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Critique de PedroPanRabbit


Après trois tomes qui semblent constituer une véritable trilogie, voilà que Pamela L.Travers rempile avec une quatrième aventure de Mary Poppins. Encore ? Les enfants seraient-ils devenus si désobéissants, ou Mary Poppins deviendrait-elle tellement nécessaire à la famille Banks que la maisonnée ne puisse plus tourner sans elle ? Admettons. Mais comment l'auteure va-t-elle justifier d'un énième retour de la nurse alors qu'une boucle semblait définitivement bouclée ?

Eh bien elle ne le fait pas, tout simplement ! le roman, constitué de cinq chapitres, ne raconte pas dans quelles conditions Mary Poppins revient au 17 de l'allée des cerisiers ou comment elle le quitte en fin de volume : elle ne part pas, elle n'arrive pas, elle est là, c'est tout. L'explication ? Ces cinq historiettes (car on rappelle que chez P.L.Travers, les chapitres constituent chacun une mini-intrigue qui se suffit à elle-même) sont en fait des chapitres inutilisés issus des manuscrits initiaux du Retour de Mary Poppins et des Bonnes idées de Mary Poppins.

Supprimés par l'éditeur ou simplement mis de côté par l'auteure, on ne saura jamais lequel des deux a véritablement relégué ces chapitres au tiroir et lequel les en a sortis. On peut néanmoins subodorer que l'idée de ce volume aux allures de spin off vient du premier, probablement pour des visées purement commerciales (les lecteurs réclament encore du Mary Poppins mais l'auteure n'ayant pas encore écrit ni même prévu un nouveau tome, on les satisfait avec une compilation de chapitres inédits – quelque chose qui fonctionnerait encore très bien de nos jours!).

Malheureusement, un tel procédé, s'il a ses avantages, a aussi ses défauts. Parmi les avantages, on imagine le succès en librairie lors de la sortie de ce quatrième tome probablement inespéré (rappelons tout de même que la publication des six tomes de la série – voire huit ou neuf si on compte Mary Poppins in the kitchen, Mary Poppins from A to Z ou encore Stories from Mary Poppins, trois ouvrages qui ne sont pas tout à fait des romans composant le « canon » mais plutôt des ouvrages dérivés – s'est étalée de 1934 à 1988!). Aussi, on peut concéder que ces quelques chapitres permettent de confirmer ce qu'on supposait déjà des pouvoirs de Mary Poppins.

C'est tout particulièrement le cas pour le chapitre 4, malgré sa longueur interminable : Jane et Michael lisent un conte mettant en scène trois princes et le laissent ouvert à une page illustrée représentant les trois personnages, eux-mêmes face à un livre ouvert à une page enluminée du dessin de deux enfants. La magie opère quelques minutes plus tard : les princes sortent du conte et leur univers se confronte de plein fouet à celui de l'Allée des Cerisiers, où la licorne qui les accompagne provoque un certain... effet de masse. Les trois princes sont ravis de rencontrer Jane et Michael, qu'ils disent être les personnages du livre qu'ils étaient en train de lire, tandis que Jane et Michael, eux, soutiennent que ce sont les trois princes qui viennent de leur histoire favorite. de plus, la discussion entre les princes et Mary Poppins semblent induire qu'ils se connaissent et qu'elle aurait également été leur nounou... le tout vient confirmer que la nurse a donc bien le pouvoir d'ouvrir des passages entre les mondes et, surtout, de passer de l'un à l'autre. En outre, ce n'est pas la première fois que Mary Poppins donne vie à des personnages de fiction (même si, cette fois, on ne sait plus très bien qui relève de la fiction et qui serait le véritable lecteur, une situation là encore très « Lewis Carrollienne ») et que le discours de Pamela Travers sur la littérature et ses effets transparaît à travers son texte : elle vient ici rappeler le pouvoir immuable des livres et des contes ancestraux.

le tout dernier chapitre est également une excellente surprise et renvoie aux inspirations mystiques et païennes chères à l'auteure : intitulé « La nuit de la Toussaint », il se déroule bien évidemment le soir du 31 octobre et nous plonge dans une atmosphère de mystères et de légendes très bien restituée. Pas de fantômes, certes, mais on retrouve Mrs Corry et ses filles (les vendeuses de pains d'épices du premier tome, aussi croisées lors des adieux à Mary Poppins dans le troisième volume), Mrs Corry étant le personnage qui se rapproche le plus de la bonne sorcière (ou de la fée-marraine de contes) traditionnelle. Elle et Mary Poppins conduisent une cavalcade d'ombres qui, le soir d'Halloween, se détachent de leur propriétaires pour aller danser au parc de l'Allée des Cerisiers. En outre, ce qui est dit sur les ombres dans ce chapitre n'est pas sans rappeler ce qu'en raconte James Barrie dans son Peter Pan, qui était l'un des ouvrages favoris de Pamela L.Travers...

Parmi les gros défauts de ce quatrième volume qui n'en est pas vraiment un, on ne peut que regretter l'absence de trame : s'il y en avait déjà assez peu dans les trois premiers volumes, des liens pouvaient néanmoins se tisser de chapitre en chapitre au fur et à mesure, et les allées et venues de Mary Poppins suggéraient tout de même une certaine chronologie. Ici, le seul semblant de lien existant est celui qui donne son nom au titre, en français mais surtout en version originale : Mary Poppins in the park, puisque tous les chapitres se déroulent essentiellement pendant les sorties et balades au parc en face de la maison Banks, théâtre des mésaventures de cet ouvrage.

de plus, si ce livre vient confirmer certaines suppositions quant aux pouvoirs de Mary Poppins, il ne nous apprend guère voire pas du tout d'informations supplémentaires sur la célèbre et toujours aussi énigmatique nounou. Même, les chapitres que l'on sent bien calqués sur les schémas qu'affectionnent P.L.Travers commencent à nous lasser, et ne nous restent que quelques passages bien écrits pour compenser de l'ensemble.
Lien : https://books-tea-pie.blogsp..
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