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Critique de irisrivaldi


Le contexte :

Sous un angle dystopique, le Prochain Testament évoque un futur à nos portes via le parcours du narrateur, habitant du District et employé par la toute-puissante Firme, laquelle surveille en continu par écrans interposés les habitudes de vie de la population. Dès lors, la vie se décline en analyses et statistiques et chacun a plus que jamais conscience de n'être qu'un numéro.
Dorénavant, les couples ne cohabitent plus et une assistance virtuelle offre toutes les garanties d'un sexe ultra sûr. Quant aux enfants, ils ne sont plus conçus « au feu de bois » mais grâce à l'Inovorium dont la technologie avancée encadre avec méthode et fiabilité les naissances. Les rejetons qui rejoignent notre bonne vielle planète par ce biais sont à présent « livrés clés en main » à la demande de géniteurs, certes réduits à de basiques gamètes mâles et femelles, mais libérés des terribles contraintes et aléas d'une gestation in utero. Des néo-parents qui pourraient se retrouver dans un slogan du genre « Les enfants tarés, c'est du passé, l'Inovorium c'est le summum ! ». Un humain de compète, issu de ce procédé poussé à son paroxysme, pourrait même zapper les étapes, toujours délicates, de l'enfance et de l'adolescence pour voir le jour déjà adulte. Et puis soyons fous, allons plus loin encore, cet être accéderait enfin à l'immortalité, deviendrait l'égal de Dieu et bouclerait définitivement la boucle de l'absurdité de l'existence.
Quant au narrateur, bien qu'issu d'un père et d'une mère, on ne saura jamais comment il s'appelle pour bien marquer la rupture avec les origines. D'entrée de jeu l'auteur « tue » d'ailleurs le Père et inaugure son histoire avec une incinération d'anthologie, dans les pages suivantes, il brosse le portrait d'une mère indifférente qui cherche en permanence à se préserver des ravages du temps. Bref, il est seul au monde. Et ce n'est pas sa compagne Marie, tentée par une conception aseptisée, qui lui apportera du réconfort.

Mon ressenti :

À l'heure où moult têtes pensantes se penchent sur le danger potentiel d'une Intelligence Artificielle, qui deviendrait incontrôlable dans une société hyperconnectée, ce prochain Testament n'offre plus un roman d'anticipation mais un regard teinté d'ironie sur une réalité glaçante.
Dans cet ordre d'idées, je salue la manière dont a été campé l'atrabilaire Monsieur Ying, qui rappellera quelques joyeusetés à toutes les victimes d'un management par la terreur et, qui, ici, tyrannise ses subordonnés depuis un écran. On peut se demander si ce personnage tient encore de l'humain ou s'il n'est, tout compte fait, que le produit d'une funeste machination d'algorithmes.

le propre du récit d'anticipation est, sous couvert d'étudier les dérèglements du monde, d'alerter sur ce que l'avenir nous réserve. Sont ici dénoncés les écueils d'une société de contrôle qui n'est, en définitive, qu'une relecture de la nôtre. Il s'agit davantage d'observer un microcosme où le lien social décline malgré l'abondance des moyens de communication. Tout ceci trouve d'ailleurs une terrible résonance avec l'actualité, en ces temps de pandémie, qui ont contribué à éloigner encore plus les individus, qui n'avaient déjà pas besoin de ça.
Puis, en écho au titre de l'ouvrage, le lecteur s'interrogera avec raison sur la place laissée à une quelconque transcendance : quid de la spiritualité ? Une question à laquelle s'en ajoute une autre, d'une simplicité biblique, et qui existe depuis l'aube des temps, celle qui entoure l'acte le plus naturel qui soit : la transmission de la vie.
Ainsi, comme dans toute dystopie qui se respecte, à l'arrière-plan du tableau principal s'en dessine un autre, aux antipodes du premier. Ici, cet autre univers s'ancre dans l'immense Parc des Vacations ; l'endroit où vont échouer les Déréférencé.e.s, ces hommes et femmes marginalisé.e.s, à tout jamais effacé.e.s des bases de données du District. En somme les rebuts d'un système pour qui la pression s'est avérée trop forte. Alors une vie alternative serait-elle encore envisageable ? Un renouveau possible grâce à une communion avec une nature jusqu'ici malmenée ? N'est-il pas trop tard ?
Lien : http://scambiculturali.over-..
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