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3,72

sur 141 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Plus que de souvenirs d'enfance et de jeunesse, il s'agit d'une réflexion passionnante sur la formation d'une personnalité, en l'occurence de chercheuse et d'historienne. L'auteur divise son livre en trois parties : dans "L'école de la Bretagne", elle raconte son enfance auprès de sa mère institutrice et de sa grand-mère attachée aux traditions et et à la langue bretonnes, dans la dévotion d'un père mort précocement (l'enfant n'avait que 4 ans), militant de la cause indépendantiste bretonne, mais sans se rattacher au nationalisme sulfureux d'un Roparz Hémon. La bibliothèque du père disparu alimente ses premières lectures et la nourrit de ses légendes celtiques. Mais il faut aussi compter avec l'école "du diable" (= laïque) où vit la famille et où Mona fera ses études primaires. Puis vient "L'école de l'Eglise", avec tous son lot de rites et de croyances et la gêne de devoir arbitrer entre les mondes laïque et catholique, ce dernier largement dominant en Bretagne. Enfin dans "L'école de la République" Mona Ozouf raconte ses études secondaires et supérieures, où elle a clairement choisi la République une et indivisible, ce qui l'amène à une réflexion passionnante sur la dialectique entre particularisme et État central, entre communautarisme et valeurs républicaines, qu'elle, l'historienne de la Révolution, rattache à l'opposition entre Girondins et Jacobins.

Un livre très intéressant, par la sincérité des souvenirs et des réminiscences personnelles, mais aussi par la volonté d'élever le débat et de faire un choix difficile entre appartenance particulière et inclusion dans un État unificateur. Avec beaucoup d'honnêteté intellectuelle, Mona Ozouf admet les apports du communautarisme (défense des minorités, des femmes, etc.) même si son choix final est celui de la République et du français, liens communs de tous des citoyens unis par une même devise. Une belle écriture contribue à enrichir le livre et à en rendre attrayante la lecture.
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Un livre épatant !! Un bonheur de lecture !! Une présentation de la Bretagne telle que chacun d'entre nous a pu la vivre et la ressentir, au moins en partie. Ainsi lorsqu'elle décrit la ferme de son arrière grand-mère : "pièce unique, allée de terre battue entre les lits clos, chétive fenêtre à laquelle la table rectangulaire s'appuyait par son bout étroit, à demi masquée de surcroît par une mauve arborescente [...] qui achevait d'assombrir la scène, même au fort de l'été." Cette ferme "dont la tristesse frappait" la mère de l'auteur quand, petite-fille, elle rendait visite à ses grands-parents. A part peut-être la terre battue, dont je ne me souviens pas, c'est la maison de mes arrières grands-parents qui est décrite là. La tristesse non plus ne fait pas partie de mes souvenirs, plutôt le plaisir d'une journée à la campagne, d'une nuit passée à compter les coups de l'horloge à laquelle était accollé le lit dans lequel nous dormions, dans cette unique petite pièce."
La troisième partie de l'ouvrage présente l'intérêt de l'auteur pour la Révolution Française, comment cet intérêt est né de son histoire personnelle. Elle présente également une réflexion sur des questions de société, ramenées à son histoire personnelle, à l'histoire de la république, à celle de la France depuis la Révolution.
En plus du contenu, l'écriture de Mona Ozouf est un vrai plaisir.
Pour ceux qui aiment l'écriture, L Histoire et la Bretagne, plongez-vous y à pieds joints, c'est un régal !!
Lien : http://itzamna.over-blog.fr/..
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De quoi se constitue la République. Qu'est-ce que l'intégration au sens républicain. Comment les particularismes écrivent aussi l'histoire de ladite institution républicaine, qui s'en défend. Comment et pourquoi une jeune fille bretonne, orpheline d'un père enseignant indépendantiste et élevée par sa mère institutrice laïque, et une grand-mère bretonnante et dévote devient-elle historienne. Passionnante historiobiographie, si on m'autorise ce néologisme.
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Débutant comme le récit des souvenirs de l'enfance bretonne de la petite Mona, le récit devient insensiblement la réflexion d'une philosophe sur l'identité de la France à partir de sa trajectoire intellectuelle de fille de militants bretons anticléricaux devenue spécialiste de la révolution française et de l'histoire de l'éducation ("La république des instituteurs", coécrit avec son mari Jacques Ozouf) entre l'héritage familial et celui de l'école française.

Le père de Mona meurt très jeune. Sa mère, institutrice doit l'élever seule, aidée par sa propre mère dans les années 30. La petite Mona grandit entre l'école française, la culture bretonne seule admise à la maison et la religion chrétienne. Elle est imprégnée de la littérature bretonne et de ses légendes avant de découvrir les lettres françaises. Elle plonge dans la bibliothèque bretonne de son père, figure tutélaire toujours présente.
De cette enfance partagée, Mona fait le fondement d'une vision personnelle de la question de l'unité nationale, dans sa version française centralisatrice et parfois excluante, et de la diversité culturelle.

La fin de l'ouvrage présente une réflexion sur la Révolution française et les différentes conceptions de la république qui se sont affrontées : opposant la version jacobine d'une communauté soudée dans une unité émotionnelle qui impose sa vision du centre vers la périphérie et la version des "brissotins" moins unanimistes, voyant en la diversité une chance d'équilibre qui se construit du bas vers le haut. Elle souligne que cette république complexe n'avait pas une chance : "Des temps aussi troublés appelaient la rapidité de la décision et la volonté héroïque des hommes, non les méandres de la délibération et les calculs de la raison."

Elle se poursuit par une analyse de la politique de Jules Ferry, comme assouplissement du modèle jacobin.

Puis nous retrouvons le temps présent et la discussion sur les communautés, la crainte de "balkanisation" en "communautés juxtaposées".

"Toutes ces interrogations peuvent être ramenées à une question essentielle, celle même que j'avais trouvée entre école et maison : faut-il penser qu'entre l'obligation d'appartenir et la revendication d'indépendance nulle négociation ne peut s'ouvrir? qu'entre les attaches et la liberté, il y a une invincible incompatibilité? L'interrogation est d'autant plus insistante qu'en réalité chacun de nous abrite en lui l'une et l'autre de ces exigences."

Le jugement est clair sur les "pourfendeurs du communautarisme".

"A les en croire, le moi qui se laisse enfermer dans ses fidélités et sa mémoire singulières et fasciner par ses origines est non seulement fermé à l'universel, mais doit renoncer aussi à l'authenticité, à la conquête de son "vrai" moi. le corollaire de cette sentence est que la seule voie pour accéder à la liberté consiste à se dégager de ses appartenances"

Et plus loin critiquant cette conception
"La fidélité aux êtres qu'on aime, la pratique d'une langue, l'entretien d'une mémoire, le goût pour les couleurs d'un paysage familier ou la forme d'une ville, autant de servitudes.... elle voit dans toute détermination une limite et un manque."

Pour autant, l'auteur ne sombre pas dans le relativisme absolu où tout aurait la même valeur, la liberté étant le principe non négociable.

Inévitablement la réflexion se poursuit par la question de la parité, du port du voile à l'école et des langues régionales. Concernant le port du voile, Mona Ozouf a évolué : d'abord favorable à laisser les jeunes filles le porter, en se référant à la manière dont Jules ferry avait réglé le problème de la croix à l'école c'est à dire en prenant le temps et en veillant à ne pas heurter, elle a fini par considérer que ce signe particulier là n'était pas seulement un signe religieux librement choisi mais la marque de l'inégalité et de la privation de liberté de celles qui y seraient contraintes par leur entourage.

Une lecture qui m'a beaucoup intéressée mais le sous-titre " retour sur une enfance bretonne" prête un peu à confusion sur ce qu'on va y trouver.
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L'école, la maison, l'Eglise : de ces trois cercles et dans ces trois cercles, une petite fille orpheline de son père doit faire la synthèse. Père militant breton disparu trop tôt, ambiance survoltée des années 30, question de la diversité : un ferment idéologique particulièrement riche.
Mona Ozouf, à l'écriture fluide, excelle à décrire le quotidien de Plouha. Son parcours professionnel l'amènera à scruter la période révolutionnaire. La deuxième partie de son ouvrage revient sur ce sujet et constitue d'ailleurs une synthèse intéressante.
A noter que les toutes premières pages sont consacrées à son questionnement sur l'identité : ce thème colore tout l'ouvrage et plonge ses réflexions dans les racines mêmes de notre histoire. "Composition française" est aussi une "leçon française" et universelle sur la tolérance.
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Durant l'été, j'ai regardé un Replay de la Saison passée de la Grande Librairie à laquelle participait Mona Azouf. Faire connaissance avec cet auteur d'origine Bretonne s'imposait. J'ai pris à la bibliothèque le seule livre qu'il avait :
COMPOSITION FRANÇAISE, retour sur une enfance bretonne. Et quelle découverte ! j'allais de surprises en suprise!
L'avant-propos, je suis en phase avec se qu'elle dit de l'identité Bretonne toujours vivante malgré son annexion à la monarchie (mariage d'Anne de Bretagne). L'essai de nivellement, puis la République : le jacobinisme mot toujours employé pour nommer le pouvoir centralisé.dans
Mais lorsque je commence l'autobiographie. J'ai l'impression qu'elle raconte une partie importante de ma vie. Elle est née, à quelques années de différences, sur les bords de l'Aber Benoît (chacune sa rive ). puis elle est partie à Plouha et ensuite au lycée à Saint Brieuc, ville que j'habite depuis 1980.
Dans la première partie de la "composition française" de ce qu'elle a vécu, j'ai aussi vécu beaucoup d'épisodes similaires. Une grand mère ne parlant que breton à qui je répondais en français,des maisons tournant le dos à la mer(vent) ,le sol en terre battue,le matriarcat Breton n'est pas une légende. Je ne vais pas relever toutes les similitudes ou je copie une grande partie du livre.
La deuxième partie est plus théorique.on sent sa veine d'historienne et je me retrouve aussi dans son récit. Ce n'est pas celui d'une extrémiste. Mais revendique la double identité celle de la République Française et son identité Bretonne :son amour, sa sensibilité, sa langue.
L'autobiographie avait pour moi un peu de la Madeleine de Proust!. Je l'ai trouvé agréable à lire avec ses expressions bretonnes. Mais je suis de partie pris. Je le conseille vivement et lui met 5 étoiles sans hésiter.
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La maison, l'école, l'église : ces lieux s'entremêlent ou s'opposent dans la Bretagne natale de l'historienne. Trois endroits qui ont forgé la pensée, l'identité et les appartenances de Mona Ozouf. Entre écrit scientifique et biographie, Mona Ozouf reconsidère "l'austère commandement qui invite les historiens à s'absenter, autant que faire se peut, de l'histoire qu'ils écrivent", elle est ensuite "determinée, toute réflexion faite, à le transgresser". Tant mieux pour le lecteur ! C'est passionnant et j'ai beaucoup appris.
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