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Critique de Eve-Yeshe


Avant de partir en croisade avec le roi Neuf, Lion marie sa fille aînée Eléonore à Guillaume, dit Ours, pensant protéger ainsi son fief et en son absence la jeune soeur, Adélaïde sera sous la « protection » de Cathaud, la soeur tyrannique de Guillaume.

Le roi Neuf désire se faire pardonner après avoir donné l'ordre d'incendier une église dans laquelle s'étaient réfugiés des femmes, des enfants… pour mettre la main sur le domaine du comte des Mirabelles, vassal pourtant exemplaire, et le confier à son cousin.

L'ordre a été exécuté par le meilleur ami de Guillaume, Tancrède qui va suivre le roi dans cette croisade.

Il s'agit d'un mariage de raison, car Guillaume est un veuf inconsolable : sa femme est morte en couches ainsi que le bébé, et la nuit de noces est plutôt sinistre, car il a beaucoup bu…

Rien ne se passe comme prévu : un voisin ambitieux, le duc des Ronces, lorgne sur les terres de Guillaume, et de Lion et tous les moyens sont bons pour arriver à ses fins, il a même épousé la fille du roi de l'Autre Côté de la Mer…

Ils ont tous des noms, des surnoms : Guillaume Ours, Lion, Tancrède dragon, ou Loup pour le neveu de Guillaume, et pour les femmes : Éléonore Salamandre, Adélaïde Abeille, ou Cathaud l'Araignée…

On note déjà que le roman démarre en force avec, en exergue, cette phrase : « Femme, tu es la porte du diable. » Tertullien (155-222). Cela nous met tout de suite dans l'ambiance…

Camille de Peretti raconte, dans une langue truculente du Moyen-Age, la soif des hommes de conquérir les terres, d'étendre leur influence, leur désir de se battre, leurs beuveries tout comme leur camaraderie, car l'amitié qui unit Guillaume et Tancrède est belle et sincère.

Elle nous parle aussi du statut des femmes : elles doivent se taire, être soumises, au service du mari, subir l'acte sexuel, les dents serrées… et le destin de ses deux soeurs emporte le lecteur, leur opiniâtreté, la manière dont elles doivent éviter les pièges que l'on tente de refermer sur elles.

Si Éléonore réussit à endosser le rôle de « maitresse de maison », d'épouse soumise, même si elle batifole un peu avec un ménestrel, c'est beaucoup plus difficile pour Adélaïde, qui doit obéir à la soeur de Guillaume, broder à contre coeur, alors qu'elle est un esprit libre. Elle ne retrouve sa joie de vivre qu'en découvrant les plantes médicinales, décoctions et autres remèdes que prépare « l'apothicaire » juif, le Hibou. Cette gamine m'a beaucoup plu !

« Adélaïde ne se laissera pas emprisonner, elle comprend qu'elle doit se libérer elle-même, découvrir ses propres dimensions, refuser les entraves. »

L'auteure évoque aussi très bien la maltraitance des domestiques qui sont battus, et se taisent, subissent le maître.

Le maître rend lui-même la justice : juger les voleurs, mais aussi les animaux, tel un percheron qui a renversé une enfant et qui est jugé coupable, condamné à avoir la tête tranchée.

Camille de Peretti décrit aussi très bien, le rôle de l'Église, des prêtres qui voient des sorciers partout et aiment tant les persécuter, les brûler… avec un bonus particulier pour le chapelain complètement tordu, pervers, qui ne cherche qu'à nuire à Adélaïde alias l'Abeille. Elle a découvert la joie d'apprendre : les plantes, mais aussi les maladies, (l'ergotisme fait alors des ravages). Et bien-sûr, il faut tuer cette joie suspecte dans l'oeuf. Une femme doit rester dans l'ignorance et surtout ne pas penser, ni même rire.

« … à se tenir correctement, à ne parler de rien et surtout à ne pas rire car « le rire est une souillure de la bouche » lui rabâche cette ennuyeuse. »

Les propos sur les femmes font frémir, mais sont hélas des idées répandues encore dans les milieux intégristes…

J'ai bien-sûr cherché à trouver des ressemblances avec des personnes ayant existé (on ne se refait pas !) mais ce n'est pas évident. le roi Neuf fait penser à Louis VII, l'époux d'Aliénor d'Aquitaine, qui avait mis le feu à l'église de Vitry-en-Perthois… Mais pour les autres c'est plus difficile, je m'y connais peu en blasons, emblèmes, alors il n'est pas aisé de repérer qui que ce soit derrière, Lion, Ours, Loup…

J'ai bien aimé ce roman qui m'a permis de me replonger dans le Moyen-Age, sa langue truculente, ses coutumes et ses côtés monstrueux.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Calmann-Lévy qui m'ont permis de découvrir ce roman ainsi que son auteure.

#LeSangDesMirabelles #NetGalleyFrance
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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