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Suite au « Miracle à la Combe aux Aspics » je suis toujours en Croatie, mais cette fois-ci dans un lieu moins pommé et avec des gens plus civilisés, le 23 septembre 1989 à Misto, une bourgade côtière non loin de Split.
Vesna, Jakob Vela et leurs jumeaux Silva et Mate de dix-sept ans dînent ensemble. Ils ne savent pas encore que c'est la dernière soirée de leur vie normale. Après le dîner, Silva habillée pour sortir leur lance « J'y vais....Allez salut. » Elle dit se rendre à une fête dans la baie, c'est la dernière fois qu'ils la verrons.
Ils croyaient jusqu'alors qu'ils menaient une vie normale, la vie d'une famille normale avec des problèmes normaux à deux balles. Ils croyaient que Silva était seulement une fille exubérante dotée d'un sacrée tempérament, qui ne faisait qu'à sa tête. Mais plus l'absence se prolonge, plus l'enquête de la disparition s'approfondit, plus ils se rendent compte que leur fille leur était une étrangère totale. Et le pire une personne disparue dans la nature, la terrible incertitude, morte, vivante ?

Le livre qui semble au premier abord un polar, dans son approche à l'événement et aux personnages liés à la victime est loin d'en être un. L'histoire intime tragique se déroule sur fond du contexte politique du pays qui commencera à chambouler à partir de 1989 avec la chute du mur de Berlin qui signe la fin du monde communiste. le pays connaît une désagrégation violente qui débutera avec l'indépendance de la Croatie le 25 juillet 1991. La famille se désagrège aussi peu à peu, évoluant dans ce paysage de violence et de misère qui s'accentue pour se terminer en guerre. Les délinquants d'hier deviennent des commandants de l'armée croate, et plus tard politiciens, comme si diriger un bataillon de guerre ou faire de la politique nécessitait la même compétence que diriger un réseau de drogues. Quand à Silva déjà majeure depuis 1990 à part sa famille, désormais plus personne ne s'en soucie .....mais nous lecteurs et lectrices , sa mère et son frère, on l'attend....

Alternant les points de vue des divers personnages directement ou indirectement liés au drame, sur fond de trente ans de l'histoire post-communiste croate, l'auteur mêle les histoires personnelles à la grande Histoire, sans jamais perdre le fils de l'intrigue. On va suivre leurs évolutions, de la chute du communisme, passant par la guerre civile puis la mondialisation, jusqu'à l'invasion touristique de la côte dalmate qui profitera largement à la nouvelle mafia capitaliste croate qui soudoie les politiciens, tout en exploitant généreusement les habitants des villes et villages côtières. J'ai aimé la prose nette, claire et sans fioritures qui s'adapte comme un gant au sujet, et la structure de l'histoire et de l'intrigue qui se déploient parallèlement sans ambiguïté, chaque chapitre se référant à un personnage lié à la disparition.
Poignant et Passionnant !
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« Je ne souhaiterais cela à personne, pense Gorki »


En cet instant de septembre 1989, à Misto, près de Split, Vesna et Jakov sont encore heureux. Jakov est assis à table, plongé dans ses mots fléchès. Vesna s'emploie à essuyer les assiettes.

Et voilà l'instant où Silva, 17 ans, est près de la porte, dans sa robe à fleurs, ses baskets aux pieds. Elle se tient debout, comme si elle attendait qu'on l'applaudisse et prononce trois mots brefs. Elle dit « j'y vais ».

Personne ne lève la tête, personne ne répond au salut de Silva qui d'une voix joyeuse, leur signifie partir à la fête. Parce que, alors, personne ne pouvait savoir, personne ne pouvait imaginer.

Au petit matin, Silva n'est pas rentrée. Mate, son frère jumeau, se réveille avec la gueule de bois. Il est allé lui aussi à la fête des pêcheurs tout comme elle. Rien de mal n'a pu arriver. Personne n'est réellement inquiet.

Le tragique de l'attente démarre et notre imaginaire fait le reste. le film défile devant nous. Chaque seconde, chaque minute, les faits et gestes des parents sont décomposés devant nos yeux, l'expectative se fait de plus en plus poignante et l'angoisse monte !

On assiste à la déflagration qui va dynamiter jour après jour une famille concomitamment avec la Yougoslavie. C'est terrible, comment poursuivre des recherches quand tout s'écroule autour de vous et pourtant, Mate, va tenter de mener sa propre enquête malgré l'effondrement des structures autour de lui.

Roman policier très bien construit qui parfois se met en retrait au profit de l'histoire de ces trente dernières années, de 1989 à 2017, en ex Yougoslavie. C'est un polar à plusieurs niveaux de lecture qui sonde à la fois, la détresse des parents, leur réaction face à leur malheur, leur sentiment de culpabilité, les prises de conscience. Chacun dans ce village doit faire face à ce drame comme il doit faire face au drame qui se joue entre les peuples de l'ex Yougoslavie.

L'auteur nous donne à assister au désastre et à la reconstruction de la Croatie tout en consacrant un chapitre à chacun des intervenants qui ne peut sortir indemne d'une telle épreuve : la disparition d'un enfant. Mais Jakov et Vesna, tout comme Mate, connaissaient-ils réellement Silva ?

Le récit est doté d'une construction intelligente. Chaque chapitre est consacré à un acteur du drame. Chacun de ces passages analyse l'impact psychologique qu'occasionne la disparition de Silva sur chaque membre de la famille, des amis, des connaissances, sans oublier la police. L'auteur par le truchement de la destinée des uns et des autres, nous dresse un diagnostic de trente années qui ont vu la fin du règne de Tito, la guerre des Balkans, la crise économique, le libéralisme économique qui n'échappe pas à la corruption ni à l'urbanisation effrénée propice aux malversations, sans oublier ceux qui se sont achetés une virginité grâce à la guerre. Il y a un avant et un après même lorsque l'on est descendant des partisans de la première heure, l'élite rouge, au prénom évocateur comme Gorki.

Ce roman intimiste décortique minutieusement, avec lenteur, les états d'âme de toute la famille mais aussi de tous les intervenants. Un tel drame engendre, de manière sournoise, des incidences sur les comportements d'autant qu'il ne faut pas sous estimer les êtres humains. le roman évolue dans une ambiance nimbée de rancoeur, de jalousie, de frustration, de regret, de souffrance mais aussi d'amour et d'espoir.

C'est le deuxième roman policier que je lis et qui sort de l'ordinaire. Terra Alta de Javier Cercas comme celui-ci de Jurica Pavicic. A mes yeux, celui-ci souffre de quelques passages un peu longs, dus à la lenteur de la narration et à la minutie avec laquelle l'auteur analyse la psychologie et la destinée de chacun mais il est à découvrir sans hésitation, c'est un excellent roman.
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Un remarquable roman qui ne laisse pas indifférent , en témoignent toutes les belles critiques qui lui ont été consacrées .Ca se passe en 1989 , à Misto , en Croatie .C'est la fête des pêcheurs et quoi de plus naturel , pour des jeunes gens , d'aller s'y amuser ? La porte se referme sur Silvia , aprés un souriant " au revoir " ...Et puis , le silence . Pas d'inquiétude , la fête , ça peut durer , durer , jusqu'à ce que ...Rapt ? Assassinat ? Fugue ? Bref , disparition et les vies basculent .Silence ...Ou plutôt bruit et atrocités de la guerre , pas assez de place pour les recherches , trop à faire , l'atrocité personnelle cède la place à l'atrocité collective ....
L'auteur emprunte alors un chemin original et particulièrement émouvant .En donnant la parole à " la garde rapprochée " de Silvia , il nous fait enquêter sur la disparition de Silva dans un monde en totale perdition .La " petite histoire "croise la Grande . Un livre d'histoire , histoire traversée par un fil rouge de toute beauté .
L'écriture (la traduction) est maitrisée au point de " faire mouche " , d'émouvoir , de faire réfléchir sur le monde en marche à ce moment -là . Un roman difficilement oubliable .
Un seul regret pour moi , ne pas l'avoir ouvert un jour de pluie , j'aurais pu le lire d'une traite et il l'aurait bien mérité .
Hélas , l'emploi du temps surchargé des retraités ne permet pas toujours d'accorder de telles largesses ...C'est dommage ...mais c'est ainsi .Vous qui travaillez et avez donc du temps libre ...laissez vous tenter .
Mais non , je ne vous provoque pas , je ne me moque pas de vous , c'est du second degré , pas la peine de " m'incendier " , en même temps , demain , vous avez la chance d'être en " week - end ...pas moi . Mais je l'ai lu , et si j'étais à votre place...Bon , je sens qu'il faut que j'arrête .Bonne nuit , les amies et amis....
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Misto, petite ville sur la côte dalmate. Ce soir-là de septembre, toute la famille Vela dîne ensemble, la télé allumée dans un coin de la cuisine. Après le repas, Vesna s'attelle à la vaisselle, son fils, Mate, balaie les miettes tandis que son mari, Jakov, est absorbé dans ses mots fléchés. Quant à sa fille, Silva, jumelle de Mate, elle s'en va dans sa chambre. Et c'est tout apprêtée qu'elle en sort, prévient ses parents qu'elle file à la fête des pêcheurs qui se tient dans la baie. C'est la dernière fois que ses parents et son frère la verront... le lendemain, ce n'est qu'en début d'après-midi qu'ils commencent à s'inquiéter. Mate parcourt alors les rues de Misto, s'en va quérir des informations auprès de Brane Rokov, le petit ami de Silva. Mais celui-ci ne peut, malheureusement, pas l'aider puisqu'il est rentré au petit matin de Rijeka. La police prévenue, ce sont trois hommes qui se présentent au domicile des Vela, à sa tête, Gorki Šain. S'ils questionnent les habitants, découvrent, à la grande surprise de Vesna et Jokov, de la drogue cachée dans une conduite d'eau au fond du jardin, puis se rendent à Split, où étudie la jeune fille, l'enquête n'avance malheureusement pas. Les jours passent, Silva reste introuvable, pour autant, Jakov et Mate ne désespèrent pas et vont tout tenter pour la retrouver...

Le 23 septembre 1989, Silva Vela disparaît mystérieusement. Après une soirée passée à la fête des pêcheurs, au cours de laquelle elle a bu, dansé et flirté avec Adrijan, elle ne donnera plus aucun signe de vie. A-t-elle eu un accident ? A-t-elle été tuée ? A-t-elle fui la petite ville de Misto, puisqu'un témoin l'a vu acheter un billet à la gare ? Est-elle retenue prisonnière, elle qui semble trafiquer un peu de drogue ? L'enquête, menée par Gorki Šain, petit-fils d'un héros national de la Yougoslavie, ne connaît guère d'avancées probantes, même si celui-ci découvre que la jeune fille ne menait pas une vie aussi bien rangée qu'elle le laissait croire. Dans ce pays en pleine mutation, qui sera marqué par la fin d'un régime, une guerre civile, l'intégration à l'Europe, le développement et l'ouverture au tourisme, les parents et le frère de Silva, qui parcourra de nombreux pays, vont mener leurs propre enquête. Une enquête longue, désespérante qui durera trente ans. Alliant habilement histoire, enquête policière et drame social, Jurica Pavičić nous plonge, avec intelligence et force, dans cette quête qui semble vaine. Si le pays, lui, connaît de grands changements, Misto, elle, semble figée dans le temps et dans l'attente d'un retour inespéré. Un roman singulier et entêtant, de par l'omniprésence de Silva malgré son absence, de par cette ambiance mélancolique et suspendue et de par ces silences assourdissants...
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J'aime bien lire un bon polar de temps en temps et l'eau rouge est une très bonne pioche.
Très sensible également à la toile de fond de ce roman . l'histoire se passe dans la Yougoslavie de la fin déjà consommée du règne de Tito, elle va couvrir la période de la guerre qui éclatera ce pays en sept états.
L'intrigue du roman apparaît toute simple et banale: une jeune fille disparaît au cours d'une soirée, mais ce "fait divers" pour quiconque devient le drame pour une famille simple, unie, heureuse.
Silva laisse son frère jumeau : Mate et ses parents dans une détresse profonde.
Le roman est très bien ficelé, il va laisser parler plusieurs voix à tour de rôle sur les 27 ans que dure la recherche de cette jeune fille.
Le destin des uns s'entremêle imbriquant le sort des uns et des autres d'une façon inédite et originale.
L'écriture est fluide, empreinte d'une certaine nostalgie d'un pays perdu, d'un exil contraint pour certains, une belle évocation de la Croatie d'hier .

J'ai beaucoup aimé ce roman tout en douceur, comme l'eau rouge qui clapote au fond d'un tunnel en laissant la part secrète des individus en suspens comme le temps qui s'écoule.
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Une jeune fille a été vue qui prenait un billet pour une destination inconnue. Mais nous sommes en septembre 1989, en Yougoslavie: autant dire que ce n'est pas seulement Silva qui disparaît, mais tout un pays, voire une idéologie longtemps puissante qui manque à l'appel. D'ailleurs, c'est en quittant son village de pêcheurs pour la ville de Split que Silva commence à changer : Split qui, en anglais, signifie scinder, partager, comme va l'être la Yougoslavie et aussi mettre les bouts - ce que veut faire Silva.
Pavicic file la métaphore. Tandis que la Yougoslavie éclate, comme si seul Tito avait eu le pouvoir de la fédérer , la famille de Silva fait de même: son père, sa mère et son frère se regardent désormais comme des étrangers. le dealer d'autrefois est devenu un homme politique respecté. le policier, fils d'un héros communiste, le bien nommé Gorki, a été remercié (notamment pour avoir échoué à retrouver Silva) et vend désormais la côte dalmate à de riches étrangers. La guerre de Croatie avait déjà symboliquement commencé dans le village quand l'assassin présumé avait été roué de coups et qu'une lettre anonyme avait dressé des familles les unes contre les autres.
Le roman se termine quand l'amertume commence à se dissiper, que l'horreur de la disparition n'empêche pas un nouvel amour, et que la séparation admet les retrouvailles. Serbes et Croates se sont partiellement réconciliés, les investisseurs étrangers ont accouru et le tourisme engendre 17% du PIB.
Mais si Pavicic file la métaphore, il est moins bourrin que moi: nul besoin de connaître l'histoire de la Yougoslavie pour apprécier cette histoire où l'enquête importe moins que le récit des souffrances engendrées par la disparition d'une adolescente rebelle, avide d'un monde nouveau qui n'aura pas le temps de la décevoir.
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Libraire, c'est un sacré métier ! Ou un métier sacré. L'expression vaut dans les deux sens. Quand j'ai demandé au libraire, de Saint-Pierre d'Oléron de me conseiller un livre qui l'avait agréablement surpris dernièrement, il s'est dirigé vers L'eau rouge.
Un titre, et un auteur (Jurica Pavičić, croate de nationalité) que je ne connaissais en rien. Mais ce qu'il m'en a dit a fait son chemin dans ma tête et une petite lumière s'est éclairée : un polar qui n'en est pas vraiment un, mais un roman qui traverse les années et l'histoire de la Croatie en même temps, même si celui-ci n'est en rien un roman historique.
Donc vous voilà prévenus, et comme aurait dit Magritte « ceci n'est pas une pipe ».

Intriguée que je suis, et intrigués vous serez. du moins, je l'espère…

Donc tout commence en 1989, à Misto près de Split où une jeune fille disparaît soudainement. Dès les premières enquêtes, on se rend compte que sous des dehors proprets, cette jeune demoiselle cachait son jeu. Mais les parents, Jakov et Vesna, ainsi que son frère jumeau Mate, refusent les conclusions de la police et continuent de chercher Silva, d'autant plus qu'un témoin affirme l'avoir croisée au départ de la gare internationale. Mais alors pourquoi ne donne-t-elle pas signe de vie ? Et pendant des années, Mate remuera ciel et terre pour la retrouver.

C'est un incroyable parcours que le lecteur va entreprendre en compagnie de Mate, à travers l'Europe, mais aussi à travers le temps, car ses recherches vont durer plus de vingt ans. Et ce sera l'occasion d'être confronté à l'histoire et aux événements terribles qui ont traversé le pays (conflit contre Slobodan Milošević par exemple).
Ce sera aussi l'observation de bouleversements au sein de plusieurs familles, de bouleversements politiques, aussi dans le paysage architectural du pays, de la montée en puissance de la corruption. Mais en plus de tout cela, il faut aussi noter le rôle tenu par le policier, Gorki Sain, qui tient les rênes de l'enquête, les relâche puis les reprend avec maestria pour conclure l'affaire.

Un roman époustouflant !
Un auteur brillant, qui a raflé de nombreux prix, brillamment secondé par Olivier Lannuzel le traducteur.
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Misto, septembre 1989.
Alors que le bourg, proche de Split, s'apprête à fêter les pêcheurs, chez les Vela, on dîne en famille. Silva et Mate, les jumeaux de dix-sept ans, ont prévu de participer à la fête. Silva part la première. Robe à fleurs, baskets aux pieds, l'adolescente lance un ‘'J'y vais'' et précise ‘'Ne m'attendez pas, je rentrerai tard''. Oui mais voilà…Les heures passent et Silva ne revient pas.
Et si dans un premier temps, la police mène l'enquête et découvre les secrets bien gardés de Silva, ensuite, l'absence de pistes et la chute de l'URSS vont bouleverser le pays et cette disparition deviendra secondaire. Mais les Vela ne se résignent pas. La Yougoslavie vole en éclats, leur famille suit le même chemin et Mate continue de chercher sa jumelle envolée un soir de fête.

Une famille unie, paisible, ‘'normale'', comme métaphore de la Yougoslavie où cohabitaient différents peuples à l'ombre du rideau de fer. Et puis soudain, on s'aperçoit que la normalité n'était qu'apparente. Ce pays n'en était pas un, cette famille qui semblait heureuse cachait des secrets.
A travers les vies bouleversées des Vela, de leurs proches, du policier qui a mené l'enquête, Jurica Pavičić brosse le portrait de la Yougoslavie, de la mainmise de Moscou jusqu'à l'arrivée des spéculateurs immobiliers. Une famille brisée, un pays démantelé. Des rapports de force qui s'inversent. Les maîtres d'hier sont chassés, les voyous deviennent des politiques, les corrompus se refont une virginité en devenant des héros de la guerre d'indépendance.
Jurica Pavičić nous montre un pays entre gris clair et gris foncé où les petites gens doivent survivre…au communisme, à la guerre, à l'effondrement économique, au capitalisme. A cette liberté enfin retrouvée mais à quel prix ?
Et alors que tous subissent les soubresauts de l'Histoire, le mystère de la disparition de Silva reste entier…
Entre aigreur et espoir, L'eau rouge est un roman captivant et émouvant. Plus qu'un polar, c'est un roman à l'atmosphère lourde, prenante, qui s'offre aussi des incursions du côté du roman historique. Excellent !
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En 1989, à Misto, une petite ville de la côte dalmate en Croatie, une jeune fille de dix-sept ans, Silva, disparaît pendant une nuit de fête. La police est alertée et l'inspecteur Gorki Sain, saisi de l'affaire, n'est pas inquiet, pensant qu'il s'agit d'une simple fugue. Mais Silva ne réapparaît pas. Son père Jakov, sa mère Vesna et son frère jumeau Mate se dépensent sans compter pour la retrouver, pensant que la police, ayant d'autres préoccupations, plus politiques, est loin de faire son maximum. La dislocation de la Yougoslavie, la guerre en Croatie au début des années quatre-vingt-dix, vont contribuer à laisser tomber l'affaire. Seule la famille va poursuivre ses recherches, inlassablement, pendant plusieurs décennies, avec en toile de fond la métamorphose du pays, anciemmenent communiste, ou du moins titiste, et maintenant offert aux appétits dévorants des groupes capitalistes, notamment, mais pas seulement, en matière de tourisme. ● Je vais aller à l'encontre de l'avis dominant sur Babelio, surtout parce que ce livre n'est pas ce qu'il prétend être, ou du moins ce pour quoi on l'a récompensé et pour quoi j'ai eu envie de le lire : un roman policier. ● Aucun suspense, pratiquement pas d'enquête, des policiers aux abonnés absents… le récit ne progresse qu'à coups de hasard, souvent déceptif. ● le rythme est d'une exaspérante lenteur, le récit se trouvant entrelardé par de multiples descriptions et détails ne le faisant pas avancer d'un iota, sans compter une linéarité que le changement de point de vue ne compense pas vraiment. ● Alors, bien sûr, on pourra s'extasier sur le fait que le macrocosme de la déflagration yougoslave se retrouve en miroir dans le microcosme de l'éclatement d'une famille, on pourra louer l'auteur de mettre en parallèle le totalitarisme communiste et l'aliénation capitaliste qui, soi-disant, ne vaut pas mieux, on pourra aussi apprécier la façon qu'ont les guerres de rebattre les cartes, faisant par exemple d'un ancien dealer un préfet, on pourra aimer la psychologie des personnages, notamment la famille de Silva, etc., mais tout cela, à mes yeux, ne fait pas une dynamique narrative et donc un bon roman.
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23 septembre 1989, dans ce qui n'était pas encore la Croatie indépendante. A Misto, village côtier à quelques encablures de Split, c'est le jour de la fête des pêcheurs. Silva et son frère jumeau Mate, 17 ans, s'y rendent séparément. Si le lendemain matin, Mate se réveille dans son lit avec une solide gueule de bois, ce n'est pas le cas de Silva, qui s'est volatilisée.

La police lance les recherches, interroge et fouille tout le village, Mate et son père collent des affichettes partout. Au fil de l'enquête, il apparaît que Silva, dont tout le monde pensait qu'elle était une fille exubérante au caractère bien trempé mais sans plus, menait en réalité une vie secrète bien plus scabreuse...

Enlèvement, meurtre, accident, fugue, l'enquête aurait pu aboutir.
Si le Mur de Berlin n'était pas tombé, si le communisme ne s'était pas effondré, si la Croatie n'avait pas déclaré son indépendance, si la guerre n'avait pas éclaté en ex-Yougoslavie, si les autorités s'étaient, malgré les circonstances, préoccupées du sort d'une personne (désormais majeure) disparue.

Mais il faudra attendre 27 ans pour que le mystère de la disparition de Silva soit élucidé. 27 ans pendant lesquels Mate a continué à chercher sa soeur, en dépit de tout, alors que sa famille et son pays se disloquaient sans espoir de retour.

Roman choral, « L'eau rouge » est bien plus qu'un roman policier. En plus de l'enquête sur la disparition de Silva, il aborde les questionnements de ses proches, qui croyaient si bien connaître la jeune femme. Il balaie également 30 ans de l'histoire croate, de la chute du régime instauré par Tito au libéralisme effréné en passant par la guerre des années 90, la crise financière de 2008 et le développement du tourisme de masse, avec ce que tout cela a généré de corruption, de reconversions professionnelles douteuses et d'urbanisation galopante.

Le rythme est lent, les descriptions parfois trop minutieuses, mais la construction de ce roman est remarquable, et son écriture sobre et efficace. Un roman très intéressant et captivant où se mêlent la petite et la grande histoires, au milieu des rancoeurs et des jalousies intimes, des souvenirs et des regrets, de la douleur et de l'espoir.
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