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Critique de GeorgesSmiley


En route, en compagnie de Iain Pears l'érudit, pour le Vaucluse, Vaison-la-Romaine, Avignon et son palais des papes à l'entrée duquel les visiteurs curieux d'aujourd'hui peuvent apercevoir le blason de son bâtisseur, Clément VI le Magnifique.
Un pape, donc, sans doute le plus célèbre de la parenthèse française en Avignon, un poète, Pétrarque, dont chacun connait le nom, même s'il n'en a jamais lu un vers, et un évêque, Sidoine Appolinaire, sanctifié et fêté tous les 21 août, sont les trois personnages historiques, sur lesquels Iain Pears base son récit même si, pour les deux derniers cités, il utilise des personnages de fiction (Olivier de Noyen et Manlius). Sur trois époques différentes, la chute de l'Empire romain du Vème siècle, la papauté avignonnaise du XIVème siècle au moment de la Grande Peste et l'invasion nazie de la mi-vingtième siècle, il s'interroge sur les notions de civilisation, de résistance à la barbarie, de fidélité à ses convictions. Peut-on, doit-on consentir à de mauvaises actions pour que d'autres plus terribles soient évitées ? Dans ces périodes terribles où les barbares triomphent, la défense de la civilisation se limite à peu de choses, quelques choix cornéliens, résister jusqu'à la mort ou pactiser en espérant sauver ce qui peut l'être, s'imposent à tout un chacun et particulièrement à ceux qui sont en charge des âmes ou des corps. Et quand l'amour s'en mêle (Pétrarque a sa Laure, Sidoine sa Sophia et Julien, le personnage fictif du XXème siècle, sa Julia), les choix deviennent encore plus difficiles, plus dramatiques et plus déchirants. On ne peut que se féliciter de n'y être pas (encore ?) confrontés. L'Histoire officielle se charge, à postériori, d'habiller, à la guise des vainqueurs, les choix effectués des motivations qui l'arrangent plus que la vérité. On apprend ainsi de Clément VI, au travers du sort des Juifs persécutés à ces trois périodes pour servir de boucs-émissaires, qu'il est passé à la postérité pour avoir, au beau milieu de l'épidémie de Peste noire de 1347-1348, publié deux bulles interdisant de les forcer à la conversion et menaçant d'excommunier tous leurs persécuteurs. Quelle en était la motivation exacte ? le roman en livre une, rien n'est certain, laissons-lui donc le bénéfice du doute.
C'est une belle promenade érudite qui pose beaucoup de questions. On y aborde, de façon romancée et agréable, politique, philosophie, histoire et histoire de l'art, à trois époques particulièrement troublées dans une unité de lieu (le Vaucluse). Les sentiments compliquent tout : amour, amitié, de même que l'envie de bien faire, et aboutissent parfois à des trahisons assumées ou à des renoncements déchirants. C'est un roman qui donne envie de retourner dans ce Vaucluse ensoleillé et parfumé pour plonger dans son histoire méconnue et (re)découvrir la poésie de Pétrarque.
« De longs cheveux brillant à rendre l'or jaloux,
Le regard le plus pur, le plus charmant visage
Qui jamais aient fait mettre un mortel à genoux,
Un sourire ineffable, un gracieux langage,
Une main, de beaux bras noblement arrondis
A faire implorer grâce au coeur le plus rebelle,
Un pied fait par l'amour, une femme si belle,
En un mot, qu'il n'est rien de tel au paradis,
Me faisaient d'heureux jours; mais Dieu l'a rappelée,
Empressé de la voir parmi sa cour ailée,
Et moi, je reste seul, les yeux morts au bonheur.
Pourtant une espérance ici-bas m'est laissée :
Peut-être l'ange heureux, qui lit dans ma pensée,
De nous voir réunis obtiendra la faveur. »
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