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EAN : 9782070374137
118 pages
Gallimard (02/11/1982)
3.83/5   329 notes
Résumé :
De temps à autre, il est bon qu'un poète, que n'effraie pas l'air raréfié des cimes, ose s'élever au-dessus du vulgaire pour, dans un souffle épique, exalter notre aujourd'hui.

Car ne nous y trompons pas : ces courageux jeunes gens qui, au plus fort de la guerre, ont tout tenté (en vain, hélas !) pour éviter l'enfer algérien à un jeune militaire qui criait grâce, ce sont les vrais successeurs d'Ajax et d'Achille, d'Hercule et de Télémaque, des Argona... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (40) Voir plus Ajouter une critique
3,83

sur 329 notes
Une pépite !
Georges Perec adore jouer avec les mots. C'est parce qu'il les connaît bien qu'il s'amuse avec les figures de style, les néologismes et les métaphores.

L'histoire tient en deux lignes mais l'auteur arrive à l'étirer sur 119 pages parfois hilarantes, en tout cas burlesques.

Une bande de copains se donne pour mission de faire réformer un pote de leur pote pour qu'il ne parte pas crapahuter dans les djebels de Sidi-Belles-Abbesses (sic). Leur pote, après sa journée réglementaire, circule sur un petit vélomoteur pétaradant (à guidon chromé) entre la caserne de son pote et l'appartement de ses potes qui ne connaissent pas son pote.

Son pote s'appelle Karatruc, ou chose ou Karamel ou Karalélipipède, bref, un nom indéfinissable un peu comme la Castafiore qui écorche sans arrêt le nom du capitaine Haddock.

Perec ne s'encombre ni de syntaxe, ni de grammaire et encore moins de concordance des temps. Il s'agite, il répète, il embobine, il embrouille, il ajoute, il asticote, il part, il revient, il repart. C'est très drôle et on se prend à son jeu avec une bonne humeur contagieuse.

Une liste des figures de style utilisées (ou non) dans l'opus, clôt cette partie de rigolade en s'arrêtant toutefois après le "p" pour éviter la méningite au lecteur qui se gondole.

Lisez-le et offrez-le, tout le monde aura la banane.
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C'est l'histoire d'un jeune militaire, un certain Kara quelque chose, qui en pleine guerre ne veut pas aller en Algérie. Prêt à tout pour cela (il imagine même se faire rouler sur un pied), derechef il s'adresse au maréchal des logis Henri Pollack, un de ses potes, qui lui-même demande à ses potes de l'aider à éviter à son pote l'enfer du djebel. En attendant, chaque soir, après sa journée au Fort Neuf de Vincennes, Henri Pollack enfourche son pétaradant petit vélomoteur (à guidon chromé) pour regagner son Montparnasse natal où l'attend sa bien-aimée.

À lire et à relire, un texte jubilatoire beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît, puisque comme souvent Georges Perec se joue des mots, truffant son récit de syllogismes et de figures de style, dont il fait d'ailleurs à la fin du livre une liste, qui bien que non exhaustive est fort longue, et que paru en 1966 ce texte signe aussi l'engagement de Perec pour l'indépendance des colonies.

Challenge MULTI-DEFIS 2022

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En exclusivité exclusive : de la naissance d'une oeuvre ou quand le couple Perec passe à table. Action.

- Georges, as-tu une idée pour ton prochain livre?
- Justement Marie-Jo, j'y pensais. Je m'ennuie dans l'écriture. J'aimerais désormais me rajouter quelques contraintes.
- Euh... Mais... Ce n'est pas assez compliqué déjà d'écrire sans contrainte?
- Ce n'est pas faux... Quoique : premier roman, prix Renaudot. Tranquille Emile, les doigts dans le nez René. Mais j'aime les challenges. Beaucoup plus excitant et enrichissant d'avoir un cadre à respecter.
- Mais quand tu dis "contraintes", tu veux dire contrainte comme "je n'utilise aucun e dans mon roman" par exemple?
- ...
- Georges?
- Pardon. Je réfléchissais à ton histoire de disparition du e. Ça se tente... Bref. Non, là je pensais plutôt écrire un roman en y insérant tout ce qu'on compte de figures de style.
- Ah oui rien que ça... Tu réalises que tu vas faire fuir tes lecteurs?! Car à part l'oxymore et la litote, les figures de rhétorique, c'est du costaud à détecter... le lecteur lambda sera peut-être limité pour comprendre l'astuce, non?
- Arrête de prendre mon lecteur pour ce qu'il n'est peut-être pas. Puis je lui mettrai un lexique à la fin. Au kazoo. Enfin, juste quelques notes, histoire de lui montrer la voix. Au-delà d'un mètre soixante dix, ils sont grands, ils se débrouilleront. Et je ne vais pas caser de l'anacoluthe et du zeugme à tout-va non plus. Ce sera aussi plein d'humour, de jeux de mots, rassure toi, je vais éviter le relou.
- Relou...?
- Lourd à l'envers. Ça n'existe pas je sais, mais je voulais essayer un nouveau truc.
- Ok le créateur. Mais ce n'est que ton deuxième roman, penses-y! le Renaudot t'a rudement retourné, rien à rajouter le rhétoricien?
- Wow... Mon modeste palindrome ne vaut ton tautogramme.
- Toto qui?
- Laisse tomber le tautogramme, mais pas le plat, merci.
- Tu es relou Georges... Et sinon, il va parler de quoi ton roman? Parce que c'est pas le tout de mettre Anna Biloute et ses oeufs, faut une histoire.
- Anacoluthe et zeugme. Bon, je pensais à pondre un truc sur la guerre. Mais avec une écrasante légèreté tu vois. Juste pour montrer cette connerie d'envoyer de braves types qui préfèrent dormir plutôt que partir et revenir avec deux trous rouges sur le côté droit.
- Pourquoi pas. Tu as des idées?
- Oui, je pensais créer un gars dont personne ne retiendrait le nom. Genre Karabistouille, Karaoké ou quelque chose approchant, qui cherche à tout pris à échapper à l'enrôlement pour l'Algérie.
- Mmm... Peut-être risqué le sujet. T'as intérêt à marcher sur des zeugmes..! Mdr!
- Mdr?
- Acronyme pour mort de rire. Ça n'existe pas je sais, mais tu me donnes envie d'essayer de nouveaux trucs. Et sinon, il ne se sentira pas un peu seul ton Karamachin là?
- Non, je vais lui coller un margis et sa bande de potes pour l'aider à se faire réformer.
- Un mar-quoi?
- Margis. Mot-valise. Contraction de maréchal des logis si tu préfères.
- Curieusement je préfère oui... Ça ne va pas être simple à repérer tes trucs stylés vu comme ça...
- Mais ce sera justement tout l'intérêt de l'oeuvre! le lecteur, s'il le souhaite, devra lire et relire, chercher, fureter, fouiner, farfouiller! Décortiquer chaque phrase, analyser chaque mot! Une lecture infinie avec toujours de nouvelles découvertes! Tu imagines le potentiel littéraire? Digne de l'Ouvroir. (Il serait temps que je contacte Raymond moi). Et ils pourront même l'utiliser au collège pour apprendre les figures de rhétorique! du pain béni pour les jeûnes.
- Mouais... Je parie qu'ils ne retiendront quand même que la litote et l'oxymore tes collégiens. Et tu as déjà trouvé un titre?
- Non, j'expire là. Mais j'attends l'inspiration. Allez suffit, à table maintenant.
- Y a pas de figure là?
- Je meurs de faim si tu préfères.
- Très bien, alors à table. Mais s'il te plaît, avant de dîner, tu peux aller ranger ton vélo à guidon chromé au fond de la cour?
- ...
- Georges?
- Je viens de l'avoir.
- Tu as vu qui?
- L'inspiration.
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Autant vous prévenir tout de suite : ce court roman paru en 1966 est inclassable, fantaisiste, répétitif, allumé, poétique, malicieux, inventif, corrosif, génial et...totalement inutile ! Mais que c'est drôle et imprévisible, une parenthèse, un chemin de traverse, en dehors des chemins balisés de la littérature. Préfacé avec tendresse, je trouve, par Richard Bohringer.
Bref, on aime ou on n'aime pas !

Bien sûr, il y a une trame principale, un prétexte à semer " des fleurs et ornements rhétoriques, et, plus précisément, des métaboles et des parataxes que l'auteur croit avoir identifiées dans le texte qu'on vient de lire. ", autrement dit une quantité incalculable de figures de style répertoriées par l'auteur lui-même dans un index en fin d'ouvrage.
Très synthétiquement, pendant la guerre d'Algérie, un groupe de jeunes gens s'ingénient à trouver une solution pour faire réformer un de leur camarade engagé. Mais cela ne suffit évidemment pas à résumer l'état d'esprit de cette pure fantaisie littéraire, deuxième roman de Georges Perec, membre il ne faut pas l'oublier de L'Oulipo - OUvroir de LIttérature POtentielle - ce groupe international de littéraires et de mathématiciens fondé en 1961 que R. Queneau définissait comme des " rats qui construisent eux-mêmes le labyrinthe dont ils se proposent de sortir ".
" Un club de liberté. Liberté d'écrire, liberté de créer "comme le nomme Bohringer dans sa préface.

C'est typiquement le genre de livre qui résiste bien au-delà d'une première lecture, dont on n'épuise pas le contenu si facilement. Comme une balade en montagne ou en forêt que l'on affectionne, on y revient avec plaisir pour découvrir d'autres points de vue, d'autres figures de style savoureuses.
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Par miles nombre usesoeuvres de Georg esPerec, ses grandso pus, il ne faut pasman querce pe titoups! (Fredonnez-moi pradonnez-moi ce leger eruct! J'ai trop bu j'ai trop lu j'ai trop ru…).

Comme souvent, Perec s'amuse. Comme toujours, il y a beaucoup plus que du divertissement dans ce livre. Il faut beaucoup de bosse, pas mal d'application, et une lourde once de talent, pour aboucher tellement d'enfantillages en si peu de pages, sans que cela devienne pueril. Parce que derriere ses jeux de gamin, ses jeux de mots de lignes et de pages, apparait clairement son attitude face a la guerre du moment (c'etait la guerre d'Algerie), sa contestation, son rejet de la levee de bannieres chauvines. Parce que derriere ses boutades stylistiques, derriere l'accumulation de calembours de potaches, Perec se regarde au miroir et raille un peu une certaine jeunesse intellectuelle, doree en fin de compte, dont il fait partie.

Mais finalement, le plus important est tout de meme le plaisir avec un grand P que procure ce livre. Que du bonheur (avec un grand B)!

P.S. Je pousse a lire une critique dans ce site: une qui est claire comme G. Parce que.

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Citations et extraits (28) Voir plus Ajouter une citation
Il leur ferait comprendre que s’il y avait quelqu’un de zinzin dans le régiment, c’était bien lui, et que les crises de maspéroclastie bavotante du capitaine Dumouriez, c’était de la bibine à côté de ce qu’il avait.
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C'était un mec, il s'appelait Karamanlis, ou quelque chose comme ça : Karawo ? Karawasch ? Karacouvé ? Enfin bref, Karatruc. En tout cas, un nom peu banal, un nom qui vous disait quelque chose, qu'on n'oubliait pas facilement. C'aurait pu être un abstrait arménien de l'Ecole de Paris, un catcheur bulgare, une grosse légume de Macédoine, enfin un type de ces coins-là, un Balkanique, un Yoghourtophage, un Slavophile, un Turc. Mais, pour l'heure, c'était bel et bien un militaire, deuxième classe dans un régiment du train, à Vincennes, depuis quatorze mois. Et parmi ses copains, y'avait un pote à nous, Henri Pollak soi-même, maréchal des logis, exempt d'Algérie et des T.O.M (une triste histoire : orphelin dès sa plus tendre enfance, victime innocente, pauvre petit être jeté sur le pavé de la grande ville à l'âge de quatorze semaines) et qui menait une double vie : tant que brillait le soleil, il vaquait à ses occupations margistiques, enguirlandait les hommes de corvée, gravait des coeurs transpercés et des slogans détersifs sur les portes des latrines. Mais que sonne la demie de dix-huit heures, il enfourchait un pétaradant petit vélomoteur (à guidon chromé) et regagnait à tire-d'aile son Montparnasse natal (car il était né à Montparnasse), où que c'est qu'il avait sa bien-aimée, sa piaule, nous ses postes et ses chers bouquins, il se métamorphosait en un fringuant junomme, sobrement, mais proprement vêtu d'un chandail vert à bandes rouges, d'un pantalon tire-bouchonnant, d'une paire de godasses tout ce qu'il y avait de plus godasse et il venait nous retrouver, nous ses potes, dans des cafés où c'est que nous causions de boustifailles, de cinoche et de philo.
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Du temps fugit. L'était tard. Certains s'endormirent à même le sol. Il y en avait qui partaient à pas feutrés, d'autres qui se prenaient les pieds dans les bouteilles et se mettaient à insulter le nom du créateur, d'autres qui allaient à la cuisine pour manger du fromage. Des femmes voilées de noir s'agenouillaient devant l'icône et se signaient priant pour le salut des soldats.Cependant qu'indifférent à la chose, sur l'électrophone en sourdine, Lester Young, qu'accompagnait Paul Chambers à la basse et Kenny Clarke aux drums, interprétait quelque chose de très simple et de très beau (Blue Star Norman Granz, n°6933).
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Georges Perec. Écriture. Plaisir absolu de l'écriture.

Son univers malicieux rendait heureux. Il donnait à la vie des contours possibles, des rêves et des sourires. C'était un inventeur, un sculpteur, un peintre des mots. Sa tendresse éclaboussait la page, admirable jouisseur des mots.

Extrait de la préface de Richard BOHRINGER
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Nous écrivîmes une belle lettre pour un copain qui était médecin à Pau (précisons qu'il n'était pas dermatologue et que sa femme n'était pas écuyère), belle lettre à mots couverts, car nous nous méfiions de la D.S.T. dont on disait qu'elle avait des hommes à elle dans tous les bourreaux de poste (p. 31).
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