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Citations sur Pas facile de voler des chevaux (32)

Je me suis retourné et j’ai regardé Franz :
- Quoi ? Qu’est-ce qu’il a dit ?
- Il a dit « on va voler des chevaux ». Je ne sais pas qui a eu l’idée de cette phrase. Ton père, peut-être. En tout cas, ce n’était pas moi. Mais je savais qu’il allait dire ça. Quelqu’un était venu du bourg par le car pour me prévenir.
- Ah.
- Je l’ai tout de suite trouvé sympathique, ça c’est sûr.
Qui ne le trouvait pas sympathique ? Les hommes le trouvaient sympathique, les femmes le trouvaient sympathique, tout le monde le trouvait sympathique. Sauf le père de Jon peut-être, mais ça, c’était pour des raisons bien particulières. Et j’imaginais qu’au fond ils n’avaient rien l’un contre l’autre ; dans d’autres circonstances ils auraient sans doute pu être amis. Un homme qui plaît à tout le monde, c’est souvent quelqu’un de mou et d’inconstant, quelqu’un qui cherche à tout pris à éviter les conflits ; c’est ce que j’ai remarqué. Or ce n’était pas le cas de mon père. Certes, il aimait rire et il était toujours souriant, mais c’était dans sa nature ; ça n’avait rien à voir avec un désir de séduire. Avec moi, en tout cas, il ne cherchait pas particulièrement à le faire, et pourtant il me plaisait beaucoup, même si je me sentais parfois un peu embarrassé en face de lui.
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Je me demandais comment elle y arrivait, car elle travaillait aussi dur qu'un homme. Et à chaque fois, je voyais mon père qui la regardait, les yeux mi-clos. Et je faisais pareil, je n'arrivais pas à m'en empêcher. Et comme on la regardait, le père de Jon la regardait aussi, mais pas comme il le faisait d'habitude. Ce qui me paraissait normal. Mais j'ai l'impression qu'on ne regardait pas la même chose, car ce qu'il voyait semblait le surprendre et le mettre mal à l'aise. Moi, ce que je voyais me donnait envie d'abattre le plus grand des sapins et de le faire tomber avec un fracas qui retentirait partout dans la vallée.
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- Tu lisais toujours Dickens quand tu étais à la maison ; je m’en souviens très bien. Tu étais assis dans ton fauteuil, complètement absorbé dans ton livre, et quand je m’approchais pour te tirer la manche et te demander ce que tu lisais, j’avais toujours l’impression que tu ne me reconnaissais pas. Puis tu répondais « Dickens » en me regardant d’un air grave. Et je me suis dit que lire Dickens, ça devait être quelque chose de spécial qui n’était pas à la portée de tout le monde ; c’est le sentiment que j’ai eu. Je n’avais même pas compris que Dickens, c’était le nom de l’auteur. J’ai cru que c’était le nom d’un certain type de livres que nous étions les seuls à posséder. Et je me rappelle que parfois tu me faisais la lecture.
- Je faisais ça ?
- Oui, tu me faisais la lecture. De David Copperfield ; ça, je l’ai découvert plus tard, à l’âge adulte, quand j’ai décidé de le lire moi-même. A l’époque, tu n’avais jamais l’air de te lasser de David Copperfield.
- Il y a longtemps que je ne l’ai pas lu
- Mais tu l’as, je suppose ?
- Bien sûr.
- Alors du devrais le relire.


Et elle appuie ses coudes sur la table et y pose son menton avant de réciter :
- « Deviendrai-je le héros de ma propre vie, ou bien cette place sera-t-elle occupée par quelque autre ? A ces pages de le montrer. »
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Dans deux mois à peine ce sera la fin du millénaire. Il y aura une fête avec feu d’artifice au village. Je n'irai pas. Je resterai à la maison avec Lyra, je descendrai peut-être jusqu'au lac pour voir si la glace tient, j'imagine une nuit avec -10 et clair de lune, je ferai du feu dans le poêle et je me saoulerai raisonnablement avec la bouteille que j'ai mise de côté dans le placard, je poserai sur le vieil électrophone un disque de Billie Holiday, avec sa voix au bord du chuchotement comme lorsque je l'ai entendue à Oslo dans les années cinquante, presque éteinte mais encore pleine de magie. A la fin du disque j'irai me coucher, je dormirai aussi profondément qu'il est possible de le faire sans être mort, et je me réveillerai dans un nouveau millénaire sans y accorder la moindre importance. Je m'en réjouis à l'avance.
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« Pour ne pas mourir moi aussi, il me fallait retrouver la forêt. »
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J'ai envie de prendre le temps qu'il faut. Le temps, maintenant, je me dis que c'est important pour moi. Qu'il passe vite ou lentement n'est pas le problème; l'essentiel, c'est le temps lui-même, cet élément dans lequel je vis et que je remplis d'activités physiques qui le rythment, le rendent visible et l'empêchent de s'écouler sans que je m'en aperçoive.
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Je me demande si ce n'est pas là un des effets de la solitude prolongée : on laisse ses pensées suivre leur cours à voix haute et tout d'un coup on se met à parler à voix haute; on ne fait plus la différence entre parler et se taire, et le dialogue que nous ne cessons d'entretenir avec nous-mêmes se mêle à celui qu'il nous arrive d'établir avec les rares personnes que nous fréquentons. Quand on vit seul trop longtemps, la frontière entre les mondes intérieur et extérieur devient floue, et on finit par la franchir sans même s'en apercevoir. C'est ça qui m'attend ?
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Par-delà la colline, le soleil déployait maintenant son éventail de lumière. Autour de nous la nature se parait de couleurs nouvelles, et les restes de brouillard semblaient fondre et s'évaporer au-dessus de l'eau.
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Il régnait une odeur de bois fraîchement coupé. Elle se répandait de la route jusqu'à la rivière, elle remplissait l'air et flottait au-dessus de l'eau, elle pénétrait partout, elle m'engourdissait et me faisait perdre la tête. J'étais au centre de tout. Je sentais la résine; mes vêtements et mes cheveux sentaient la résine; la nuit, dans ma couchette, ma peau sentait la résine. Je m'endormais avec l'odeur de résine, je me réveillais avec l'odeur de résine, l'odeur de résine m'accompagnait du matin au soir. Je faisais un avec la forêt. Pataugeant dans des brindilles de sapin, je courais partout en coupant des branches comme mon père m'avait appris à le faire: aussi près du fût que possible, pour ne laisser dépasser qui puisse gêner le passage du couteau à écorcer ou blesser les pieds des hommes qui auraient à marcher sur les grumes et les séparer quand elles s'agglutineraient sur la rivière. Je maniais la serpe en cadence; un coup à droite, un coup à gauche. Le travail était pénible, tout me résistait, tout était dur, mais ça m'était égal; je ne sentais pas ma fatigue et je continuais à travailler sans y prêter attention. Les autres devaient me retenir, ils me prenaient par l'épaule et m'asseyaient de force sur une souche d'arbre en m'enjoignant de rester assis et de me reposer un peu, mais ma résine me collait aux fesses, mes pieds me démangeaient et je finissais par m'arracher de la souche et m'emparer de la serpe. Le soleil me cuisait et mon père rigolait. J'avais un sentiment d'ivresse."p.102-103
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J'ai entendu la rivière avant de l'apercevoir.
Puis, au détour d'une butte, elle m'est apparue, presque blanche parmi les arbres, et l'air est devenu différent tout à coup et plus facile à respirer.
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