« le cadavre il est entouré d'un sang pas tout à fait sec. (…) Elle est nue et blanche la morte. (…)Ses cheveux ils sont rouges. Et au-dessus de son machin ils sont rouges aussi les cheveux. (…)Je suis revenu la voir le lendemain soir. »
En lisant les premières lignes de l'
Elastique nègre, on comprend que Jimmy pourrait aller au-devant de gros ennuis. Il a déjà du mal avec la syntaxe, alors qu'adviendra-t-il de lui lorsque le lieutenant-colonel Gardé, gendarme corse, « Esclave blanc d'une petite-fille d'esclave noire. », va l'interroger ?
Pour l'heure, il est tranquille, le vieil Aymé, père de Justice, le militant maoïste tué par la police en 1967, est suspecté par la gendarmerie : « Privé de rhum, Aymé est sorti de son mutisme, il a livré un nom, « Tyrolien », et un lieu, « l'Assainissement ».
Dans l'
Elastique nègre,
Stéphane Pair assemble plusieurs ingrédients pour en faire un plat épicé et goûteux : La Guadeloupe, le meurtre d'une femme blanche, d'anciens maoïstes, un gendarme corse marié à une femme noire, « des Mozart du crack » et une usine à camés : « Dans mon sac à dos, j'ai compté soixante-quinze Kinder. Direction La Havane, le squat, retrouver les toxicos et livrer ma ration de surprises à ces merdes. » ; la haine entre indigènes et métros, le Vaudou : « À mes pieds, des cartes à jouer, quelques plumes et un poulet éventré du bec au croupion. le tout est assemblé là, juste devant la porte d'entrée, en une petite pyramide de chair et de papier. »…il ne reste plus qu'à allumer la mèche.
Premier roman de
Stéphane Pair, l'
Elastique nègre est construit comme un puzzle, les points de vue des personnages alternent, chacun présente sa version des choses dans un style qui lui est propre.
Aristide dit Vegeta, le grossiste, a du mal avec ses « employés » : « Je lui raccroche au nez parce que j'en ai vraiment marre de ce connard. Bokit n'entend pas ce qu'on lui dit. Il est plus vieux que moi mais c'est un putain d'amateur. »
« Tavares « Fat » Newton, le baron bahaméen dont personne ne doit connaître le nom ici-bas (…) » est confronté à un management difficile :
— 15 heures. On avait dit 15 heures, répond tranquillement Tavares. On change rien. Inutile d'appeler tout le temps. 15 heures à l'îlet, reprend Tavares
Gardé le gendarme Corse est prisonnier de son passé : « Il est des choses dont chacun pourra s'amuser mais, pour ma part, j'ai toujours accordé une place aux superstitions. Je tiens cela de ma grand-mère corse, Irenea, qui me semblait toujours vivre en sursis d'un mauvais coup du sort. »
Aymé, ne s'est jamais remis de l'assassinat de son fils Justice : « Bien obligé de plier. Il faut certainement calmer le serpent alors je lui demande :
— Pourquoi m'enlever mon fils, chair d'assassins que vous êtes. Hein, monsieur ? Dis-moi ça ? »
L'enquête se poursuit, distillant les informations, et emprunte très vite la piste du trafic de crack. Mais est-ce bien la raison du meurtre ?
Stéphane Pair ne tranche pas, en journaliste consciencieux, il expose différent points de vue et nous laisse juge de la conclusion.
Un roman qui se lit avec plaisir
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