AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782081231641
254 pages
Flammarion (10/02/2010)
3.71/5   7 notes
Résumé :
Cette anthologie rassemble un pan ignoré de la littérature française : les écrits que des femmes d'exception et quelques écrivains célèbres ont consacrés à un combat de longue durée, celui de l'égalité entre hommes et femmes. Accès à l'instruction, droits civils et politiques, droit au divorce, accès à tous les métiers, égalité des salaires : telles sont quelques-unes des revendications qui reviennent au fil des textes de ce recueil. De Christine de Pizan, première ... >Voir plus
Que lire après Écrits féministesVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Sous-titré "De Christine de Pizan à Simone de Beauvoir", c'est à un voyage subjectif dans l'histoire du féminisme que nous invite Nicole Pellegrin. Dans son introduction, elle explique clairement son parti pris et les motivations de ses choix. La littérature engagée dans le combat des femmes pour l'égalité est vaste et il n'était pas possible d'être exhaustive. C'est donc à travers quinze autrices que nous verrons l'évolution de la pensée féministe et que nous constaterons que du Moyen-Age à l'époque contemporaine, les revendications de celles-ci ne vont pas énormément changer. La route est encore longue...

La structure de ce recueil est claire et éclairante : courte biobibliographie de chaque écrivain.e puis quelques morceaux choisis.

Christine de Pizan (1363-1431)
C'est dans un français médiéval que nous lisons les premières revendications de ce livre : les femmes sont autant capable d'apprendre que les hommes et il n'y a pas d'excuse à laisser le sexe dit faible dans l'ignorance.

Marie le Jars de Gournay (1565-1645)
C'est à une femme savante que nous devons le deuxième extrait de ce recueil, en témoigne la foule de noms féminins cités par de Gournay dans ses écrits, allant de Hypathie à Areté en passant par Mlle de Schurman. Ici aussi, c'est la nécessité d'instruire les deux sexes de façon identique qui ressort. Si Dieu - qui est d'ailleurs une entité asexuée pour de Gournay - nous a créés de façon identique, il est normal que nos chances soient identiques.

François Poulain de la Barre (1647-1725)
Voilà un homme en avance sur son temps et absolument féministe ! Selon lui, si les hommes ne connaissent pas les mérites des femmes, c'est qu'ils refusent de lire leurs écrits. Il conviendrait donc d'apprendre à se connaître ; il va plus loin en affirmant que pour que les représentants des deux sexes puissent échanger, deviser et débattre de façon égalitaire, il est essentiel qu'ils reçoivent le même enseignement.
Tout comme de Gournay, de la Barre estime que la distinction physique ne peut être prétexte à discrimination et que cette distinction n'est pas judicieuse étant donné que ce sont les femmes qui "fabriquent" les hommes. Selon lui, les femmes devraient pouvoir accéder aux mêmes formations et aux mêmes emplois que les hommes.

Condorcet (1743-1794)
S'il existe une égalité entre hommes de classes sociales différentes, il faut une égalité entre hommes et femmes car celles-ci ne sont pas moins que capables que ceux-là. A ses détracteurs qui arguent que les femmes ont moins de temps disponible à cause de leur ménage, Condorcet rétorque qu'une femme attelée aux tâches domestiques n'est pas moins libre que le laboureur attaché à son champs. D'autre part, il souligne que les femmes de haut rang ont quant à elles pas mal de loisirs qu'elles pourraient utiliser à se cultiver par exemple.

Olympe de Gouges (1748-1793)
Nous sont ici présentés la déclaration des droits de la femme que nous avions précédemment exposés sur ce site.

Charles Fourier (1772-1837)
Voici un homme dont on peut mettre en doute la pertinence de sa présence en ces pages. S'il réclame effectivement une émancipation de la femme et une certaine liberté sexuelle, il n'en classe pas moins les dames en trois catégories - les Epouses, les Damoiselles et les Galantes - dont les critères me semblent extrêmement machistes. Chacun jugera.

Jeanne Deroin (1805-1894)
Dans l'état actuel des choses, la situation des femmes est à rapprocher de l'esclavage. C'est pitié car si elles recevaient une éducation correcte et si l'égalité entre les sexes était réelle, elles pourraient rayonner dans le monde avec plus de facilité que les hommes.

Flora Tristan (1803-1844)
L'extrait de ses oeuvres proposé ici est une explication du travail de Mary Wollstonecraft, féministe anglaise qui réclamait une égalité des droits civils et politiques, un accès égal aux études et aux emplois, ainsi que la légalisation du divorce.

André Léo (1824-1900)
La société limite la femme à son rôle de mère alors que celui-ci ne dure qu'une quinzaine d'années et que bien des femmes ne seront jamais mères. Ce sont pourtant ces mêmes femmes qui éduquent les enfants. Il est donc capital que les femmes puissent accéder à une éducation correcte afin que leurs fils et leurs maris les respectent et les estiment à leur juste valeur et qu'une égalité absolue puisse naître.

Maria Deraismes (1828-1894)
Est abordée ici la question de la prostitution qui est légale et même protégée par l'Etat à cette époque, en France. Deraismes s'en offusque en arguant qu'hommes et femmes sont égaux dans leurs désirs et que seule la femme est criminalisée alors que ce sont les hommes qui n'arrivent manifestement pas à canaliser leur sexualité.

Hubertine Auclert (1848-1914)
Probablement la penseuse qui m'a le plus touchée dans ce recueil. Elle se penche ici sur l'accès au travail et envisage la société capitaliste à travers le prisme du genre.
Il faut que les femmes puissent accéder à l'emploi et soient rémunérées à l'égal des hommes car cela permettrait aux hommes (et aux femmes) de faire grève sans se soucier excessivement de leur perte de revenu puisque l'autre moitié du couple gagnerait toujours un salaire. L'émancipation de la femme serait donc une émancipation sociale des travailleurs dans leur entièreté.
D'autre part, Auclert aborde la question de la citoyenneté : les lois sont faites par et pour les hommes et la femme n'a aucun statut légal ; il est donc temps que la femme devienne une citoyenne à part entière en accédant au droit de vote.
Enfin, last but not least, en 1898 déjà, cette pionnière propose une féminisation des noms afin que la langue réalise tous les possibles : une chose qui ne peut être nommée n'existe pas.

Madeleine Pelletier (1874-1939)
Un concept pédagogique révolutionnaire : les filles doivent être éduquées absolument comme les garçons : mêmes vêtements, mêmes lectures, mêmes héros, mêmes études. Pelletier anticipe la vague non binaire actuelle.

Nelly Roussel (1878-1922)
Deux textes présentés ici. le premier aborde la bêtise des nationalismes alors que nous sommes en pleine première guerre mondiale. le second se penche sur la nécessité de contrôler les naissances car la maternité et les grossesses asservissent et usent la femme alors qu'il y a déjà tant de malheureuses bouches à nourrir sur Terre.

Hélène Brion (1882-1962)
Socialiste engagée, Brion repousse les affirmations des syndicalistes et des socialistes sur l'inutilité d'un combat spécifiquement féministe. Les luttes syndicale et socialiste ne sont pas justes si elles ne prennent en compte les spécificités de la condition féminine. En effet, les syndicalistes de l'époque ne sont pas forcément favorables au travail des femmes et les socialistes ne collaborent que timidement avec des figures féminines. Hélène Brion rappelle que les femmes exploitées et méprisées ne demandent pas une aumône législative mais une véritable égalité tant sur le plan professionnel que politique.

Simone de Beauvoir (1908-1986)
Dans ces extraits, Simone de Beauvoir revient sur l'accueil réservé au Deuxième Sexe et repense son engagement et sa définition du féminisme.

Au fil de ce voyage en quinze étapes, force est de constater que les revendications restent les mêmes au fil des siècles : éducation identique pour les filles et les garçons, accès à toutes les professions, égalité salariale, droits de l'humain et non de l'homme, inclusion dans la vie politique, liberté sexuelle... Si la plupart sont rencontrées dans nos contrées occidentales, le chemin est encore long dans certains pays et les acquis restent fragiles dans les nôtres.
Commenter  J’apprécie          00
Cet ouvrage propose une série de textes, écrits du Moyen âge au XXe siècle par des auteurs français, qui défendent les droits et la condition des femmes : droit au vote, à un salaire égal à celui des hommes pour le même travail, à l'avortement… Il mêle des textes d'auteurs célèbres, comme Simone de Beauvoir, à ceux d'autres moins connus, à l'image de Maria Deraismes ou Madeleine Pelletier. Il permet ainsi de disposer d'un premier accès à des essais souvent difficiles à trouver, certains n'ayant pas été republiés depuis des années. Par son organisation chronologique, il propose également au lecteur de suivre l'évolution et l'histoire de ces revendications.

Écrits féministes de Christine de Pizan à Simone de Beauvoir est donc un livre très intéressant pour toute personne s'intéressant au féminisme. Mais on peut regretter un certain manque de mise en contexte des textes présentés, ceux-ci n'étant accompagnés d'aucunes notes autres que celles d'origine.

Un ouvrage dont le principe et la réalisation sont à saluer, mais dont la lecture peut s'avérer ardue pour les non-initiés.
Commenter  J’apprécie          40

Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Et la femme, alors, la femme parachevée, créatrice de lumière, de tendresse et de beauté, la génération consciente, fière de sa mission sacrée, de son sacerdoce librement rempli dans la joie, la quiétude et l'universel respect, de quelle indignation et de quelle pitié ne frémira-t-elle point en retrouvant dans les livres jaunis, parmi la poussière du passé, la douloureuse histoire de ses aïeules, des mères tragique d'aujourd'hui ! ... l'histoire de celles qu'écrase le fardeau de l'enfantement sans relâche, sans consentement, et souvent sans amour, pauvres créatures passives qu'un soir de ribote, une brute féconde inconsciemment ; qui, jusqu'à la dernière minute, traînent leur ventre endolori et lourds dans les ateliers infernaux et qui, rentrant au logis, exténuées, doivent encore "trimer" pour toute la famille, servant l'homme, soignant les marmots ; l'histoire de celles qui subissent sur le grabat de leur taudis, sans air l'été, sans feu l'hiver, l'épreuve suppliciante, l'indicible torture, et qui, au bout de trois ou quatre jours, reprennent toutes meurtries et pantelantes, leurs besognes de bêtes de somme, attendant avec angoisse la prochaine grossesse, qui ne tardera pas ; l'histoire aussi de ces filles-mères, des mères réprouvées, des mères maudites, de ces victimes entre les victimes, victimes de la lâcheté de l'homme et de l'ignominie sociale, qui souffrent dans leur chair, leur cœur et leur esprit, tout ce que les lois, les mœurs, les institutions et les préjugés peuvent ajouter de raffinements de cruauté de la Nature ; de celles que le fruit de leur amour trompé a menées au vice ou au crime, au ruisseau ou à la prison ; l'histoire de toutes les mères, enfin, riches ou pauvres, "honnêtes" ou "avilies", qui laissent leur beauté, leur santé, leur vie même, sur le champ de bataille de la maternité, de toutes les mères que leur travail sublime, qui les auraient faites reines chez les abeilles, a fait esclaves chez les humains ! (N. Roussel)
Commenter  J’apprécie          00
L'éducation de la femme est dirigée de manière à comprimer toutes ses facultés morales et intéllectuelles (sic), on veut lui persuader qu'elle est inférieure à l'homme ; et l'on s'efforce de réaliser autant que possible cette odieuse supposition.
Si dés (sic) l'enfance on appercoit (sic) en elle des germes de franchise, de courage, et de hardiesse, on s'empresse de les étouffer comme contraire aux devoirs de son sexe, née pour la servitude elle doit apprendre à dissimuler, elle doit être humble et timide, les pleurs et la prière, sont les seules armes qu'elle doit employer contre l'oppression.
est-elle douée d'un esprit élevé, à (sic)-t-elle des penchants studieux, on s'efforce de comprimer en elle ce qui pourrait lui rendre sa force et sa dignité morale.
on lui inspire des gouts frivoles, on lui insinue que le don de charmer, l'art de plaire doivent être les seuls objets de ses vœux, l'unique but de ses actions, et si franchissant tous les obstacles elle s'élevait au dessus des préjugés de son séxe (sic), quand même elle parviendrait au plus haut degré de savoir et de supériorité réelle ; toutes les carrières lui sont fermées, elle ne peut prétendre à aucune fonction publique, l'entrée des lycées, des facultés, des académies, lui est interdite. (J. Deroin)
Commenter  J’apprécie          00
Mais enfin qu'est-ce que votre féminisme ? Qu'est-ce qu'il demande en plus de ce que nous offrons ?
(...) Le vrai féminisme c'est d'être socialiste ! (...) Le vrai féminisme c'est d'être syndicaliste. (...)
A u nom d'elles toutes, je voudrais essayer d'expliquer ici pourquoi c'est faux, pourquoi les militants hommes eux-mêmes n'y croient pas beaucoup et se sentent troublés et inquiets devant le féminisme qui s'affirme et qu'ils ne comprennent pas (...) - Hélène Brion
Commenter  J’apprécie          10
Présentement, pour gagner plus d'argent que la femme, l'homme fait beaucoup moins de travail ; et quand il sort des administrations, des manufactures ou des ateliers, c'est pour fumer sa pipe ou son cigare, aller boire ou flâner, tandis que, quand la femme quitte harassée son lieu de travail, c'est pour recommencer un autre travail, celui du ménage ; la femme est soumise à un réel travail de continuité. (H. Auclert)
Commenter  J’apprécie          10
Si, dès les premiers ans, vous mettez à votre petite fille des robes chargées de rubans et de garnitures, si vous la couvrez de bijoux, vous en ferez une coquette qui ne pensera qu'à s'attifer. Tous les efforts que vous pourrez faire ensuite pour former une personne sérieuse et digne seront vains. Elle pourra vous écouter avec une déférence apparente, mais ses véritables éducatrices seront les petites camarades aux falbalas desquelles elle comparera les siens. L'enfance achevée, vous n'aurez, si vous êtes riche, qu'une poupée mondaine. Si vous êtes pauvre, vous aurez bien pis encore, car votre enfant sera décidée à tout pour se procurer les colifichets objets de son désir. (M. Pelletier)
Commenter  J’apprécie          00

Videos de Nicole Pellegrin (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Nicole Pellegrin
La naissance est un “tranchant du réel” qui fait partir la narratrice du roman de Marie Richeux sur les chemins d'une délicate et émouvante quête généalogique pour découvrir un double héritage : celui d'une lignée des “filles-mères” et celui du milieu des tisserands auquel appartenait l'une des aïeules de l'héroïne. Le cours de ces vies minuscules de femmes sages est ainsi associé à “l'ouvrage cousu” du texte : la métaphore filée de la matière à tisser permet de fécondes mises en lien, notamment avec les travaux de Nicole Pellegrin sur l'histoire des femmes et de la culture matérielle (en particulier, celle des textiles).
Retrouvez sur notre webmagazine Balises : L'infographie "Le textile, tout un art" https://balises.bpi.fr/le-textile-tout-un-art/
L'entretien avec Sophie Brodier : "Histoires de filles-mères, histoires de femmes" https://balises.bpi.fr/sophie-bredier/
Suivre la bibliothèque : SITE http://www.bpi.fr/bpi BALISES http://balises.bpi.fr FACEBOOK https://www.facebook.com/bpi.pompidou TWITTER https://twitter.com/bpi_pompidou
+ Lire la suite
autres livres classés : féminismeVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus


Lecteurs (53) Voir plus



Quiz Voir plus

Les Chefs-d'oeuvre de la littérature

Quel écrivain est l'auteur de Madame Bovary ?

Honoré de Balzac
Stendhal
Gustave Flaubert
Guy de Maupassant

8 questions
11105 lecteurs ont répondu
Thèmes : chef d'oeuvre intemporels , classiqueCréer un quiz sur ce livre

{* *}