment penser sérieusement, résume l'auteurl, que Paris, ayant entrepris une action de relations publiques visant à restaurer l'image de la France, ayant d'autre part pris le soin de faire accompagner à cet effet l'opération de nombreux journalistes, aurait pu délibérément se compromettre avec un gouvernement et des forces que tout le monde accusait de génocide ? de fait, conclut-il, aucun journaliste présent, aucune des organisations humanitaires présentes ne rendit compte, s'agissant de l'action de Turquoise, d'un appui aux Forces armées rwandaises (FAR) ou d'une esquisse d'entrave à la victoire du FPR.

Charles Onana a réalisé un travail appuyé sur dix années de travail scientifique, passées à interroger des témoins-clés et à « scruter » des hectomètres d'archives. Certes, le lecteur quelque peu familier du sujet n'apprendra que peu sur l'intervention des troupes françaises, car l'ensemble de l'argumentaire que déploie l'auteur est rebattu depuis des années dans de multiples écrits. Mais en revanche, il permet de mettre en exergue les politiques de déformation de l'Histoire que le monde connaît depuis près d'une centaine d'année, de saisie de nos capacités d'analyse individuelle au nom d'une bienpensance manoeuvrière visant au « tout blanc ou tout noir ». Au sacre du vainqueur qui, même aujourd'hui, conserve des ambitions régionales hégémonistes.

L'auteur me parait faire preuve de beaucoup de discernement lorsqu'il rappelle que « Certes, les Tutsis sont massacrés, ciblés, mais ils ne sont pas les seuls », les massacres « ont concerné toutes les ethnies », Tutsis, Hutus et Twas confondus, et « il n'est pas non plus prouvé » que les premiers furent les plus décimés. Selon Charles Onana, le printemps 1994 au Rwanda vit deux forces armées s'affronter pour la domination du Rwanda, affrontement qui s'accompagna de massacres massifs de civils tutsis, hutus et twas. D'ailleurs, je pose la question : Que sont aujourd'hui devenus ces derniers ?

Le seul point qui m'a relativement déplu est le caractère assez itératif de certaines démonstrations qui rend lassant une partie de la lecture de ce document de valeur.
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Mais bien sûr.
Comme chacun le sait, les Tutsis se sont auto-genocides dans le seul but de saboter le processus de paix et d'embêter les Hutus et accessoirement le gouvernement français de l'époque.
Péan a déjà écrit à peu près la même chose
Malheureusement ce négationnisme là n'est pas puni par la loi.
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Vidéo de Charles Onana
Charles Onana dans l'émission le nouveau Monde avec Vincent Hervouët. Il évoque son livre sur l'attentat du 6 avril 1994 au Rwanda "Enquêtes sur un attentat, 25 ans d'investigations pour un non-lieu"
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