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EAN : 9782707192103
160 pages
La Découverte (03/05/2018)
4.5/5   3 notes
Résumé :
Boko Haram au Nigeria, les chebab en Somalie, AQMI au Mali… Plus de vingt ans après les attentats organisés en 1998 par Al-Qaïda contre les ambassades des États-Unis au Kenya et en Tanzanie, la progression des mouvements islamistes radicaux en Afrique subsaharienne, notamment au Sahel, inquiète les populations locales et les observateurs internationaux.
Ce livre solidement argumenté dresse un panorama éclairant des mouvements dits « djihadistes » en rappelant... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Voici un excellent ouvrage qui, malgré l'opinion parfois affichée de son auteur, décrit précisément les ressorts du djihadisme en Afrique et les différences monumentales qui le séparent du djihadisme du Moyen-Orient.
En reprenant le contexte historique et géopolitique du continent africain, l'auteur énumère les différentes situations et expose clairement l'enchevêtrement entre situation politique et abus des militaires africains et l'essor de groupes proclamés djihadistes qui ont souvent des revendications bien plus précises et complexes que l'instauration d'un califat global.
Commentant les différentes interventions occidentales en Afrique, Marc-Antoine de Montclos dresse un bilan de ces dernières et nous rappelle que le terrorisme n'est pas apparu il y a seulement une vingtaine d'années, et qu'il faut parfois relativiser son importance actuelle au risque de la surestimer et de tenter d'y apporter une réponse disproportionnée qui ne peut qu'échouer.
J'ai été ravie d'en découvrir plus sur le Soudan et sur des pays francophones tels que le Sénégal, le Burkina Faso, le Tchad ou encore le Niger quand les discours actuels ont tendance à se focaliser sur le Mali et le Nigéria, oubliant les mouvements de guérilla qui se replient d'un pays vers un autre et qui sont en général bien plus "transfrontaliers" que dans d'autres régions du monde.
Un ouvrage clef à s'empresser de lire!
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Pour les dirigeants africains, il [le grand récit de la menace terroriste] permet de justifier la répression de leurs opposants, de réclamer une aide militaire, de s'avancer sur la scène diplomatique et de se défausser de leurs responsabilités face à des problèmes prétendument "importés" de l'étranger. Pour les djihadistes, il permet d'affirmer leur omniprésence, de surestimer leur capacité de nuisance et de valoriser leur pouvoir médiatique. Pour les gouvernements occidentaux, enfin, il permet de légitimer et légaliser la militarisation de leur réponse au terrorisme et de leurs interventions à l'étranger en se référant au chapitre VII de la Charte des Nations unies à propos d'une menace contre la "paix mondiale". Pour les services de sécurité publics et privés, le mythe d'un djihad planétaire constitue même une véritable aubaine car il leur permet de marquer leur pouvoir et de demander des budgets plus conséquents.
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En général, les défaillances des États africains, leur mode de gouvernement autoritaire et la corruption de leur classe dirigeante constituent des explications peu prisées pour comprendre le terrorisme de type djihadiste. En effet, les analyses politiques qui insistent sur la responsabilité des gouvernements locaux dérangent beaucoup de monde car elles mettent en évidence la complicité des pays occidentaux avec des régimes kleptocrates et soulignent les limites de leur coopération militaire avec des armées qui sont souvent responsables d'atrocités. De plus, les racines africaines des conflits sahéliens et djihadistes d'aujourd'hui démontrent à leur manière les ratés de modèles coloniaux dont les projets étatiques n'ont pas satisfait les demandes de justice sociale, laissant un vide que les promoteurs d'une application stricte de la charia se sont empressés de combler.
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Les dissensions au sein de la « galaxie djihadiste » portent également sur le traitement des « mauvais croyants ». De pair avec le sectarisme et l’intransigeance des combattants les plus extrémistes, la tendance dite du « takfirisme », qui consiste à excommunier de simples pécheurs, ne fait pas l’unanimité et elle est condamnée par des idéologues al-qaïdistes comme Abou Moussab al-Souri car elle divise la communauté des musulmans et sert les intérêts des « infidèles ».

La question n’est pas nouvelle. Au XIXe siècle déjà, les théologiens du djihad de Sokoto, dans le nord-ouest de l’actuel Nigeria, avaient longuement débattu de la possibilité d’excommunier et réduire à l’état de serfs les musulmans dont les pratiques religieuses étaient jugées impures, syncrétiques et déviantes. Ils avaient finalement justifié le pillage et l’asservissement de leurs coreligionnaires en prétextant qu’il s’agissait d’hérétiques ou de renégats. Une telle posture avait aussi des soubassements très pragmatiques pour affirmer leur domination et financer une armée permanente à partir des revenus tirés d’une économie de plantation fondée sur l’esclavage. Dans le nord-est du Nigeria, près du lac Tchad, elle leur a par exemple permis de récuser les sultans du Borno qui, islamisés bien avant eux, avaient refusé de se soumettre en préférant s’allier à des infidèles. Le débat opposa notamment les djihadistes du califat de Sokoto à un théologien, Muhammad al-Kanemi, qui défendait l’ordre établi mais qui profita des troubles pour s’emparer du pouvoir et renverser la dynastie finissante des rois du Borno. « Chaque pays, écrivait Muhammad al-Kanemi, a ses mécréants, ses apostats et ses pécheurs. Tenter de les exterminer de façon indiscriminée est dangereux car il vaut mieux laisser de côté l’infidèle que de prendre le risque de tuer un musulman. »

Aujourd’hui encore, le sort des apostats joue un rôle essentiel dans le cadre de djihads qui visent d’abord à reconvertir les « mauvais croyants ». L’intransigeance des groupes les plus sectaires est source de divisons au sein même des partisans de la lutte armée. Pendant la guerre civile qui a ensanglanté l’Algérie après l’annulation de la victoire électorale du Front islamique du salut en décembre 1991, des combattants se sont ainsi séparés du Groupe islamique armé (GIA) en septembre 1998 parce que celui-ci tuait surtout des musulmans qu’il excommuniait à tour de bas. Les manœuvres de division des services de sécurité algériens n’y ont sans doute pas été pour rien non plus. (pp. 49-50)
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Ces violences avaient cependant un "mérite" : elle ne semblaient pas se développer au nom de l'islam. Leur inscription dans les paradigmes d'analyse de la guerre froide et des oppositions Est-Ouest les rendait visiblement plus acceptables ou, du moins, "compréhensibles" aux yeux des Occidentaux. La peur que suscitent à présent les djihadistes se nourrit certainement de l'incompréhension que l'on a de leurs motivations.
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La menace est bien réelle. Mais sa puissance dévastatrice est grossie par les effets de loupe médiatiques. Il importe à cet égard de souligner que le nombre de conflits létaux recensés en Afrique a diminué depuis la fin de la guerre froide en 1991 et le génocide des Tutsi du Rwanda en 1994.
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Videos de Marc-Antoine Pérouse de Montclos (5) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Marc-Antoine Pérouse de Montclos
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Entre désinformation russe et volonté d'indépendance, comment comprendre les crises politiques qui secouent ces pays par le prisme de l'histoire ?
Pour comprendre la situtation tendue au Sahel, Guillame Erner reçoit : Pierre Singaravélou, historien spécialiste des empires coloniaux et de la mondialisation. Marc-Antoine Pérouse de Montclos, politologue et directeur de recherche de l'IRD.
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