enfin un livre de poésie qui nous entraine loin ...
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[...]
J'écris à la lumière d'une lampe
Les absolus les éternités
et leurs alentours
ne sont pas mon propos
J'ai faim de vivre et aussi de mourir
Je sais ce que je crois et je l'écris
l'acte
Avènement de l'instant
l'acte
le mouvement dans lequel s'érige
et se défait l'être total
Conscience et mains pour saisir le temps
je suis une histoire
une mémoire qui s'invente
Je ne suis jamais seul
Je te parle toujours
tu me parles toujours
J'avance dans le noir et je plante des signes.
(extrait de "Vrindâban").
ENTREE EN MATIERE
Pierres de colère froide
Hautes maisons aux lèvres de salpêtre
Bâtisses pourries dans le sac de l'hiver
Nuit aux mamelles innombrables
Une seule bouche carnassière
Sifflet et rire électrique
Vacarme
Le néon s'égrène
Harnachée de guirlandes de dents
Oreilles lumineuses abécédaires clignotant
Œillades obscènes des numéros
Nuit multicolore et nuit écorchée
Maigre nuit libertine nuit tête de mort
Ville
...
La ville se perd dans ses ruelles
Elle s'endort dans les terrains vagues
La ville s'est perdue dans ses faubourgs
Une horloge donne l'heure
C'est l'heure
...
Les fenêtres se ferment
Se ferment les murs les bouches
Les mots retrouvent leur place
Maintenant nous ne sommes plus seuls
La conscience et ses poulpes greffiers
Siègent à ma table
Le tribunal condamne ce que j'écris
Le tribunal condamne ce que je tais
Mur œil fixe sans visage
Des bruits imperceptibles
Les pas du temps qui apparaît et dit
Que dit-il ?
Que dis-tu ma pensée
Tu ne sais pas ce que tu dis
Pièges de la raison
Crimes du langage
Efface ce que tu écris
Ecris ce que tu effaces
...
Le temps n'a pas de poids
Il est pesanteur
Les choses ne sont pas à leur place
Elles n'ont pas de place
...
Les noms ne sont pas des noms
Ils ne disent pas ce qu'ils disent
Ils me faut dire ce qu'ils ne disent pas
Dire ce qu'il disent
...
Promiscuité du nom
Le mal sans nom
Les noms du mal
Dire ce qu'ils disent
Le sanctuaire du corps
L'arche de l'esprit
(Traduit par Yesé Amory)
Versant est
LIT DE RIVIÈRE
Entends la palpitation de l'espace
Ce sont les tambours de l'été
Les pas de la saison en rut
Sur les braises de l'année
C'est son bruit d'ailes et de crotales
Sous sa robe de racines et d'insectes
La terre crépite
La soif s'éveille élève
Ses grandes cages de verre
Là tu chantes ta chanson furieuse
Ta chanson heureuse
D'eau captive
Tu chantes nue
De pollen le visage
Les seins et le ventre tachés
Sur le paysage aboli
Ton ombre est un pays d'oiseaux
Que le soleil disperse
D'un geste
p.81
Versant est
MAITHUNA
Langue bourgogne de soleil flagellé
Langue qui lèche ton pays de dunes insomnieuses
Chevelure
Langues lanières de fouet
Langages
Dénoués sur tes épaules
Entrelacés
Sur tes seins
Ecriture qui t'écrit
Avec des lettres stylets
Te nie
Avec des signes tisons
Vêtement qui te dévêt
Ecriture qui te vêt d'énigmes
Ecriture où je m'enterre
Chevelure
Grande nuit subite sur ton corps
Jarre de vin chaud
Répandue
Sur les tables de la loi
Nœuds de hurlements et nuées de silences
Grappes de couleuvres
Raisins
Ecrasés
Sous les pas gelés de la lune
Pluie de mains de feuilles de doigts de vent
Sur ton corps
Sur mon corps sur ton corps
Chevelure
Feuillage de l'arbre d'ossements
L'arbre aux racines aériennes qui boivent la nuit dans le soleil
L'arbre charnel
L'arbre mortel…
p.88-89
Blanc (extrait)
Éblouissement :
Je ne pense pas, je vois
— Non ce que je vois.
Je vois les reflets, je vois les pensées.
Les précipitations de la musique,
Le nombre cristallisé.
Un archipel de signes.
Aérophanie,
Bouche de vérités,
Clarté qui s'annule en une syllabe
Diaphane comme le silence :
Je ne pense pas, je vois
— Non ce que je pense,
Visage en blanc de l'oubli,
Splendeur du vide.
Je perds mon ombre,
J'avance
Parmi les forêts impalpables,
Les sculptures rapides du vent,
Ailleurs multipliés,
Défilés qui s'effilent,
J'avance,
Mes pas
Se dissolvent
Dans un espace évanescent
En des pensées que je ne pense pas.
p.104-105
« […]
[…] comme le dira Octavio Paz (1914-1998), “la poésie mexicaine ne trouvait pas sa forme propre. Chaque fois qu'elle se risquait à exprimer le meilleur et le plus secret de son être, elle ne pouvait que mettre en oeuvre une culture qui ne lui appartenait que par un acte de conquête spirituelle“.
[…] Enrique González Martínez annonçait qu'il fallait “tordre le cou au cygne“ moderniste pour pénétrer dans la réalité concrète de la vie quotidienne : “Cherche dans tout chose une âme et un sens / caché ; ne te drape pas dans la vaine apparence“ […] »
« Le poème tournoie sur la tête de l'homme
en cercles proches ou lointains
L'homme en le découvrant voudrait s'en emparer
mais le poème disparaît
Avec ce qu'il peut retenir
l'homme fait le poème
Et ce qui lui échappe
appartient aux hommes à venir »
(Homero Aridjis, « Le Poème », in Brûler les vaisseaux, 1975.)
0:00 - EFRAÍN BARTOLOMÉ
1:49 - MANUEL ULACIA
3:40 - VERÓNICA VOLKOW
4:36 - MARISA TREJO SIRVENT
5:41 - AURELIO ASIAÍN
6:12 - Générique
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Référence bibliographique :
Poésie mexicaine du XXe siècle, traduction de Claude Couffon et René Gouédic, Genève, Patiño, 2003.
Images d'illustration :
EFRAÍN BARTOLOMÉ : https://es.wikipedia.org/wiki/Efraín_Bartolomé#/media/Archivo:Efraín_Bartolomé_en_Berna,_1999.jpg
MANUEL ULACIA : https://www.lavenderink.org/site/books/manuel-ulacia/?v=76cb0a18730b
VERÓNICA VOLKOW : https://www.rogeliocuellar.mx/archivo/fotografia/4559/mx-rcu-esc-vovo-a-00020
MARISA TREJO SIRVENT : http://www.elem.mx/autor/datos/109900
AURELIO ASIAÍN : https://www.amazon.es/Aurelio-Asiaín/e/B001JWYBQ2/ref=dp_byline_cont_pop_book_1
Bande sonore originale : Mike Durek - The Good News Or The Bad News
The Good News Or The Bad News by Mike Durek is licensed under a CC-BY Attribution License.
Site :
https://freemusicarchive.org/music/Michael_Durek/Piano_Music_for_The_Broken_Hearted_1221/05_The_Good_News_Or_The_Bad_News/
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