AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4,13

sur 124 notes
5
13 avis
4
14 avis
3
1 avis
2
0 avis
1
3 avis

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
DE L'INFÂME SURGIT LE LYS.

Que peut-il arriver de pire, lorsque vous êtes jeune, beau, déjà charismatique, que la vie semble devoir vous offrir un avenir tout tracé à la tête du Royaume de France - rien moins, puisque vous avez déjà été couronné par la volonté de votre imposant papounet, Louis VI le gros, faisant de vous, non seulement son bras droit direct et son successeur désigné (le futur Philippe II) mais, plus encore, un roi "désigné" tout à fait officiel bien que la place ne pourra être définitivement acquise qu'à la mort de ce cher gros papa ? Quoi ? Et bien, c'est le pire qu'il va vous arriver, pauvre Philippe : Vos pas, ou pour être plus exact, vos sabots en décideront autrement. Parce que, n'est-ce pas, lorsqu'on est de la très haute, un Prince du sang, on ne s'abaisse pas à se balader dans les rues crasseuse de votre capitale à ras la terre. Ça, c'est bon pour le bourgeois ou le petit peuple. Non, vous, votre moyen de transport préféré, c'est le cheval. Seulement, un cheval, ça s'effraie d'un rien, c'est même tellement dangereux, lorsqu'on y pense, que pas mal de vos collègues Rois, princes, ducs et autres chevaliers en sont déjà morts, de ces fichus accidents de cheval. Mais cette fois, que voulez-vous, le destin, les Divinité, le sort, le hasard, Dieu en personne ! allez savoir, étaient contre vous : c'est un malheureux cochon, un cochon "gyrovague" (c'est à dire n'appartenant à personne en particulier, errant, vagabond) comme il en existe des centaines dans ces ruelles étroites et souvent couvertes d'immondices du Paris de l'époque qui aura votre peau. C'est ce simple cochon domestique, qualifié à l'époque de diabolique ("diabolicus"), qui dévier votre malheureux destrier de sa course, le faisant basculer, et vous avec. Vous mourrez après quelques longues heures d'agonie, entouré des vôtres, dans la demeure proche où l'on vous avait transporté.

Votre destinée en aura donc été, définitivement, bouleversée et abrégée. Et avec vous, le destin du Royaume de France et surtout de l'encore jeune dynastie capétienne. L'Infamie - avec un très grand I -s'est en effet posée sur cette lignée relativement récente (Louis VI n'est que le cinquième roi capétien), car si mourir à la chasse dans un combat à mort contre un cochon sauvage (on dirait un sanglier aujourd'hui) est considéré comme digne, honorable, glorieuse même , il n'en va pas du tout de même pour les pourceaux qui traînent encore un peu partout dans les rues parisiennes (à noter qu'ils en seront définitivement interdit de séjour à la suite de cet événement. On peut le comprendre) et qui sont considérés comme des bêtes certes utiles mais viles, sales, se nourrissant, comme on le sait déjà, de tout et de n'importe quoi, de détritus particulièrement (d'où leur relative utilité dans des rues sans système de tout à l'égout...). Et puis, depuis la bible, le cochon, c'est la bête impure, l'animal dont la viande est supposée colporter toutes sortes de maladies, etc.

D'abord, de ce qui pourrait n'être qu'un banal fait divers, va surgir un imprévu de taille : le roi à venir ne sera pas celui prévu au départ et même préparé pour le boulot, mais son jeune frère, le futur Louis VII, bien plus investi par sa future place au sein de l'Eglise qu'à monter sur le trône, qui va pourtant devoir s'y coller. Mais avant même d'y songer, il va falloir de toute urgence laver la tragique souillure faite à la Dynastie. Louis VI étant trop défait par cette mort prématurée, c'est son principal conseiller, le très intelligent abbé Suger qui va se charger de l'essentiel. Il va "expédier" l'enterrement du défunt afin que nul n'ait trop le temps de s'arrêter sur les causes accidentelles, il va accélérer le sacre de Louis VII comme "roi désigné" à la fois pour des motifs politiques mais aussi pour des raisons que l'on pourrait, aujourd'hui, qualifier de magiques : «Le saint Chrême contre la sanie porcine !» explique avec un brin de provocation Michel Pastoureau.

Et nous n'en sommes qu'au début car, au-delà des contingences politiques, sociales, économiques, culturelles, une bonne part des années que Suger à encore à vivre, de même qu'un certains nombre d'actes symboliques du jeune roi Louis VII, le futur époux malheureux d'Alinéor d'Aquitaine, seront de faire disparaître cette fameuse et intolérable ignominie !

Louis VI et ses conseillers (Suger, Bernard de Clairvaux) agissent sans tarder pour laver cette mort qui pourrait être considérée comme un acte divin… Dieu punirait-il par-là les Capétiens ? Ceux-ci ont-ils trop péché ? Il est vrai qu'ils ont souvent eu maille à partir avec l'Eglise et la papauté (plusieurs ont d'ailleurs été excommuniés)… Nous sommes à une époque où le pouvoir de l'Eglise se renforce considérablement et réussit à imposer ses systèmes de valeurs qui rentrent bien souvent en conflit avec les usages antérieurs. Pastoureau, comme toujours, explore ces bouleversements et il est passionnant de constater jusqu'à quel point ils furent profonds, que ce soit de manière directe ou symbolique. La partie consacrée à la corpulence des rois est à cet égard fort révélatrice ; c'est aussi à ce moment que l'ours est détrôné de sa place de roi des animaux (principalement par le Cerf, bien plus en phase avec l'idéal chrétien et ses vertues)… Voir à ce propos un autre fantastique ouvrage de Michel Pastoureau : L'Ours, histoire d'un roi déchu.

Devant se racheter et se rapprocher de Dieu pour effacer la souillure qui les tache, Louis VI et son successeur (son fils, Louis VII) utiliseront tous les moyens possibles pour retrouver les grâces divines et renforcer la légitimité de leur pouvoir. Selon l'hypothèse de l'auteur, c'est ce qui aurait amené la dynastie capétienne à l'adoption de deux symboles fondamentaux comme emblèmes royaux, et qui, pour tous encore aujourd'hui, sont les deux emblèmes les plus lisibles, les plus évident de la royauté française : le lis marial et le bleu céleste.

Pastoureau revient en détail sur l'histoire symbolique de ces deux emblèmes qui ont la particularité de symboliser la pureté et de se rattacher à la Vierge. Sous le patronage de la mère du Christ, la monarchie française pouvait se différencier des autres, marquer son avance, même, car il ne faut pas oublier que c'est vers cette époque que le culte marial va prendre une ampleur jamais atteinte jusque-là. L'abbé Suger et Bernard de Clairvaux ne sont d'ailleurs pas étrangers à cette investissement fort auprès de la Vierge. Suger se fait représenter à ses côtés dans cet écrin de la royauté qu'est "sa" Basilique St Denis. Quant à Bernard, «il entretien avec la Vierge des relations privilégiées», nous explique Michel Pastoureau. Mieux, «elle est pour lui le modèle absolu de la pureté, une sorte de lis immaculé qu'il célèbre dans plusieurs sermons, spécialement ceux qu'il prononce à l'occasion des grandes fêtes mariales et ceux, remarquables, qu'il consacre au Cantique des Cantique.»

C'est presque à la manière d'une véritable enquête de police que le grand historien, paléologue, héraldiste et médiéviste Michel Pastoureau nous embarque, toutes affaires cessantes, dans ce 12ème siècle à la fois tellement éloigné de nous et pourtant absolument fascinant. Mais il n'oublie pas, au passage, que nous sommes fait, même de loin, de cette histoire ancienne et c'est souvent avec une certaine joviale tendresse qu'il nous met face à ces autres nous-mêmes que nous avons été il y a plus de huit cents longues années. C'est passionnant, c'est plein de détails aussi sérieux qu'ils peuvent parfois s'avérer croustillants, étonnant : saviez-vous, par exemple, que les animaux avaient alors droit à de véritables procès, en bonne et due forme ? Car si ces temps souvent jugés, à tort, "sombre", "rétrograde","barbares", sont en effet bien différent des nôtres, ils pourraient nous en rapprendre sur pas mal de choses. Et si nos animaux à plumes ou à poils n'avaient déjà, selon l'Eglise, pas d'âme, les gens de ces heures lointaines leur attribuaient cependant une forme de libre-arbitre et de responsabilité que nous sommes seulement sur le point de leur redécouvrir aujourd'hui. Ainsi, un animal pouvait-il être jugé à l'égal d'un humain, être défendu par un homme de loi, être acquitté tout aussi bien que condamné, tout comme un humain.

Ainsi, le roi tué par un cochon fourmille-t-il de petites histoires au sein de la grande, affrontant gaillardement tout un lot d'idées reçues souvent stupides mais dont nous avons, pour beaucoup, hérité du XVIIIème (qui avait en horreur ces temps "gothiques", terme d'ailleurs créé à la Renaissance, pour moquer l'art, à nouveau "barbare", de ces époques) et si cela commença à s'arranger au XIXème, ce ne fut malheureusement pas sans son lot d'images d'Epinal, de contre-vérités ("les gens ne se lavaient pas", "tout le monde mourrait avant quarante ans", etc), d'idées reçues qui perdurent malheureusement jusqu'à aujourd'hui.

Inutile d'ajouter combien nous apprécions l'histoire lorsqu'elle est ainsi expliquée - plus que "racontée" comme il est trop souvent coutume de le faire dans des éditions historiques destinées à un large public. Michel Pastoureau, et de plus en plus de brillants collègues, prenant le parti de l'intelligence et de la curiosité de leurs lecteurs, sont en train de corriger cette tendance un peu trop lourde des années passées, et c'est heureux ! La compréhension de notre Histoire ne peut qu'y gagner.
Commenter  J’apprécie          260

Tiens, un roi de France tué par un cochon, je ne me souviens pas de ça. Eh bien si ! Au XIIe siècle. Mais il faut dire que si Philippe a bien été sacré et associé au trône par son père Louis VI le Gros, comme celui-ci l'avait été par son propre père Philippe 1er, il n'a jamais régné personnellement et on ne le trouve pas dans les listes de Rois de France. D'ailleurs le successeur de son frère Louis VII, s'appellera Philippe II (Auguste). Encore, nous explique l'auteur, que ce point ne soit pas si simple.
Le récit de cet évènement pourrait tenir en quelques pages, mais Michel Pastoureau est entre autres historien de la symbolique. Il nous explique donc très en détail pourquoi cette mort fût infamante pour la dynastie capétienne et les efforts qui furent fournis pour effacer cette tache. Mais aussi comment interpréter les témoignages des contemporains. Et encore comment cet événement dans une période de transformation de la société aboutit à l'adoption par la royauté de la fleur de lis et du bleu, tous deux symboles de pureté et précédemment apanages de la mère du Christ. Ceci avec le concours de Suger et de Bernard de Clairvaux animés par des motifs différents. L'auteur termine avec un passage sur les procès d'animaux, thème déjà traité ailleurs.

Il a l'honnêteté de dire que l'origine dans la mort honteuse du roi Philippe, des armoiries de la monarchie française, d'azur semé de fleur de lis et plus généralement l'adoption du bleu comme symbole de la France, reste une hypothèse qui reste à confirmer.

Pastoureau est toujours agréable à lire et les redites impriment bien les notions dans l'esprit.
Commenter  J’apprécie          250
Qui donc sait que si les sportifs français sont habillés de bleu, que si le bleu est devenu la couleur de la France, c'est parce que c'est d'abord la couleur de la Vierge Marie, reine de France?
Il fallut adopter le bleu et la fleur de Lys, rien de moins pour laver la mort infâme d'un roi tué par un porcus diabolicus, un cochon gyrovague, qui provoqua la chute de cheval du jeune roi Philippe II en 1131.

Un récit tout à fait passionnant en un peu plus de 240 pages.

A noter que cette collection Histoire au format de poche des éditions Points est très agréable à lire, la papier est doux et l'impression de qualité.
Commenter  J’apprécie          140
Parfaitement accessible et absolument passionnant. L'accident du 13 octobre 1131 : l'héritier du trône Philippe qui tombe de cheval à cause d'un "porcus diabolicus " girovague qui se serait égaré dans les pattes de son cheval. A partir de ce fait divers, peu reconnu comme fait historique, Michel Pastoureau nous démêle avec brio et une facilité de lecture et de présentation époustouflantes toutes les conséquences. Notamment : les fleurs de lis, le bleu qui seront choisis pour les armoiries royales et plus encore. Abordez le comme un polar ! Les amoureux de l'histoire vont se régaler.
Commenter  J’apprécie          80
Je croyais lire un roman, et en fait, absolument pas, c'est un essai. Et du coup une très bonne surprise, contre toute attente !

Alors Michel Pastoureau nous parle de Louis VI, et de son fils, Philippe, destiné à devenir Roi à la mort de son père. En fait, qui est déjà Roi, et j'ai découvert avec surprise qu'en ces temps là, le Roi suivant était sacré du vivant de son père, on devenait roi par apprentissage en quelque sorte !

Au passage, Louis VI étant surnommé Louis VI le Gros, on apprend des choses sur l'obésité à cette époque et aussi sur les précautions à prendre quand on lit les descriptions des personnalités de cette époque.

Bref, le propos essentiel de Michel Pastoureau est la mort infâmante de Philippe, tué par un porc domestique, et il explique en quoi cette mort est odieuse, et expose les conséquences qui en ont découlé en termes de tentatives de purification pour la dynastie. France, fille aînée de l'Eglise, par exemple.

Et au passage, on en apprend sur la place du porc, celle du sanglier, d l'ours, de la chasse, de l'abbé Suger de la fleur de lis et du poids sur les épaules de Louis VII, petit frère de Philippe qui n'était pas préparé à être roi... Et qui aura un règne calamiteux... C'est lui qui a épousé Aliénor d'Aquitaine, à la place de son frère, donc, et qui sait, si Philippe avait été en vie, peut-être n'y aurait-il pas eu ce divorce qui a plongé la France et l'Angleterre dans la tristement célèbre guerre de cent ans...

Bref, un essai aussi palpitant qu'un roman !
Commenter  J’apprécie          52
L'érudition de Michel Pastoureau n'est plus à établir, pas plus que sa connaissance de l'Histoire. Dans ce bouquin absolument passionnant, il démontre comment ce qui peut paraître un simple fait divers a eu des conséquences énormes sur les siècles qui l'ont suivi.
Le 13 juillet 1131, un jeune homme fit une grave chute de cheval, sa monture ayant été gênée par un cochon, et il en mourut. Ce jeune homme était le prince Philippe, fils du roi Louis VI, et héritier du trône, déjà couronné comme il était de coutume.
L'auteur nous entraîne vraiment très loin dans la compréhension de cet événement, à commencer par ce qui est sans doute le plus difficile : se mettre dans le contexte de l'époque. Il est en effet quasi impossible pour nous de concevoir ce que pouvait représenter la mort d'un futur roi au XIIe siècle, dans de telles circonstances, à savoir l'intervention d'un animal considéré vil, donc envoyé par le diable. Une large partie du livre est consacrée à ceci, et c'est vraiment très intéressant. Il faut saisir ce qu'était le quotidien de ces gens, non seulement ceux de la très haute noblesse, mais également le petit peuple, et l'influence de la religion, etc. Nous pouvons aussi comparer différentes descriptions de l'accident, certaines faites peu après, d'autres bien plus tard, rédigées ou non par des témoins de la scène ou des proches du roi, mettant l'accent sur tel ou tel point et en ignorant d'autres.
Nous découvrons les conséquences de cet accident. En premier lieu, bien sûr, ce n'est pas le jeune Philippe qui a succédé à son père, mais son frère Louis. Celui-ci, beaucoup moins brillant et beaucoup moins préparé à ce destin, était surtout bien moins motivé pour tenir le rôle de souverain, puisqu'il se destinait à la religion. Les nombreuses erreurs commises par Louis durant son règne n'auraient sans doute pas été faites par son aîné s'il avait pris place sur le trône. Ce qui aurait dû être une période faste, emmenée par un roi que tous appréciaient est devenu une étape difficile entachée de malheurs, autant pour le monarque involontaire que pour ses sujets.
N'oublions pas le principal acteur du drame, le cochon. Que représentait un cochon à cette époque ? Comment l'image de cet animal a-t-elle été influencée par cette tragédie au cours des siècles ultérieurs ? de fil en aiguille, l'auteur nous entraîne vers une relecture de tout ce qui a suivi, jusqu'à la fleur de lys et la couleur bleue adoptée plus tard par la royauté, qui auraient leurs raisons d'être dans ce qui s'est passé ce funeste jour.
J'ai très vite été happé par ces explications extrêmement complètes, parfaitement limpides et très aisément abordables, portées par une langue d'une grande richesse.
Commenter  J’apprécie          50
Porcus diabolicus. Octobre 1131. Le jeune Philippe, 15 ans, déjà sacré roi, fils du roi Louis VI, meurt de façon infâme : tué par un cochon. Dans les rues de Paris alors qu'il est à cheval, voici que surgit un cochon qui se jette dans les pattes du cheval. Philippe chute, sa tête heurte le sol et voici le cours de l'histoire changé. En effet, ce sera Louis VII, son jeune frère, davantage tourné vers la religion que vers la royauté terrestre qui devra régner. 

Michel Pastoureau nous livre ici avec clarté la place du cochon dans les civilisations au cours de l'histoire, la naissance du lis comme attribut de la vierge puis comme emblème du roi de France, la place du bleu dans notre civilisation.

J'ai vraiment beaucoup aimé ce livre qui nous apprend tant de choses sur notre histoire et sur certains symboles. Je vais lire les yeux fermés les livres du même auteur sur les couleurs et viendrai vous en parler
Commenter  J’apprécie          51
Voici l'histoire d'un fait divers qui bouleversa le cours de l'histoire de la dynastie capétienne...le jeune roi Philippe, fils aîné de Louis VI, est tué lors d'un accident de cheval causé par un "cochon gyrovague" dans les rues de Paris en 1131... histoire de la famille capétienne, armoiries, justice médiévale avec le procès d'animaux, histoire de l'adoption des fleurs de lys et du bleu comme emblèmes royaux....Michel Pastoureau analyse tous ces domaines et nous livre une magistrale étude sur cet événement méconnu de notre histoire ...
Commenter  J’apprécie          20
A la différence des grandes études sur les couleurs, ce petit ouvrage instructif et distrayant aurait pu apparaître comme secondaire mais il en est rien. A travers un fait divers d'apparence secondaire, Michel Pastoureau plonge le lecteur dans la société du XIIe siècle et dans les mythes qui entourent le cochon et les couleurs. Il développe avec brio, en faisant parler et en croisant les sources, sa thèse sur l'origine des armoiries royales. L'auteur explique avec moult détails comment la mort du roi Philippe, le 13 octobre 1131, va changer le destin d'un pays tant sur le plan historique, politique mais surtout symbolique. L'adoption du lys et de la couleur bleue, emblèmes de la Vierge, va permettre à la dynastie capétienne d'effacer le souvenir de cette mort infâme qui entache la monarchie française. le lecteur familier des ouvrages de l'auteur retrouve ici tous les thèmes chers à cet historien spécialisé dans la symbolique des couleurs et des animaux, l'héraldique ou bien encore le rapport entre l'homme et l'animal.

Sans surprise, les propos de l'auteur sont aussi agréables à écouter qu'à lire. L'érudition de l'auteur parfois agrémentée d'une touche d'humour nous entraîne tout au long du livre audio sans nous lasser tant celle-ci est intelligemment mise au profit d'une clarté du récit et de son accessibilité à tous. En bref, passionnant !

Ce livre audio a été écouté dans le cadre de Masse Critique Babelio. L'écriture de Michel Pastoureau en chapitres courts se prête particulièrement bien à l'écoute. Merci à Babelio et aux éditions « le livre qui parle » pour cette découverte des livres audio. Je n'hésiterai pas à tenter de nouveau l'expérience.
Commenter  J’apprécie          10
Tout l'argument du livre tient en un mot : cochon. Ce cochon aurait souillé d'une manière infamante toute la royauté et sa descendance.
C'est l'hypothèse de Michel Pastoureau qui le mène à la couleur bleue, à la fleur de lys et à notre drapeau.
La date : 1131. Louis VI le Gros règne, l'archevêque de Saint-Denis, Suger est le conseiller qui lui parle à l'oreille. le pape Innocent II est en route pour le royaume. Hélas, un évènement tragique vient perturber ce bel agencement. Philippe, fils aîné du roi, couronné roi aussi, pour bien asseoir la dynastie, est victime d'un accident stupide. Désarçonné par un cochon divagant (gyrovague dit-on), son cheval s'emballe, il se fracasse la tête sur une borne et meurt.
Personnellement, je trouve que Michel Pastoureau en fait un peu trop avec ce cochon qui revient dans tous les chapitres…Mais sa démonstration est sans faille. C'est Louis VII, le roi qui n'aurait pas du être roi, qui essaie d'effacer la souillure en consacrant le royaume de France à la Vierge. Et c'est l'adoption du lys et de l'azur.
La fleur de lys n'est pas nouvelle, elle est retrouvée sur des cylindres mésopotamiens, des bas-reliefs égyptiens, des poteries mycéniennes, des monnaies gauloises, des poteries sassanides…C'est un symbole de pureté, de fécondité, de souveraineté.
Le bleu, qui sera la couleur de la tenue des rois à partir du XIII°S, c'est la couleur mariale et céleste, puis monarchique, puis républicaine (les Bleus contre les Blancs pendant les guerres de Vendée) puis nationale ( la Russie a aussi un drapeau bleu blanc rouge, sauf que le bleu chez les Russes est coincé entre le blanc et le rouge, alors que chez les Français, le bleu est à côté de la hampe)
L'écu royal que l'on voit sur tous les portraits de Philippe Auguste, est d'azur, semé de fleurs de lys d'or. C'est lui qui lavera la royauté de la souillure infamante. Ainsi, on rentre dans l'intimité de toutes ces bonnes gens du XII° S (et même après) Philippe I°, Louis VI le Gros, Louis VII et Aliénor d'Aquitaine, la première croisade (calamiteuse), Philippe-Auguste, cinquième enfant mais premier fils,Louis IX (Saint Louis) petit fils de Philippe Auguste, mort à Tunis, sur la route de la 8° croisade tout aussi infructueuse, jusqu'à Philippe le Bel, qui ironie du sort, meurt d'un accident de sanglier.
Sangliers, chevaux, poules, vaches, cochons, couvées seront d'ailleurs (à partir du XIII°S) condamnés dans les tribunaux au même titre que les hérétiques, les déviants et autres sorcières…
Tout ce monde, perdu dans les tréfonds de ma mémoire a pu ressusciter et ça m'a donné un regain de jeunesse.
.

Commenter  J’apprécie          00




Lecteurs (258) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3178 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *}