AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de jprathle


La construction de L'oeil de la nuit se fait un peu en trompe l'oeil, tout du moins au début. L'auteur nous embarque ainsi dans une relation un peu particulière entre Howard W Frink et Nathan Ashmeyer, deux hommes tout aussi tourmentés l'un que l'autre. Puis à la faveur d'un événement inattendu, alors que l'on était accroché par cette intrigue, on bascule dans une toute autre narration. Ce dispositif est assez malin, en plus d'être plutôt original : ces légers changements de rythme nous permettent de rester vigilant, d'être sans cesse aux aguets. Peut-être devrait-on faire l'analogie avec le titre du livre, provenant en partie de l'expression française « ne pas fermer l'oeil de la nuit », entendu à Paris par le personnage principal. Car l'histoire qui nous est racontée est celle d'un homme qui a tout au long de sa vie lutté contre ses démons intérieurs, ne parvenant jamais à trouver la paix.

Le choix de ce personnage, dont l'existence structure l'ossature de L'oeil de la nuit, est tout-à fait judicieux. Car Howard W. Frink a bel et bien existé, et il a vécu des événements passionnants, tout du moins pour ceux qui s'intéressent à la psychanalyse. Ceux dont cette discipline indiffère, voire rebute, risquent d'avoir du mal à cette figure, malgré les aventures plus ou moins rocambolesques qu'il va traverser. Car l'essentiel de sa vie va tourner autour de ce virus des esprits qui gagne alors le Nouveau Monde. Ce qui est l'occasion de croiser les figures paternelles de la psychanalyse, autant aux États-Unis qu'en Europe, dont bien entendu, et en premier lieu, Sigmund Freud. C'est là où le roman s'avère à la fois fascinant et décevant, Pierre Péju s'aventurant à certains moments dans des interprétations plus ou moins hasardeuses, s'insinuant non seulement dans les pensées du « Maître » mais aussi dans ses mots.

Exercice périlleux, L'oeil de la nuit n'en demeure pas moins un objet passionnant, tant de façon historique que littéraire. On ne connait en effet pas bien Howard W. Frink, et il semble aujourd'hui pertinent de mettre en avant non seulement les fondateurs de la psychanalyse mais aussi leurs premiers adeptes. Et l'angle que Pierre Péju adopte n'est pas vraiment militant, comme a pu l'être les récents détracteurs de Sigmund Freud. Car Frink n'a été pour ceux-ci qu'un bouc émissaire, preuve flagrante, à leurs yeux, de l'échec du professeur viennois. Or la personnalité de Frink était très complexe et le roman dessine un portrait plus nuancé que ce que l'on pourrait penser au premier abord. Et l'auteur le fait avec une plume tout à fait élégante, nous entraînant avant tout dans le domaine du romanesque, ce qui est une très bonne façon de captiver les lecteurs.
Lien : http://lecinedeneil.over-blo..
Commenter  J’apprécie          60



Ont apprécié cette critique (4)voir plus




{* *}