AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Hélène Périvier (Autre)Thomas Piketty (Autre)
EAN : 9782724626759
158 pages
Les Presses de Sciences Po (22/10/2020)
4.25/5   6 notes
Résumé :
La science économique a été pensée par des hommes, pour être au service d'une société dirigée par des hommes. Elle est aussi la science sociale la moins féminisée : les femmes représentent à peine un quart des économistes. "Je suis une économiste féministe" , affirme Hélène Périvier. En levant le voile sur l'apparente neutralité des concepts et des analyses de cette discipline, elle met au jour les ressorts d'une organisation sociale issue du modèle patriarcal, cent... >Voir plus
Que lire après L'économie féministeVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Cet ouvrage me semble être le résultat d'un cours universitaire : plus qu'il ne revêt la forme d'un essai qui défend une thèse, il se soucie de retracer assez exhaustivement l'histoire des théories économiques, celle de la pensée féministe, celle des politiques publiques économiques (notamment en France et un peu aux États-Unis) et enfin les thématiques économiques dans lesquelles l'égalité de genre est défaillante. Les présupposés, déjà mis en exergue par Thomas Piketty dans la Préface, sont importants à garder à l'esprit : derrière ses formulations et prétentions scientifiques et ses équations mathématiques, l'économie est une politique, elle reflète des choix et des priorités, se base sur des postulats arbitraires et occulte certaines variables – en particulier celles qui relèvent des mécanismes de domination genrée – en fonction de ses a priori politiques. de plus, l'économie est une discipline qui a toujours été foncièrement masculine, dont les femmes sont encore très largement absentes/exclues. Si la critique féministe contemporaine n'est pas systématiquement anticapitaliste, il est démontré cependant que le néolibéralisme est incompatible avec la finalité éthique de l'égalité des genres, pis, qu'il tend à la faire dévier vers la problématique de l'efficacité et de la performance, ce qui la dénature.
Toutefois, cet ouvrage ne possède par la nature d'un travail politiquement militant ; il se limite, dans sa conclusion, à quelques préconisations somme toute « réformistes », techniques et pratiques. En somme, le lecteur est accompagné dans une réflexion qui met en regard l'économie avec le féminisme afin de montrer dans quelle mesure et de quelle manière celle-là eût gagné à se valoir de celui-ci. Ni plus, ni moins.



Table des matières [avec appel des cit.]

Préface par Thomas Piketty
Introduction. Je suis une économiste féministe.

Première partie. L'économiste, la féministe et la cité
Chap. 1 : L'économie et ses excès [cit. 1]
Chap. 2 : le féminisme, ça pense ! [cit. 2]

Deuxième partie. Au-delà de l'homme économique
Chap. 3 : Les critiques féministes de l'économie [cit. 3]
Chap. 4 : Sexe et genre de l'économie

Troisième partie. L'économie au défi de l'égalité
Chap. 5. de Monsieur Gagnepain à Madame Gagnemiettes [cit. 4, 5]
Chap. 6. La priorité de l'égalité [cit. 6]

En guise de conclusion. Pour une économie politique féministe [cit. 7]
Commenter  J’apprécie          110
S'il faut retenir quelque chose de l'ouvrage d'Hélène Périvier, c'est sa force de conviction, qui se lit d'un bout à l'autre de son argumentaire. Ne vous fiez pas à son petit format, cet opus est en réalité un plaidoyer solide qui nous explique comment le féminisme ouvre de nouvelles voies de développement à la discipline économique, et comment les économistes se sont parfois trompés en omettant le travail des femmes. Elle met en évidence le rôle des femmes dans l'économie et comment celui-ci devrait être mieux pris en compte dans les indicateurs de mesure et les travaux scientifiques.

Ce livre se compose de six chapitres, articulés en trois parties. L'ensemble est étayé de notes de bas de page (présentes pour justifier le propos et permettre d'approfondir mais en nombre suffisamment restreint pour ne pas rebuter) ; pas de bibliographie en fin d'ouvrage pour ne pas conférer un caractère trop universitaire à cet essai.

Est-ce un livre grand public ? Je ne le pense pas, car saisir son propos suppose parfois de solides connaissances en théories économiques, et les allusions et éléments sous-jacents ne sont pas nécessairement explicités. Est-ce un livre universitaire ? Pas davantage, en ce sens qu'on sent une certaine liberté de parole. En fait ce libre est à mi-chemin : une critique de la discipline économique, dont on espère qu'elle sera lue par les chercheurs et chercheuses en économie, mais aussi une clé de compréhension des implications du féminisme en économie au sens large, et qui concerne donc tous les hommes et toutes les femmes.

J'ai appris beaucoup de choses en lisant ce livre, en particulier sur les biais des théories économistes au regard du féminisme. Je n'ai pas forcément saisi tous les tenants et les aboutissants de son argumentaire, mais je pense qu'une seconde lecture me permettra de lever certains points pour l'instant obscurs. En tant que chercheuse j'ai été particulièrement sensible au passage consacré à la question de la production scientifique (chapitre 4, et en particulier la façon dont les travaux féministes sont valorisés lorsqu'ils sont conduits par des hommes alors que les femmes sont accusées de parti pris pour des mêmes travaux).

A l'issue de ce livre, je me sens plus solide dans mes convictions féministes, et mieux armée pour comprendre certains phénomènes.

Merci à Babelio et aux presses de Science Po pour cette belle découverte, et merci à l'autrice pour cette performance qui ne peut que compter dans le paysage universitaire.
Commenter  J’apprécie          20
Ce livre est structuré en trois partie, la première pose les bases en présentant les différentes écoles de l'économie et comment l'économie est un monde très représenté par les hommes. Dans la deuxième, l'auteure nous décrit la pluralité du féminisme (éco-féminisme, féminisme marxiste, ...) pour nous amener à la troisième partie qui traite plus largement de la question de l'égalité entre les hommes et les femmes mais aussi par rapport aux minorités ethniques par exemple.
La première partie peut paraître un peu rude à première vue pour les non initiés à l'économie théorique. Hélène Périvier a une écriture très académique tout au long du livre et peu parfois paraître difficile à suivre mais on s'y fait rapidement.
L'économie féministe à l'instar du féminisme, est plurielle. Elle se décline en plusieurs écoles économiques. Elle ne se résume pas à une simple opposition à l'école néo-classique, bien que nombre d'économistes féministes (hommes ou femmes) revendiquent leur appartenance à l'hétérodoxie et "associent la critique féministe à celle du capitalisme et de l'individualisme".
Contrairement à ce que l'on pourrait penser le féminisme dans l'économie n'introduit pas de biais idéologique et au contraire nous débarrasse des biais essentialistes et cognitifs, souvent véhiculés par les économistes hommes, qui perdurent depuis les débuts de cette science. Cette vision essentialiste, enferme les femmes (et les hommes) dans des rôles au sein de la société. Cela nous mène à penser qu'il existe un caractère féminin (attention de l'autre, émotif) et un caractère masculin (abstraction, prise de risques, logique) résultant de la biologie, alors qu'ils ne sont peut-être que la résultante des rôles sociaux qu'on attribue à chaque sexe, en ce sens qu'en réduisant les femmes au foyer et à l'éducation des enfants, alors les femmes apparaîtront avoir un caractère féminin.
La troisième partie elle la plus intéressante, elle présente comment le féminisme pourrait être un vecteur d'efficacité pour l'économie, en ce sens que privilégier des politiques anti-discriminatoires favoriserait le développement économique du pays. En effet, il faut pousser les femmes à sortir de cet image de la femme au foyer en favorisant leur entrée sur le marché du travail. Il faut aussi favoriser leur évolution dans leur carrière en aménageant des congés parentaux égaux, rémunérés pour les hommes, repousser les naissance, pour que les femmes interrompent moins longtemps leur carrière et brise ce fameux plafond de verre. L'auteure pense tout de même qu'au delà d'un moyen d'améliorer la situation économique d'un pays, il faut penser les questions d'égalité pour ce qu'elles sont, et ainsi favoriser l'égalité pour l'égalité et la justice sociale, non pas seulement pour que l'économie "tourne" mieux.

Très bonne lecture, l'auteure bien que se disant féministe (idéologie politique) tente de rester très rationnelle dans la présentation de ses raisonnements et nous permet de repenser les rôles de chacun dans la société et nous ouvre l'esprit sur la place du féminisme dans l'économie.
Commenter  J’apprécie          00
L'économie féministe peut apparaître comme un oxymore. Hélène Périvier nous montre dans cet ouvrage que ce n'est pas le cas.
Ses propos sont développés progressivement en 3 parties
- L'économiste, la féministe, la cité : L'auteur commence par poser les bases de sa réflexion en revenant sur les présupposés normatifs du modèle théorique fondé sur l'homo oeconimicus et le contenu scientifique du féminisme.
- Au-delà de l'homme économique : La sur représentation des hommes en économie, très influencés par le patriarcat qui domine la société, conduit à des biais essentialistes et genrés dans la construction des concepts, les thématiques abordées er les réponses apportées. L'économie prend ainsi peu en compte l'économie non marchande, tandis que le féminisme apporte une vision différente de la division sexuée du travail.
- L'économie au défi de l'égalité : La mesure des inégalités et des discriminations dans les sphères familiale et professionnelles apportent des connaissances utiles au féminisme pour en comprendre les enjeux. La réduction des inégalités et des discriminations est un facteur de performance et d'efficacité des marchés concurrentiels à tous les niveaux de la société.
En se reposant sur des théories économiques, le plus souvent développées par des économistes hommes, l'auteur démontre ainsi qu'il n'y a pas opposition mais une complémentarité des approches.
Très documenté, cet ouvrage, "à lire absolument" pour reprendre les termes de la préface de Thomas Piketty, réussit à mettre habilement en parallèle l'économie et le féminisme, tout en intégrant son analyse dans le contexte actuel. Il nous éclaire sur l'apport de l'économie féministe dans l'objectivité et la rigueur de la science économique en réduisant l'emprise des biais sociaux, culturels et politiques.
L'économie peut ainsi apporter un socle théorique et empirique permettant d'appréhender le caractère genré de la dynamique des parcours de vie et d'évaluer l'ampleur du chemin qu'il reste à parcourir. Elle constitue ainsi un moyen de construire une économie politique féministe et d'apporter des réponses pour tendre vers une société plus égalitaire.


Lien : https://www.carnetsdeweekend..
Commenter  J’apprécie          20

Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
7. Excipit : « La métamorphose de l'État social engagée au cours des années 1970 pour accompagner l'entrée des femmes dans le salariat reste inachevée car l'égalité des sexes n'a jamais été au cœur d'une refonte de l'articulation entre la famille, le marché et l'État social. La transition vers un autre modèle est plus complexe qu'il n'y paraît. La suppression de certaines protections associées au modèle de Monsieur Gagnepain peut conduire à dégrader la situation économique des femmes si elle n'est pas associée à des politiques volontaristes s'agissant du temps consacré aux personnes dépendantes. Le défi consiste donc à combiner un système de protections sociales et des politiques qui encouragent le partage des tâches dans les couples et qui socialisent le care (via un service public d'accueil de la petite enfance et de prise en charge des personnes âgées dépendantes). Une économie politique féministe est possible à condition de repenser l'ensemble du système fiscal et social pour construire un modèle cohérent, porteur d'émancipation et d'égalité. »
Commenter  J’apprécie          40
4. « Dans cette perspective [celle de l'État social keynésien de l'après-guerre], le modèle français organise la division sexuée du travail entre la sphère de la famille et celle du marché : les femmes sont assignées à la première et les hommes à la seconde. Le modèle de Monsieur Gagnepain est perçu comme étant le moteur d'une natalité dynamique indispensable au développement économique mais aussi comme un gage de stabilité de la société car il s'inscrit dans la continuité des valeurs patriarcales conservatrices. L'État social redistribue les richesses et socialise les coûts de cette spécialisation des rôles afin de la rendre accessible à l'ensemble des couples, y compris à ceux des classes populaires, et de limiter la perte de revenu due à la naissance des enfants. Cette redistribution opérée dans le cadre du mariage passe par plusieurs canaux. [1. extension des droits dérivés des cotisations sociales obligatoires à l'épouse et aux enfants ; 2. système des pensions de réversion ; 3. « Allocation de salaire unique » (ASU) versé dès lors que l'épouse ne travaille pas ; 3. allocations familiales – perçues par les familles et ne procurant aucun droit propre à la femme ; 4. système d'impôt sur le revenu des couples par déclaration conjointe (le salaire le plus faible, le plus souvent celui de la femme, est imposé plus lourdement qu'il ne le serait dans un système d'impôt individuel, par contre le quotient conjugal dissuade de l'union libre) ;] » (p. 156 et ss.)
Commenter  J’apprécie          00
2. « La propriété privée n'est pas à l'origine du patriarcat : des sociétés sans classes sociales et sans propriété privée, fondées uniquement sur la domination masculine, ont existé. Le patriarcat se déploie selon plusieurs dimensions : les violences (violences conjugales, féminicides, viols, harcèlement...) dont le mouvement #MeToo a révélé l'ampleur seulement récemment ; la sexualité (est-elle le fondement du contrôle des hommes sur le corps des femmes?) ; les institutions culturelles (comment se construisent les identités genrées au travers de la socialisation par exemple?) ; le mode de production (le travail domestique étant pour la plus grande part réalisé par les femmes) ; le travail rémunéré (relations salariales, discriminations et inégalités sur le marché du travail) ; et enfin le rôle de l'État (les politiques publiques qui organisent l'ordre sexué ou restent insuffisantes pour lutter contre les inégalités entre les sexes). » (p. 74)
Commenter  J’apprécie          00
5. « Au fur et à mesure, les comportements d'activité des femmes se rapprochent de ceux des hommes : elles ajustent moins leurs décisions professionnelles en fonction du salaire qu'elles peuvent espérer et encore moins en fonction de celui de leur conjoint, mais cette convergence des comportements n'a pas été synonyme d'égalité. Si davantage de femmes travaillent, elles le font plus souvent à temps partiel que leurs aînées : en France, comme dans d'autres pays, les taux d'emploi en équivalent temps plein des femmes nées à la fin des années 1970 sont comparables à ceux des femmes nées à la fin des années 1950. Les écarts de salaire ne se réduisent plus depuis les années 1990. Le modèle de Monsieur Gagnepain a cédé la place à celui de Madame Gagnemiettes. Il ne s'agit pas d'affirmer que toutes les femmes sont des travailleuses pauvres ou précaires, mais de pointer la persistance de ces inégalités socioéconomiques. » (pp. 161-162)
Commenter  J’apprécie          00
6. « En mobilisant l'argument de la performance économique pour défendre des politiques d'égalité, on fait la promesse qu'elles seront porteuses d'enrichissement. Le problème est double : les discriminations ne sont pas toujours inefficaces et, lorsqu'elles le sont, la concurrence ne peut pas toujours les éliminer. La lutte contre les discriminations n'est donc pas une question relative à l'allocation optimale des ressources mais relève de leur juste redistribution. Pour mettre en lumière le danger qu'il y a à justifier l'égalité par l'efficacité, il faut prendre au sérieux l'évaluation de la performance que l'on pourrait en tirer. S'il s'avérait que, dans certains cas, les discriminations ne sont pas coûteuses, voire qu'elles produisent un gain, il serait difficile d'écarter d'un revers de la main l'argument de la performance au titre de ce qu'il ne coïncide pas avec nos principes de la justice. » (pp. 196-197)
Commenter  J’apprécie          00

Videos de Hélène Périvier (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Hélène Périvier
Les Rencontres de la Fiscalité | 1e édition le mardi 11 avril 2023
Le Monde et le Cercle des Fiscalistes lancent un nouveau rendez-vous, « Les Rencontres de la Fiscalité », le 11 avril 2023 à partir de 18 h 30 à l'auditorium du Monde, Paris 13e, également diffusé en live sur le monde.fr. Un événement en partenariat avec Lefebvre Dalloz.
Au moment du lancement de la campagne de déclaration des revenus, l'objectif de cette nouvelle rencontre est de dresser un bilan, quatre ans après la mise en place du prélèvement à la source.
Plusieurs experts interviendront, dans le cadre de tables rondes, autour de différents thèmes parmi lesquels :
Le prélèvement à la source : quel bilan quatre ans après sa mise en place ? Les impôts sont-ils devenus indolores ? Qu'est-ce que cela change dans les négociations salariales ? Que reste-t-il à faire?
Intermède : Les nouveautés de la déclaration des revenus 2022 présentées par Nathalie Cheyssan Kaplan, journaliste au Monde Argent
Quel avenir pour l'impôt sur le revenu ? Vers une fusion CSG/IR ? Généralisation de la flat tax ?
Avec Marie André, inspectrice des finances publiques à la Direction générale des Finances publiques ; Béatrice Hingand, directrice de la Rédaction Fiscale de Lefevbre Dalloz ; Jean-Yves Mercier, avocat honoraire et vice-président du Cercle des fiscalistes, Hélène Périvier, économiste à l'OFCE (Centre de recherche en économie de Science-Po), et coordinatrice du pôle « Évaluation des politiques sociales et familiales » ; Christian Saint-Etienne, économiste et professeur au CNAM et Alexis Spire, sociologue, directeur de recherche CNRS, enseigne à l'EHESS en étant associé au laboratoire Iris.
Les débats seront animés par Joël Morio, Responsable du Monde Argent
+ Lire la suite
autres livres classés : théories économiquesVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus

Autres livres de Hélène Périvier (1) Voir plus

Lecteurs (36) Voir plus



Quiz Voir plus

Histoire et généralités sur la Normandie

TOUS CONNAISSENT LA TAPISSERIE DE BAYEUX, QUI EN EST LE HÉROS ?

RICHARD COEUR DE LION
ROLLON
MATHILDE
GUILLAUME LE CONQUERANT
GUILLAUME LE ROUX

20 questions
70 lecteurs ont répondu
Thèmes : histoire , célébrité , économieCréer un quiz sur ce livre

{* *}