Si vous aimez les enquêteurs attachants, humains, complexes, ce livre est fait pour vous. Armand Gamache demande beaucoup à ses hommes, pas en terme d'exploits physiques, non, je dirai plutôt en terme d'honnêteté intellectuelle. Oser dire que l'on ne sait pas. Oser poser les bonnes questions. Oser s'aventurer sur des terrains où d'autres ne vont pas, parce que ce n'est pas confortable du tout – qui a dit qu'il était agréable de traquer des meurtriers ? Se rappeler aussi que l'on travaille pour obtenir la justice, et non un certain confort.
Oter la vie à quelqu'un n'est pas, pour Armand Gamache, quelque chose de normal – il est bon aussi de le rappeler. Tuer un animal juste pour le plaisir non plus. La victime, qui voulait développer une philosophie de vie consistant à étouffer ses émotions, portait des bottes en authentiques fourrures de bébé phoque. le point de vue de Gamache est sans appel, je vous laisse le découvrir : Armand Gamache avait la mâchoire serrée. « Qui peut porter de telles bottes ? Les Inuits, peut-être. Dans l'Arctique. Mais même eux ne tuent pas de bébés phoques. Les Inuits sont des chasseurs respectueux et sensibles, qui ne songeraient jamais à tuer les jeunes. Ils n'ont pas besoin de le faire. «
Non. Seules les brutes tuent les bébés. Seules des brutes soutiennent ce commerce. D'animaux, certes, mais toute forme de tuerie insensée faisait horreur à Gamache. « Quelle sorte de femme peut bien porter en guise de bottes de cadavres de bébés incrustés de griffes métalliques ? »
Armand Gamache se demanda si CC de Poitiers ne tentait pas, à ce moment même, de s'expliquer devant un Dieu perplexe et quelques phoques furieux.
Qui avait-elle pu pousser assez à bout pour être tuée sur une chaise électrique soigneusement préparée ? Surtout, comment se fait-il que personne n'ait rien vu, pas même le photographe chargé d'immortaliser CC ? Gamache avance à son rythme, ce qui ne veut pas nécessairement dire qu'il est lent, mais qu'il prend le temps de faire et de dire les choses, quitte à secouer certaines personnes, les mettre face à leurs responsabilités. S'il est un fil rouge dans ce roman, il est celui de la transmission. Que léguons-nous à nos enfants ? Quel impact, négatif ou positif, aurons-nous sur eux ? Refuser de porter le fardeau légué par ses parents n'est pas facile, et il faut parfois une vie entière, une rencontre pour y parvenir.
Reste une énigme à la fin de ce roman : comment des personnages aussi négatifs que CC peuvent-ils exister, comme en contraste avec des personnalités aussi lumineuses qu'Emilie ou Clara ?
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