Xavier-Laurent Petit écrit bien. Il écrit toujours très bien. Son personnage principal, Ciprian, gringalet immigré surdoué, est attachant. le père aussi, ce grand costaud, bourru mais avec un grand coeur finalement. La soeur aussi, avec sa morgue et ses faiblesses. J'ai eu plus de mal avec la mère et le frère aîné, plus transparents. La voix de Ciprian apporte un peu de candeur à cet univers triste, glauque et violent.
Mais là où j'ai eu plus de difficultés, c'est avec madame Baleine, monsieur Enorme et compagnie. Ils sont adorables, pleins de bonne volonté. Trop en fait. Ils manquent de crédibilité. Pour être honnête, les personnages manquent tous de crédibilité. Mais Ciprian et sa famille relèvent bien plus de la fable, créant ainsi une distance qui permet cette liberté avec le réel : une famille de montreurs d'ours peut se permettre toutes les fantaisies ! Mais les autres, les Français du "Lusquenbour", sont trop proches de la réalité pour intégrer, à mes yeux, cet univers de fable.
Je dois avouer toutefois que cette lecture est finalement une bonne surprise. Quand je l'ai commencé, je me suis dit "oh non, je n'ai pas envie de pleurer, pas envie de lire sur la misère humaine en ce moment, pas la force". Je craignais d'abandonner le livre en route. Et finalement non, je me suis laissée entraîner par l'écriture.
Une fable douce amère, je dirai.