Une enquête et des interviews avec des figures importantes du secteur de la musique. du vinyle jusqu'au streaming en passant par le CD et le mp3, l'histoire de la musique qui nous est proposé ici simplet agréable à lire. On apprendra que la musique n'en est pas à sa première « crise », qu'il n'est pas le seul secteur à être touché par cette révolution (cinéma, le livre bientôt...) et que l'industrie musicale à – qu'elle le veuille ou non - une part de responsabilité dans cette crise.
Si les mots ont un sens, dorénavant, on « consomme » des « produits culturels » là ou par le passé, nous écoutions de la musique. Le vinyle et la musique en général possédaient alors une forte valeur sentimentale. Le changement de dirigeants dans l'industrie musicale n'y est pas pour rien : nous sommes passé de patrons véritables mélomanes avec une culture musicale importante voire des musiciens eux-mêmes, à des « chargés de produits » et des « chefs marketing » qui ont modifié notre rapport à la musique.
La musique a perdu son caractère sacré et ils en sont pour une bonne partie responsable, mais pas que. L'auteur ne tombe pas dans l'écueil facile qui serait de condamner le grand méchant loup représenté par les majors, mais intègre également les évolutions technologiques comme porteur d'effets sur notre façon d'écouter de la musique.
Nous n'écoutons plus un album en entier comme une oeuvre à part entière. Nous sommes passé à l'ère du « shuffle ». Nous écoutons en boucle une ritournelle attrayante jusqu'à plus soif, puis nous passons à autre chose. Nous zappons rapidement dans cet immense océan de musique qui nous est désormais proposé gratuitement sur internet.
Mais là où ce livre est intéressant, c'est qu'il prend du recul par rapport à cette dernière révolution qu'est internet dans le monde de la musique. Benjamin Petrover est réaliste et préfère accepter ce changement pour trouver des solutions, plutôt que de pleurer sur le passé révolu. Alors prenons du plaisir à écouter notre musique favorite et trouvons ensemble un moyen de continuer à soutenir les artistes qui embellisse notre quotidien. le streaming, les concerts, la relation de l'artiste avec son public sont autant de points de contacts qu'il faut valoriser et apprécier pour redonner de la valeur à la musique.
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Enfin notons l’essor de la grande distribution qui consacre un large espace à la musique dans chacun de ses supermarchés. Le CD n’est plus un objet noble. Il prend sa place dans le caddie de la ménagère entre les packs d’eau minérale et les yaourts. C’est devenu un produit de consommation courante. Si les vendeurs indépendants peinent à survivre et que la grande distribution prend une place de choix, c’est aussi à la demande des majors. Un favoritisme justifié par des raisons purement mercantiles. C’est un guichet unique qui achète de grandes quantités de disques, contrairement au détaillant. Cette galette que l’on manipulait avec tant d’amour et de précaution est désacralisée, dévalorisée. Exactement ce que les princes du marketing avaient souhaité. Ils portent aussi une responsabilité lourde dans la détérioration de notre rapport avec le disque.
Lorsqu’on regarde la genèse de cette industrie, on constate qu’avant d’être des financiers, la premiers dirigeants étaient des passionnées de musique et parfois des musiciens eux-mêmes. Ils avaient une vraie culture musicale, savaient être sensibles à ce que les artistes leur disaient. Eddie Barclay ou Jacques Canetti sont les noms qui reviennent à la bouche des nostalgiques. Mais peu à peu, les profils ont changé, au grand dam des artistes. « Au milieu des années 1980, il y a eu un tournant, m’explique Alain Chamfort. Les gens de marketing ont été de plus en plus approchés par les maisons de disques, au détriment de ceux qui avaient une culture musicale et qui avaient une sensibilité proche des artistes. Les nouveaux responsables étaient des gens qui avaient des notions principalement de commerce. Ils menaient des études de marchés sur le profil de notre public. Les résultats étaient pitoyables, c’était même un peu grotesque. On commençait à sentir qu’on était un peu traité comme des produits. » Et de fait, le directeur artistique est peu à peu remplacé par celui du marketing, voire par un « chef de produit », dénomination on ne peut plus explicite.