Ce pin solitaire, combien de siècles a-t-il vécus ?
Le vent qu'on y entend est si pur qu'il suggère la profondeur du temps.
Ichihara no Ôkimi ( milieu du VIIIe siècle )
Dans leur science du temps les fleurs des
champs d'automne
Ont toutes le parfum des rayons de la lune
Jien ( 1155-1225 )
Même chez soi, la vie part à la dérive et sur les vagues
Nous flottons sans savoir où nous allons
Anonyme ( Manyôshû - Recueil des dix mille feuilles )
Ce monde est-il rêve ? Réalité ?
Réalité ou rêve, je ne sais, puisque étant, il n'est pas.
Anonyme ( Kokinshû - Recueil de jadis et naguère )
Le vent du printemps disperse les fleurs de mon rêve
Éveillé mon coeur en tremble encore
Le moine Saigyô
Mais c'est précisément parce que notre époque est incertaine qu'on peut dire que l'espérance en la poésie est devenue plus grande. C'est que l'homme est un être doué de langage. Il vit par lui, en lui, il est sa chair même. Et s'il est vrai que le langage soit le seul ciment susceptible de constituer une histoire ou d'édifier une société, la poésie, dont la raison d'être est de retrouver la source même des mots, n'a pas de plus forte raison de ressusciter qu'aux époques les plus troubles.
ÔOKA Makoto, extrait de la préface
Sur une douce pierre dormons
Colline de fleurs
Inbe Rotsû ( 1651-1739)
La brume du soir se noue au fond de mon coeur
Et l'automne comme moi s'avance vers l'hiver.
Shikishi Naishinnô
Dans la plaine enneigée où toute herbe s'abolit
Le héron blanc s'est enfoui dans sa propre apparence
fuyukusa mo mienu yukino no shirasagi wa
ono ga sugata ni mi o kakushikeri
Sansho Dôei ("Poésie de la Voie bouddhique du Pin Parasol"), DÔGEN (1200-1253)
Au coeur du silence
Escargot de rivière dans l'eau pure
Yosa Buson