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L'âge d'or tome 2 sur 2

Cyril Pedrosa (Autre)Roxanne Moreil (Autre)
EAN : 9791034732647
232 pages
Dupuis (06/11/2020)
3.95/5   400 notes
Résumé :
Avec l'hiver, la guerre a commencé. Tandis que les insurgés rassemblent leurs troupes et remontent depuis la Péninsule, la princesse Tilda assiège le château de son frère pour reconquérir son trône. En haut des remparts, en première ligne, les "gueux" se préparent à l'assaut.

Ce deuxième tome conclut en majesté l'épopée flamboyante de " L'Age d'or ", ce livre assez puissant pour déchaîner la tempête et la révolution, la force d'une utopie qui donne en... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (53) Voir plus Ajouter une critique
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Ce tome fait suite à L'âge d'or, tome 1 (2018) qu'il faut avoir lu avant, car c'est la deuxième moitié d'une histoire complète. La première édition date de 2020. L'histoire a été coécrite par Cyril Pedrosa & Roxanne Moreil et mise en images par Pedrosa. Il s'agit d'une bande dessinée en couleurs comprenant 183 planches. Pedrosa a réalisé les couleurs du livre avec l'aide de Joran Tréguier et Marie Millotte.

Sur une mer démontée, un grand navire à voile est ballotté. Une chaloupe est mise à la mer avec à son bord Bertil, et une autre personne. Ils sont accueillis sur la côte par une troisième personne qui les mène au château du prince Edwald. Sur les remparts de ce même château, Poudevigne et Petit Paul ont été enrôlés de force pour être soldats et ce soir-là, ils montent la garde sur les remparts. le premier indique au second qu'il le laisse surveiller, pendant que lui pique un petit roupillon. le second le réveille de suite parce qu'il s'est rendu compte qu'il ne sait pas comment s'y prendre. Puis ils se mettent à parler d'une bonne soupe chaude, d'être soldats, et de ce qui va se passer quand ceux d'en bas vont attaquer. Petit Paul se met à trembler d'angoisse à l'idée d'une bataille, et Poudevigne lui promet qu'il le protègera. Puis ils parlent de Languile qui est resté en Péninsule et qui doit être un homme libre, peut-être avec un petit lopin de terre à lui, et la panse bien remplie. La neige tombe sur les remparts, sur la ville à l'intérieur des fortifications, et sur les assiégeants à l'extérieur des fortifications. Au printemps le siège est toujours en place, et la princesse Tilda en armure mène un nouvel assaut sur le mur d'enceinte. Les flèches pleuvent depuis les remparts et font quelques morts parmi les soldats. Un beffroi a été amené et mis à proximité des remparts, avec une passerelle atteignant presque le mur d'enceinte. Les soldats qui s'avancent dessus essuient une pluie de flèches : une partie meurt, une autre se replie dans la tour. Tilda donne l'ordre de faire reculer le beffroi, sous le regard amusé de son frère Edwald qui contemple la scène depuis une tour à l'intérieur de l'enceinte.

Le soir venu, autour de la table du repas, Edwald se plaint de ne plus supporter de voir ces cloportes au pied des remparts. Son conseiller Loys de Vaudémont l'informe que leurs bataillons de la Péninsule ne sont plus qu'à une dizaine de jours de marche, et qu'ils pourront ainsi prendre Tilda en tenailles. Un autre noble à la table demande pourquoi ces troupes n'ont pas été rappelées plus tôt, au lieu de les disperser en Péninsule. Vaudémont répond qu'il aurait été absurde de lancer la contre-attaque au milieu de l'hiver, et que l'occupation de la Péninsule a permis de maintenir la pression sur les provinces insurgées. Un cousin d'Edwald arrive pour lui montrer, un tract placardé sur les murs. On peut y lire : Souviens-toi des hivers passés, jamais des tyrans rien ne fut donné, l'âge d'or est revenu ! Sur la côte, un compagnon d'arme accueille Hellier le tabellion et lui indique qu'il pourra rencontrer Languile au rendez-vous convenu. Dans la grande salle à manger de la tour en hauteur, Edwald contemple la grand-place, ainsi que les lumières de la citadelle. de son côté, à l'étage d'une auberge, Tilda contemple les lumières des feux de camps de son armée. Elle se rend devant la cheminée et regarde les marques sur son cou. Elle enlève la partie supérieure de son armure et constate que la blessure sur son bras gauche saigne encore. Elle passe dans la pièce voisine pour aller ouvrir le haut coffre qui contient l'Âge d'Or.

Comme il s'agit d'un diptyque, le lecteur revient pour avoir la fin de son histoire. Il se rend vite compte que les auteurs ont construit cette deuxième partie avec une unité de lieu et d'action : l'armée de Tilda fait le siège du château de sa famille pour le reprendre des mains de son frère Edwald, plus jeune qu'elle, donc illégitime sur le trône. En trame de fond, se trouve la question de l'Âge d'Or, à la fois un livre bien réel qu'il est possible de tenir dans ses mains, à la fois une métaphore, celle de l'organisation d'une société bénéfique pour tous ses citoyens. Comme dans le premier tome, les auteurs déroulent clairement leur intrigue : elle suit le schéma classique de l'héritier du trône évincé par une guerre de succession qui revient reprendre son dû. Tilda est une véritable héroïne, combattante émérite, prenant la tête de ses armées sur le champ de bataille et lors des affrontements, devant forger des alliances. En face, son frère commande son armée sur la base des conseils de Loys Vaudémont qui est le véritable chef de l'exécutif, qui prend les décisions permettant d'assurer la continuité du pouvoir en place. La narration visuelle reste toujours aussi originale, avec une palette de couleurs qui sort de l'ordinaire, et une façon de représenter les personnages et les décors qui évoque un temps mythique, pour raconter un conte.

Par rapport à la découverte du premier tome, l'effet de surprise des dessins est passé. Pour autant, le lecteur retrouve bien la mise en images qui impressionne par son foisonnement, par ses couleurs surprenantes, par sa forme aventureuse, et par sa rigueur et sa précision, ainsi que par les détails concrets. Ce deuxième tome commence comme le premier par un dessin qui s'étale sur 7 pages. le lecteur y retrouve la précision des éléments représentés : le trois-mâts, les hautes murailles qui entourent la citadelle, les tentes du camp des assiégeants, la tour de siège (appelée beffroi par les personnages), l'auberge, la campagne et les bois alentours, le coffre haut abritant l'Âge d'Or, la grand-place avec son gibet, la tour dans laquelle Edwald s'est réfugié avec sa garde rapprochée. En fonction de la séquence, l'artiste peut réaliser une représentation plus ou moins simplifiée, tout en conservant un bon niveau de détails. Les personnages évoquent parfois une représentation à la Walt Disney, mais avec plus de détails et plus de texture, à nouveau une approche visuelle entre conte pour enfants, et nuances pour adultes. le lecteur constate également que l'artiste a conservé son processus de mise en couleurs si particulier, ainsi que les teintes inattendues. En fonction des pages et des cases, certaines formes sont détourées par un trait de contour, dont la couleur varie en fonction des éléments, très rarement noir. le contour de la plupart des formes n'est défini que par la couleur, comme dans un procédé de couleur directe. L'étrangeté des dessins est accentuée par le fait que l'artiste utilise essentiellement des aplats de couleurs, sans dégradé progressif, mais avec des juxtapositions pouvant évoquer des dessins animés des années 1960, ou des effets infographiques.

S'il s'agit bien de la suite du tome 1, il n'y a pas de répétition, et le lecteur se retrouve surpris à bien des moments qu'il s'agisse de la narration visuelle ou de l'intrigue. Il se souvient bien de passages somptueux dans le premier tome, et il en découvre d'autres tout aussi somptueux ici, de nature différente : les remparts, la charge des armées contre les murailles, le rayonnement de l'Âge d'Or, la végétation dans les bois, les deux incendies, le crépuscule pourpre, la révélation pleine et entière de l'Âge d'Or, autant de moments où il en prend plein les mirettes. le dessinateur ne se montre pas démonstratif, il donne à voir des sensations, des ressentis, des phénomènes, leur apportant une consistance extraordinaire qui transporte réellement le lecteur dans cette vision entre conte et onirisme. Il réalise à nouveau de magnifiques pages sans texte, environ une trentaine au total. Il n'y a pas de répétition non plus dans l'intrigue. Dans un premier temps, le lecteur peut être un peu décontenancé par l'unité de lieu, par l'absence de nouveaux voyages. Il constate qu'il y a peu de nouveaux personnages (messire Landeproix), tout en retrouvant avec plaisir ceux déjà présents dans la première partie : Tilda, Edwald, Tankred de Malefort, Languile, Petit Paul, Poudevigne, Hellier le tabellion, Loys de Vaudémont, Bertil. Il se rend compte que chaque protagoniste dispose de sa personnalité, de son caractère, de son positionnement social. Il apprécie qu'une soldate mentionne Abigaëlle et sa communauté.

Le temps est également venu de mener l'intrigue à son terme, à la fois pour l'issue de la reconquête du trône par Tilda, à la fois pour le potentiel avènement de l'âge d'or qui donne son titre à la bande dessinée. D'un côté, le lecteur trouve une partie des conventions de genre auxquelles il s'attend : le courage de l'héroïne, les hauts faits d'arme, la cruauté des méchants, l'assistance des compagnons de l'héroïne, les combats dont les bons sortent victorieux contre les méchants. D'un autre côté, les auteurs restent bien dans un registre adulte : même si les archers d'Edwald ne sont pas très doués (ils n'arrivent pas à toucher Tilda qui est en première ligne), ils font des ravages parmi les soldats qui meurent réellement. Il y a même une séquence où Tilda est à côté d'un de ses soldats qui rend son dernier soupir, décédant de sa blessure. En outre, la princesse est confrontée à la nécessité d'une alliance avec un ancien opposant, ce qui joue sur le fait que les relations de pouvoir ne sont pas manichéennes et qu'elles sont évolutives. Enfin l'héroïne elle-même n'est pas à la hauteur de l'idéal de l'Âge d'Or, et elle en souffre physiquement. le thème de fond du récit sur l'utopie est développé de manière adulte : les morts au combat, l'obligation de mener une lutte mortelle, une prise de pouvoir sanglante au nom d'un idéal, l'engagement actif au péril de sa vie (être du côté de ceux qui n'ont rien, ou de leurs maîtres), la nécessité de participer à la vie de la société. Il subsiste une ambiguïté majeure, celle du meneur. le récit remet visiblement en question les motivations de Tilda, sans pour autant proposer d'alternative à construire ou théorique à la désignation d'un chef temporel.

Ce deuxième tome tient toutes les promesses du premier. Cyril Pedrosa réalise des planches toujours aussi enchanteresses, combinant spectacle et narration personnelle, avec une sensibilité rendant vivants et attachants tous les personnages. le scénario suit un chemin tout tracé relevant du conte classique, avec des composantes adultes et une réflexion sur les conditions politiques pour un âge d'or des êtres humains.
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Gros coup de coeur.
J'avais été impressionné par les choix graphiques du tome 1, je réitère mes compliments pour ce deuxième volet.
Ce graphisme utilise les nouvelles technologies avec une grande originalité, une nouveauté, un style non conventionnel qui transcende l'atmosphère de fantasy médiévale, cela grâce à ses grandes illustrations en pleine page qui sont de véritables merveilles, mariant subtilement l'Art de Nicolas Poussin à la palette graphique, grâce aussi à sa gamme coloré intense, utilisant des ambiances colorées nouvelles, inhabituelles, allant du violet au brun, ou du vert au brun. le sens de lecture est trituré, les personnages peuvent se retrouver plusieurs fois dans une même image, proposant des processus de lecture différents des schémas classiques, on voyage avec les dessins. le style du trait passe allègrement du naturalisme minutieux à une abstraction lyrique et agressive avec un naturel insolent, les traits de couleurs, les tâches, les détails des feuilles, des minéraux, tout cela participe au récit, nous embarque dans le rythme de cette tornade romanesque. L'histoire tient toutes les promesses proposées dans le tome 1. L'entrée en matière est plutôt surprenante, on retrouve Tilda en guerre contre son frère, alors qu'on l'avait quittée dans le temple à la recherche d'un étrange trésor. Plus de guerre, plus de combats, plus de violence dans ce deuxième opus, plus de rythme, mais sans perdre son attrait pour les personnages, parfaitement mis en place dans le premier tome. On va comprendre au fil de l'histoire, la nature de ce trésor. C'est un conte merveilleux et un roman de cape et d'épée philosophique, une très belle fable sur le rapport entre l'ambition du pouvoir politique et la vie du peuple. Rien de véritablement révolutionnaire sur le sujet, mais totalement dans le traitement.
Maintenant je vous invite vivement à aller découvrir la nature de ce trésor.
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S'il y a bien une bande dessinée qui s'était fait remarquer à sa sortie, c'est « L'âge d'or » volume 1, le conte médiéval épique et historique signé Cyril Pedrosa aux illustrations et Roxanne Moreil au scénario. Multi-récompensé, c'est peu dire que le volume 2 des aventures de la princesse Tilda était attendu de pieds fermes. Réjouissons nous, car ce volume 2 est bel et bien à la hauteur et même, à mon sens, meilleur que le premier volume car entièrement concentré sur l'action. La guerre fait rage entre son frère au pouvoir et la princesse Tilda qui assiège le château de celui-ci avec ses troupes. Mais aveuglée par les sorts jetés sur le coffre contenant le livre de l'histoire de l'humanité « l'âge d'or », la princesse Tilda souffre et s'isole de ses fidèles compagnons d'arme. Quel est donc le pouvoir de ce livre ? Quelles leçons doit-on tirer de cette quête de pouvoir ? Celui-ci doit-il être conquis au mépris des principes moraux et philosophiques d'égalité qui doivent prédominer ? Moult péripéties attendent Tilda et ses ami(e)s. A la hauteur de ses promesses, illustré par un Cyril Pedrosa au sommet de son art, on est également conquis par un scénario touchant, une sorte de conte philosophique à l'utopie salvatrice. Si vous cherchez une bande dessinée à offrir sous le sapin pour noël, je vous conseille ce flamboyant « L'âge d'or » volume 2 , dans la collection Aire Libre chez Dupuis, qui saura les ravir.
Lien : https://thedude524.com/2020/..
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Je n'avais pas profité pleinement du premier tome puisque j'avais trouvé que l'histoire était longue à se mettre en place. de plus, j'avais ressenti une pointe de déception puisque j'avais lu des avis très, très élogieux sur ce premier volume.

Pour le second (et le dernier !), je n'avais pas les mêmes attentes. le bémol, c'est que j'ai eu le temps d'oublier une grande partie de ce qui se passait dans le précédent tome, si bien que j'étais un peu perdue au départ... Mais j'ai rapidement compris les enjeux et la quête menée par Tilda qui veut reconquérir son trône.

Bien que la bande dessinée soit longue, les nombreuses péripéties et évènements que vivent les personnages font que je n'ai pas vraiment eu le temps de m'ennuyer.

Au niveau des graphismes, c'est toujours aussi magnifique et c'est vraiment le gros plus de L'âge d'or, selon moi. Les couleurs et les illustrations sont vraiment très belles et je salue le talent de Roxanne Moreil pour cela ! Quant à l'histoire, j'ai été assez surprise par la fin et je dois dire que Cyril Pedrosa a créé une intrigue que j'aimerais bien redécouvrir sans attendre deux ans entre les deux tomes.
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Fin 2018, le duo Roxane Moreil et Cyril Pedrosa déboulait dans le paysage de la bande dessinée avec le premier volume du diptyque : « l'Age d'or ». le dessinateur quittait l'univers de ses récits habituellement intimistes voire autobiographiques pour se mettre au service du scénario de la libraire Roxane Moreil qui faisait ses débuts dans le 9eme art. Ils y réinterprétaient le thème de l'utopie politique dans un univers médiéval fantastique revisité haut en couleurs dans un album de plus de 230 pages.
Deux ans plus tard arrive enfin la suite de ce récit multi primé toujours dans la collection « Aire libre » des éditions Dupuis.

Il était une fois une princesse écartée du royaume par sa mère et l'infâme régent Vaudémont au profit de son frère au moment de son accession au trône. Tilda, tel est son nom, accompagnée du fidèle seigneur Tankred et de son protégé Bertil se lançait alors dans une formidable épopée pour reconquérir son pouvoir usurpé. Elle découvrait ses sujets mourants de faim et décidés à en découdre. La révolte grondait, en effet, nourrie par la diffusion d'une curieuse légende : celle de l'Age d'or, un âge perdu durant lequel les hommes vivaient libres et égaux sans servage et que le peuple comptait bien restaurer. le second tome s'ouvre sur une ellipse temporelle, in medias res : plusieurs années se sont écoulées, la princesse est devenue une chef de guerre et grâce au trésor d'Ohman a monté une armée. Elle assiège le château de son frère pour reconquérir son trône tandis que dans les provinces, les insurgés menés par Bertil et Hellier s'organisent. Tilda est obnubilée par sa quête et n'épargne personne : les populations sont affamées et son armée épuisée. Parviendra-t-elle à mener à bien son projet sans y perdre son âme ?

La brusque rupture narrative avec le premier tome en désarçonnera plus d'un mais elle a aussi pour mérite d'instaurer du suspense en retardant les réponses aux questions que se posait le lecteur à la fin du tome 1 : qu'est devenu le coffre et son contenu ? Comment Tilda s'en est-elle tirée ? A-t-elle revu Bertil ? tout en nous plongeant directement au coeur de l'action et des batailles.
Ce deuxième tome est encore plus spectaculaire que le premier. Il s'ouvre sur de superbes pages de garde dans les tons bleu-gris (qui sont reprises sur la jaquette de l'édition de luxe) mettant en scène Tilda se lançant à l'attaque du château et galvanisant ses troupes. On a l'impression d'être dans la tapisserie de Bayeux avec cette double page muette dans laquelle le personnage principal se déplace d'un bord à l'autre en étant reproduit plusieurs fois. On pense également aux tableaux de batailles de San Romano de Paolo Ucello à cause des perspectives linéaires utilisées pour les lances et les oriflammes. Ces pages sont suivies d'une séquence tout aussi tumultueuse : on y voit un navire sur des flots déchaînés bravant la tempête et un temps cataclysmique pour débarquer un mystérieux passager encapuchonné qui se livre à une périlleuse ascension et pénètre dans un passage souterrain sous le château. Puis l'on retrouve notre choeur antique -comme dans le premier tome - avec les personnages de Pou de Vigne et de Petit Paul qui commentent l'action du haut des fortifications.
C'est le décor du château qui relie finalement des séquences a priori disparates et qui par une fabuleuse économie de moyens (narratifs, pas graphiques !) pose d'emblée les enjeux. On a une triangulaire de pouvoirs : d'un côté les usurpateurs, de l'autre Tilda, et enfin les insurgés puisque le passager n'est autre que Bertil ! Ces premières séquences se déroulent en nocturne, comme si d'emblée Pedrosa voulait nous montrer qu'il n'applique pas simplement les recettes qui ont fait le succès du premier opus : des couleurs flamboyantes presque fauvistes. Il se renouvelle et donne à voir une ambiance lourde et anxiogène grâce aux couleurs sourdes. L'âpreté et la dureté de cet univers sont également soulignées grâce à l'incrustation des flocons qui créent un effet de matière et semblent envahir les pages.

L'atmosphère est ainsi bien plus sombre comme le souligne la couverture de l'édition classique : on y voit une Tilda aux yeux exorbités portant l'armure qu'elle voyait sur son reflet, double maléfique, dans le lac sur la couverture du tome 1. Elle a une lame ensanglantée, semble menacer petit Paul et n'est éclairée que par les couleurs de l'incendie du beffroi qui révèlent aussi son campement en contrebas du château. La palette dominante est un camaïeu de rouges violacés, couleurs de la violence et du sang.
Si au moment de la réalisation du premier tome Roxane Moreil avait participé à la conception de l'expo sur les femmes autrices de bd à la maison Fumetti à Nantes et s'était posée, à cette occasion, la question de la représentation des femmes en bande dessinée ; si elle s'inscrivait dès lors dans le courant actuel en bande dessinée de donner une place de premier plan à une héroïne et de ne plus en faire un simple faire valoir sexualisé du héros masculin ; dans ce deuxième volet, les deux scénaristes – Cyril Pedrosa ayant participé à l'écriture du diptyque- vont encore plus loin. Tilda devient complexe, et n'est pas forcément hyper sympathique. Ils jouent avec les stéréotypes et les attentes du lecteur qui pensait en voyant la jeune femme victime et naïve qu'elle était forcément bonne. C'est l'un des intérêts principaux de l'oeuvre : montrer un personnage humain avec ses failles et réfléchir sur la soif de pouvoir.
Le pouvoir corrompt : c'est ce que semble représenter la tache qui s'étend sur le visage de Tilda et sur celui de son frère et qui apparaissait déjà sur le cadavre du feu roi quand Tankred venait lui rendre ses derniers hommages. L'envie brûle et peut détruire. Ici Pedrosa, aidé de Joran Téguier et Marie Millotte, pousse encore plus loin le curseur dans la surprise chromatique : on a un feu d'artifice de couleurs pop, saturées presque psychédéliques à chaque fois que le mystérieux coffre entre en jeu pour en montrer toute la puissance et la possible nuisance. Tilda est devenue tellement obsédée et enivrée par le pouvoir que son physique s'en est trouvé transformé : elle est presque laide, ne supporte plus la contradiction, renie même ses plus fidèles alliés et passe du côté obscur de la force ! Son salut viendra d'un personnage auquel on ne s'attend pas … et d'un livre.

En cette époque actuelle, troublée et presque obscurantiste, je trouve particulièrement savoureux (mais Roxane Moreil n'est pas libraire pour rien !) que l'objet magique et salvateur dans cette saga soit un livre dépositaire de la mémoire. Cette mise en abyme me paraissant le plus bel hommage qui soit à la littérature et à la culture. le scénario a connu seize versions différentes, l'ensemble du diptyque a demandé cinq années de labeur mais cet investissement se perçoit au fil des presque 500 pages qui nous emportent, nous bouleversent et nous surprennent. Chaque case de « l'Age d'or » est une nouvelle enluminure. On se perd dans les détails du trait, on admire ce mélange de livre d'heures et de « Game of Thrones », on savoure les cadrages, les couleurs, les lumières des quatre saisons somptueusement mises en scène dans le diptyque et toute son inventivité graphique … L'une des grandes oeuvres de ces dernières années : incontournable … et définitivement « essentielle » !
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critiques presse (4)
LaPresse
25 janvier 2021
C’est surtout une fable politique aux accents féministes, qui suit les efforts d’une belle princesse pour reconquérir son royaume. Une histoire puissante illustrée (voire enluminée) avec maestria par Pedrosa, le bédéiste derrière Portugal
Lire la critique sur le site : LaPresse
Bedeo
08 décembre 2020
Un an et demi après la sortie du premier opus, Cyril Pedrosa et Roxanne Moreil livre le second volume de L’âge d’or. Concluant ce conte médiéval, l’ouvrage éblouit par ses fresques et illustrations hautes en couleurs.
Lire la critique sur le site : Bedeo
Sceneario
25 novembre 2020
La grande force de cet album c'est le travail extrêmement audacieux de Pedrosa !
Lire la critique sur le site : Sceneario
LigneClaire
09 novembre 2020
Une chanson de geste plus proche de Villon que de l’amour courtois, une fresque saga grandiose envoûtante et d’une rare beauté. Ce tome 2 est, allons y, encore plus construit, enlevé, éblouissant que le précédent, ce qui n’est pas peu dire tant le dessin de Pedrosa resplendit d’émotions.
Lire la critique sur le site : LigneClaire
Citations et extraits (23) Voir plus Ajouter une citation
Depuis l'aube du premier jour, nous avançons d'un pas mal assuré, guidés par un esprit de concorde fragile. Ce que la campagne fertile offre en abondance, nous le partageons, tout comme le fruit de notre labeur commun. À nul ordre naturel notre destin ne répond. Nos volontés partagées dessinent elles seules notre horizon. Nous sommes faits du même sang, un même fer dans lequel nous forgeons nos lois. Qui se dresse et se part de l'habit de prince, nomme ici le maître, là le serviteur, fait de l'injustice une vertu. Ami, garde en souvenir les hivers passés. Jamais des tyrans, rien ne fut donné, mais conquis dans les combats menés. Depuis l'aube du premier jour, nous semons les plaines d'un nouveau monde où, sous la courbe lente du soleil, l'ombre ne fait que passer.
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- Tu crois qu'ils vont gagner ?
-Qui ça ?
-Ceux d'en bas.
- J'sais pas. peut-être. Ils nous encerclent et nous on est enfermés ici comme des couillons ...Mais de toute façon, ils peuvent monter à l'assaut tant qu'ils veulent et prendre la ville si ça leur chante... Je m'en fiche. pour nous ça change rien. Quel que soit le maître, on sera toujours à son service.
(Petit Paul et Poudevigne p.17)
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-Tu as été vaillant Guilhem, la princesse sait ce qu'elle doit à ses soldats.
- La princesse, hala ! On s'fracasse le crâne sur les remparts depuis des mois ! On peut bine tous crever les uns après les autres ... Tout c'qu'elle veut, la princesse, c'est poser son gracieux séant sur le trône !
(Tankred et Guilhem p. 48)
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- Pour nous, ça change rien. Quel que soit le maître, on sera toujours à son service.
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Depuis l'aube du premier jour
nous semons les plaines d'un nouveau monde
où, sous la courbe lente du soleil
l'ombre ne fait que passer.
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Vidéo de Cyril Pedrosa
Votre gorge est serrée ? Vous ressentez des nausées, un poids sur la poitrine, une perte de sens de l'orientation, ou un goût amer dans la bouche ? Contre tous ces maux, et tous les autres, un seul remède : le Grand Soulagement. Une méthode simple, efficace et pratique. Des objectifs clairs, à atteindre par étapes, grâce à une série de petits gestes précis à accomplir au quotidien. Dès les premiers résultats obtenus, vous pourrez développer votre méthode autonome en inventant vos propres gestes apaisants. Bientôt, grâce au Grand Soulagement, vos tourments ne seront plus qu'un mauvais souvenir. Les affiches du Grand Soulagement sont apparues en avril 2021 sur les murs de différentes villes en France. Il est instigué par Quentin Faucompré et Cyril Pedrosa. Pour les élections, vos affiches et votre bulletin de vote.
Dans l'enveloppe : – 19 affiches imprimées au format A3 dans une enveloppe kraft A4, sérigraphiée ‘Urgence élection'. – Affichettes pliées en deux face imprimée visible, sur un papier 90 gr. – 1 ton direct par affichette, offset monochrome. Donc 9 pantone. – En plus des 19 affichettes, une petite enveloppe électorale bleue, et un bulletin de vote “Le grand soulagement”
Les phrases sont écrites à deux. La conception graphique des affiches et leur construction en diptyque, typographique et photographique, sont réalisées par Quentin Faucompré.
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