Le narrateur, qui reste innomé, est professeur de philosophie à Bâle, spécialiste de
Spinoza, "Heureux homme qui avez trouvé avec votre polisseur de verre une tâche pour votre vie entière!". Il consacre sa réflexion à la liberté et au libre arbitre.
Mais la vie réelle, c'est autre chose que la pensée philosophique : indécis et procrastineur, ne voulant ni heurter ni blesser, il n'est pas homme à dire non cruellement et se laisse envahir par un inconnu, une soiré d'abord, puis des semaines quand ce coucou s'installe dans sa vie, dans son appartement, dans son lit...C'est un engrenage mortifère aussi improbable qu'infernal, mais on sait bien que la vie est improbable (et parfois infernale). Jusqu'à ce que
Spinoza se remette à parler en lui (en effet wikipedia nous explique que selon
Spinoza L'homme libre n'a donc aucun concept du bien et du mal )
Cela peut se lire au premier degré comme une thriller psychologique, un huis clos palpitant très habilement mené, guidé par la seule emprise d'un homme sur un autre ; jusqu'où va -t'il aller?
Karl-Heinz Ott pousse le bouchon juste à le limité de l'admissible : c'est parfaitement plausible mais quand même ahurissant, ce philosophe érudit qui n'est qu'une chiffe molle à qui on a envie de botter les fesses. On sent la jouissance de l'auteur à toujours frôler l'excessif dans un crescendo maléfique.
Mais bien évidemment,
Karl-Heinz Ott ne se place pas sous l'égide de
Spinoza pour rien. Derrière la narration pragmatique; il y a un roman philosophique, un anti-Bartleby (ce héros melvillien qui dit non à tout alors que le héros (ou anti-héros) ici ne dit non à rien...) une réflexion, finalement glaçante, sur l'équilibre du pouvoir.