Geisha ou Le jeu du shamisen, tome 2

Kitsune a grandit, elle est désormais une geisha et son talent pour le shamisen 'est développé avec elle. Mais elle peine à trouver son bonheur dans ce monde en plein changement, seule la musique semble la combler.

Un deuxième tome réussi qui nous montre un Japon oscillant entre modernité et tradition. C'est très intéressant surtout dans le monde des geishas, rescapées des anciennes traditions japonaises mais qui elles aussi subissent le changement. la limite entre prostituées et geisha deviennent plus floues en ces temps ou les plaisirs changent.
Kitsune prend le tout avec philosophie : sa prostitution, sa déception amoureuse, ses efforts pour survivre dans ce monde. elle ne vit que pour la musique, pour son shamisen, alors que sa vie prend une courbe plus dramatique.
C'est raconté avec une certaine douceur et toujours avec pudeur. On a presque l'impression que le personnage est vraie, tout s'ancre tellement bien dans la réalité que cela ouvre une très belle fresque sur le japon au début du 20ème siècle.

les dessins en camaïeu de gris sont doux et sensibles, même si comme dans le tome 1 j'aurai trouvé un bénéfice à de jolies couleurs.

On retrouve Kitsune trois ans plus tard, son éducation faite, geisha accomplie. Elle a grandi, ses ambitions aussi.
La vie est loin d'être facile. le quotidien des geishas, leurs obligations, leurs espoirs et leurs rivalités. Un voyage dans le Japon du début du XXème siècle. La narration est douce malgré la dureté du récit. C'est assez poétique. Pas très joyeux.
Kitsune est très attachante, on l'a suivi et elle a évolué. Avec la narration à la première personne permet de créer une intimité, de la connaitre en profondeur.
Les dessins sont très beaux, assez simples mais diablement efficaces. Avec des décors très détaillés notamment les kimonos et les paysages. La colorisation en noir et blanc est magnifique et douce.

Nous retrouvons Setsuko quelques années après la fin du 1er tome. Elle est maintenant devenue une geisha et une très bonne joueuse de shamizen. Mais, depuis son entrée dans l'okiya, le monde a beaucoup changé et les frontières auparavant bien claires entre les geishas et les prostituées sont plus perméables et les geishas doivent se soumettre aux exigences du marché des quartiers des plaisirs.
J'ai retrouvé les personnages de cette série avec énormément de plaisir. L'histoire est intéressante et très riche, c'est d'ailleurs si riche en détails et en anecdotes qu'on en est presque à se demander si il y a une part de biographie dans ce récit. Les personnages sont entiers et bien rendus, très humains et plutôt attachants.
Côté dessin, c'est vraiment du très très bon travail même si, comme pour le tome 1, je regrette sincèrement l'absence totale de couleurs.
Une très belle histoire à découvrir.

Deuxième partie de la vie de Tsuda Setsuko, geisha reconnue pour ses talents musicaux dans l'art du shamisen. Partie à la montagne au chevet de celle qui l'a formée, loin du cocon protecteur de l'okiya, la jeune femme est en proie au doute et doit faire face au monde, seule pour assurer sa survie.
Autant le 1er tome illustrait l'ascension de la geisha, autant cette partie se recentre sur la face sombre d'une vie soumise au pouvoir économique et aux désirs sexuels des hommes. La finesse du dessin, la douceur du noir et gris ne font que renforcer les violences subies par la jeune femme. Avec une économie de mots et de moyens, les auteurs arrivent à exprimer le drame qu'était l'existence de ces femmes. Un beau tour de force.

La vie de Satsuke continue dans ce Japon traditionaliste. Les années ont passé et la jeune fille a pris du grade au sein de l'Okiya. Les circonstances de la vie la font tomber amoureuse d'un jeune homme avec qui elle ne pourra jamais vivre. Suite au terrible tremblement de terre de 1923 dans le quel elle a perdu toutes ses économies, elle épouse un homme pour être sous sa protection, mais le mariage tourne mal. Heureusement, elle trouve un épanouissement en jouant de son shamisen.
Plus encore que dans le premier tome, on voit à quel point la vie de ces femmes était suspendu au bon vouloir d'un homme, qui les prenait en protection ou pas. Les geishas n'étaient pas des prostituées, mais n'empêche qu'elles devaient accepter tout de leur protecteur... Si pour une raison ou une autre, ils leur retirer leur protection, elles se retrouver sans rien, démunie. C'est une existence bien précaire qu'elles menaient en dépit des apparences. L'histoire de Satsuke est l'histoire d'une jeune fille et d'une femme, malmenée par la vie, qui a essayé d'être aussi libre que possible et de s'approcher du bonheur.