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EAN : 9782081487048
302 pages
Coédition Flammarion (26/06/2019)
4.5/5   6 notes
Résumé :
"Mon ambition se bornerait à vouloir fixer quelque chose de ce qui passe. Oh, quelque chose ! La moindre des choses. Hé bien ! cette ambition-là est encore démesurée ! Une attitude de Julie, un sourire, une fleur, un fruit, une branche d'arbre, une seule de ces choses me suffirait."

Berthe Morisot, 1891
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique

Après la première rétrospective depuis 1941 de l'oeuvre de Berthe Morisot présentée en 2012 au musée Marmottan Monet, le musée d'Orsay consacre, depuis le 18 juin dernier, sa première exposition de l'été à cette femme peintre exceptionnelle : BERTHE MORISOT
L'exposition du musée d'Orsay est d'une grande richesse. Près de la moitié des oeuvres présentées proviennent de collections particulières, souvent jamais montrées au public.
Je passe devant vous. Vous me suivez…

Berthe Morisot est une des artistes majeures de l'impressionnisme. Longtemps moins connue que Monet, Renoir, Pissarro ou Sisley, elle demeure à mes yeux la plus impressionniste du groupe de ces peintres qui avait la lumière pour religion. Sa touche est spontanée, nerveuse, vibrante, la toile est souvent laissée à nu, inachevée.
Très indépendante, Berthe peignait à sa guise. Elle sera de toutes les expositions du groupe des impressionnistes, de la première en 1874 à la dernière en 1886. Elle ne manquera que la 4ème pour cause de naissance de sa fille. Longtemps seule au milieu de ses amis masculins, deux autres femmes l'a rejoindront à partir de 1879 : Marie Bracquemond et l'américaine Mary Cassatt.
Dès le début des années 1880, elle recevra les éloges des critiques et amateurs influents qui reconnaitront son originalité :
« Elle pousse le système impressionniste jusqu'à l'extrême. »… « Mademoiselle Morisot est une impressionniste si convaincue qu'elle veut peindre jusqu'au mouvement des choses inanimées. » - Arthur Baignères.
« Elle termine ses toiles en donnant de-ci de-là de légers coups de pinceaux ; c'est comme si elle effeuillait des fleurs… » - Théodore Durel.
Quel beau compliment ! le poète irlandais George Moore écrira après sa mort : « Ses toiles sont les seules toiles peintes par une femme qu'on ne pourrait détruire sans laisser un blanc, un hiatus dans l'histoire de l'art. ».

Je ne ferais pas ici une longue description de la vie de Berthe que les admirateurs de l'artiste connaissent, je préfère parler de son art et de quelques toiles représentatives à mes yeux de son oeuvre figurant dans l'exposition.
Avec les paysages, la figure féminine demeurera toute sa vie son sujet préféré. Elle trouve ses modèles autour d'elle : sa soeur Edma, sa fille Julie, son mari Eugène, ses nièces, des amies, parfois des modèles professionnels. Elle les place au milieu des meubles où elle vit ou dans la nature.

- Son modèle préféré : Sa fille Julie
« C'est un petit chat, écrit Berthe à sa soeur Edma. Elle est toute ronde comme une boule avec des petits yeux qui pétillent et une grande bouche qui grimace. »
La mère reste des heures à observer sa fille née en 1878 de son mariage avec Eugène Manet, le frère d'Edouard Manet qui peindra Berthe de nombreuses fois. « Bibi » dort ou gazouille pendant qu'elle la peint. Durant 17 ans, jusqu'au décès de Berthe, elle sera représentée à tous les âges, à tous moments de la journée. le pinceau de l'artiste a une infinie tendresse lorsqu'elle peint l'enfance.
Deux ans avant son décès, Berthe peindra « Julie au violon » : la grâce de la jeune fille est un mélange d'élégance et de volupté, avec la même sensualité réservée, la même part de mystère que sa mère exprimait à son âge.

- le seul homme qu'elle peindra : son mari Eugène
Berthe va peindre Eugène pour la première fois au cours de leur lune de miel en Angleterre, devant une fenêtre face à la mer « Eugène Manet à l'île de Wight ». de somptueux effets de transparence des voilages et de la baie vitrée sont réchauffés par de menues taches de fleurs rouges.
Plus tard, elle le peindra à nouveau avec sa fille Julie « Monsieur Manet dans le jardin de Bougival ». J'aime cette toile : scène intime entre le père et la fille, les deux amours de l'artiste. La toile est parcourue de vibrations colorées et de touches nerveuses multiples formant un ensemble de coloris roses et mauves.

- Les figures féminines sont multiples dans l'oeuvre de Berthe
Quand elle ne peint pas Julie, elle ne cesse de peindre des jeunes filles.
Elle fait poser sa soeur Edma pour « La lecture » présentée à la première exposition impressionniste de 1874. La toile est fraîche, légère, aérienne comme une aquarelle.
Dans cette même exposition du groupe impressionniste, elle présente une maternité « le berceau » d'une sensibilité toute féminine : sa soeur Edma est à nouveau représentée veillant sur sa fille Blanche.
A la 3ème exposition impressionniste de 1877, le « Bal au Moulin de la Galette » de Renoir concentre les regards. Berthe a choisi d'exposer une jeune femme qui s'habille face à un miroir « La Psyché ». Emile Zola parle de « l'une des perles de l'exposition ». La toile est frémissante, mouvante. « Berthe a l'art de faire vibrer le blanc dans toute sa pureté en le posant sur des gris légers ».
A la 5ème exposition de 1880, dans le même genre, figure « Femme à sa toilette » montrant une femme se coiffant devant sa psyché où elle se reflète. Il s'agit de ma toile préférée de l'artiste peinte dans des tons rose, gris, bleu, lavande. L'arrière plan est flou et se fond avec le dos joliment modelé laissant tomber la robe sur l'épaule gauche.
L'artiste entrera de son vivant dans un musée national avec la toile « Jeune femme en toilette de bal » achetée par l'Etat : une jeune femme pose dans un environnement végétal qui s'accorde avec l'échancrure de son corsage.
Une « Enfant au tablier rouge » est installée devant une fenêtre : Berthe balaie la fillette et le décor de traits rapides à peine esquissés laissant apparaître le fond de la toile.
Dix ans avant sont décès, Berthe fait son « Autoportrait ». Elle a 44 ans. Ses cheveux rassemblés en catogan ont blanchi. Elle se peint sans indulgence. La touche est à la fois vigoureuse et légère. La toile ressemble à une sanguine, une esquisse. L'artiste recherche l'inachèvement. Une des fleurs sur le corsage jaune est « comme une décoration » dit Mallarmé.

- Berthe peint souvent le monde qui l'environne
Avec les impressionnistes, le paysage va prendre une importance qu'il n'avait pas. L'étude de la lumière réduit le motif à un simple prétexte. Au milieu des Monet, Pissarro, Renoir… Berthe apporte une sensibilité féminine, une touche de charme, de distinction, d'élégance. « Elle est l'impressionnisme par excellence, disent des critiques ». Sa palette est claire, la touche légère, vibrante. Son pinceau effleure la toile en traits vifs.
Je cite cette toile de l'exposition « Jour d'été » qui est représentative de son art. En 1879, grimpée sur une embarcation pour peindre sur le motif, sa technique impressionniste est totale dans la représentation de ces deux femmes peintes en plein air sur une barque. le lac et les modèles sont unis de la même manière toute en zigzags et vibrations lumineuses.


Berthe Morisot était exigeante, incertaine, en proie aux doutes : « J'ai toujours la sensation du gouffre. ». L'idée passionnée qu'elle se faisait de son art lui interdisait toute facilité. Elle a laissé l'oeuvre nouvelle et singulière qu'elle avait toujours souhaité obtenir.
Avant de mourir, Berthe Morisot confiera sa fille Julie à son grand ami le poète Stéphane Mallarmé. Celui-ci gardera un culte qui lui fera chérir, toujours avec la même dévotion, la « fine au possible » Berthe Morisot ainsi que sa Julie.

« La seule femme peintre qui ait su garder la saveur de l'incomplet et du joliment inachevé. »

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Pour les personnes qui voudraient voir les tableaux dont je parle, l'article a été repris sur mon blog avec les images correspondantes.

Lien : http://www.httpsilartetaitco..
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Très beau catalogue pour une magnifique expo au Musée d'Orsay
Il faut quand même savoir que si elle fut une des avant gardistes de l'impressionnisme, elle reste la moins connue aux cotés de peintres tels que Manet, Monet, Pissaro.... et que la dernière expo qui lui fut consacrée en France remonte à 1941
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
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Plus tard, en 1890, sa carrière bien avancée, Morisot a confié dans un carnet intime resté longtemps inédit, en une phrase maintenant souvent citée : « Je ne crois pas qu’il y ait jamais eu un homme traitant une femme d’égale à égal, et c’est tout ce que j’aurais demandé, car je sais que je les vaux. »
Pour saisir la portée de la confidence, il faut la mettre en regard de la remarque de Geneviève Bréton, jeune fille de la bourgeoisie, amante du peintre Henri Regnault : « Il est très inconvenant pour une femme d’avoir plus de talent que les hommes. »
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Le plein air est indissociable chez Morisot de la peinture de la vie moderne, appelée de ses vœux par Charles Beaudelaire. Ces scènes de la vie bourgeoise du XIXe siècle reflètent certes le quotidien de l'artiste, mais elles constituent aussi des terrains d'expérimentations plastiques privilégiées, même si dans les années 1870, le plein air qui se traduit souvent chez Morisot par une lumière égale d'un temps couvert et gris, préserve souvent les contours et les formes.
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Je n'obtiendrai (mon indépendance) qu'à force de persévérance et en manifestant très ouvertement l'intention de m'émanciper.
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Ce printemps 2024, nous célébrons le 150e anniversaire de la naissance de l'impressionnisme. À cette occasion, les Matins repeignent avec vous l'histoire et l'importance de ce mouvement pictural majeur dans une émission haute en couleurs.
Pour en parler, Quentin Lafay reçoit : Fanny Girard, conservatrice du patrimoine et directrice du musée Toulouse-Lautrec d'Albi Sylvie Patry, directrice de la conservation et des collections du musée d'Orsay Cyrille Sciama, conservateur du patrimoine, directeur du Musée des impressionnismes de Giverny
Visuel de la vignette : Impression, soleil levant / Claude Monet
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