Citations sur Boccanera (29)
Concevoir, me reproduire, perpétuer l'espèce...Faire un enfant. Ni en adopter un. Jamais. J'aime les enfants, les enfants des autres, tous les enfants de la terre. Mais je ne me suis jamais sentie en droit ni en capacité de devenir mère.
Comme tout quartier populaire passé aux nouvelles règles d'urbanisme, c'est devenu le paradis des bars et de la bouffe, des concept-stores et des magasins de fringues - un Éden rempli majoritairement d'Adonis qui semblent ne jamais dépasser les vingt-cinq ans même quand tu sens qu'ils sont plus près de l'andropause que de la première communion.
Un Corse avec le sens de l’humour, c’est suffisamment rare pour être choyé.
J'aime cet endroit. Pas seulement parce qu'on y mange bien, des trucs préparés sous ton nez, mais parce que j'ai l'impression d'y être à ma place. Les sets en papier, Pierrot qui rougne derrière le comptoir du bar en faux bois, les commandes, les rires et les vannes qui fusent. Et la chaleur de tout le monde : ici, quand on te demande comment ça va, on écoute la réponse.
Le gentil ouvrier est un objet publicitaire que l'entreprise offre à ses contacts ou à son encadrement méritant. Le cynisme des gens du marketing, ou leur total manque d'imagination les a fait concevoir un prolo dont la tête héberge les documents virtuels des cadres qui l'exploitent. Le petit ouvrier n' intéressé ni les cambrioleurs, ni les enquêteurs. Je l'empoche. (p. 42)
C'était un grand blanc. Un bout de sommeil sans rêves, mais avec presque la conscience de l'inconscience. Je savais que je dormais et je savourais cette période de rien. Çà a duré un moment, juste le temps de penser, je dors et c'est bon, quand la sonnerie du téléphone est venue mettre un terme à ce qui ressemblait à de la félicité. (p.59)
J’essaie d’agripper ce qui m’étouffe mais mes doigts ne saisissent rien, je me laboure la peau pendant que mon larynx commence à s’écraser.Plus d’air. Plus d’air du tout. Ça ne peut pas. Finir comme ça. Je dois pouvoir respirer. Ce n’est pas possible de mourir. Pas moi. Pourquoi m’empêche-t-il de respirer ? J’essaye de penser. Mais il n’y a plus d’oxygène dans mes poumons. Il n’y a plus d’oxygène pour moi, nulle part. Je m’apprête à basculer dans le grand rien quand je perçois au travers du brouillard sale qui m’étouffe une sorte de hurlement. Je ressens un sursaut et la pression sur ma gorge se relâche. Une autre secousse, un corps qui s’écroule de toute sa masse sur moi. À plat ventre, le nez collé au sol, je respire. J’avale, j’engloutis l’oxygène. J’aspire tout, air et poussière, par la bouche, par le nez. Une fois, deux fois, dix fois. Je respire pour aujourd’hui, pour demain, pour tous les jours. Plus jamais. Plus jamais. Il faut respirer. Et vivre.
« Quelle horreur, ce meurtre. Tu sais, les gens ont peur. On se demande si ce n’est pas un meurtre homophobe. On n’en a jamais eu ici, mais il y a un début à tout. On est dans une ville tolérante, surtout parce que le maire sait que la communauté est riche et dynamique économiquement. Mais on n’est pas à l’abri d’un fou furieux…
L’été, on peut attendre jusqu’à dix minutes avant de réussir à monter dans le bus. Donc, une file (lorsque ce sont des Anglais) ou un troupeau (le reste du monde) s’étire sur des dizaines de mètres au terminus, attendant de monter au compte-gouttes car seul un battant de la porte avant est ouvert. Comble de la perversité, le chauffeur est accompagné d’une seconde personne dont la fonction n’est pas de l’assister (comme en encaissant les billets pour accélérer le mouvement, par exemple), mais de demander aux voyageurs leur destination d’un air inquisiteur.
Concevoir, me reproduire, perpétuer l’espèce… Faire un enfant. Ni en adopter un. Jamais. J’aime les enfants, les enfants des autres, tous les enfants de la terre. Mais je ne me suis jamais sentie en droit ni en capacité de devenir mère. C’est un sentiment que j’ai toujours réussi à expliquer et défendre fermement, face à mes copines et même à mes parents.