Le Paris des Merveilles représente ma première incursion dans l'univers littéraire du Nancéien
Pierre Pevel. Et quelle incursion!
A noter la qualité de cette édition spéciale, d'un bleu profond et ornée de magnifiques illustrations des divers personnages. Un régal à regarder.
Ça, c'était pour la forme. J'en viens maintenant au fond. Et là aussi, quel régal! La trilogie se déroule dans un Paris de la Belle Époque (sur 1909 et 1910 plus précisément). Mais un Paris où les nouveautés technologiques, telles que les automobiles, côtoient un univers issu du merveilleux. Normal puisque la frontière entre l'Outre-Monde et notre monde s'est ouverte depuis déjà quelque temps. Fées altières et gnomes bricoleurs prennent le métro entre les deux capitales Paris et Ambremer.Imaginez les allées d'arbres féeriques dont le feuillage restitue la nuit la lumière emmagasinée le jour, le vol des dragonnets qui viennent quémander pépites de souffre... ou morceaux de gaufre tout aussi bien. Un rêve!
Outre la découverte des enchantements, cette convergence des mondes permet aux mages et sorciers qui ont de tout existé - mais cachés pour échapper aux persécutions - de vivre désormais au grand jour et d'avoir même pignon sur rue.
Ainsi en va-t-il de Griffont, mage reconnu du cercle Cyan, amateur de littérature, de mets délicats et de thé Kenilworth, qui partagent sa vie entre son inégalable majordome et le nom moins extraordinaire Azincourt, chat ailé et parlant qui affecte un accent digne d'Oxford... quand la surprise ne le fait pas revenir à des propos plus parigots.
Autre personnage haut en couleur - et pas seulement du fait de sa magnifique chevelure rousse et de ses seyantes robes émeraude -: Isabel de St Agil, esprit épris d'indépendance, d'aventures, et de thé Kenilworth. Accompagnée de ses fidèles Lucien, gnome de son état, et Auguste, véritable Hercule sur la place, elle parcourt le monde au gré de diverses opérations dont la frontière entre légalité et délit ressemble à celle entre Ambremer et Paris.
Je n'entrerai pas dans le détail des trois volumes de la trilogie car il serait fort dommage d'en gâcher la découverte. J'en dirai seulement tout le bien que j'en pense et le bien qu'ils m'ont procuré. Personnages et péripéties sont proprement captivants, les relations et les intrications entre le passé et le présent du roman, entre monde merveilleux et le nôtre sont palpitantes à suivre. S'il est un mot qui ne colle absolument pas à ce récit, c'est "ennui". Pas le temps pour ça!
De plus, la plume de Maître
Pevel se révèle enchanteresse - forcément. Son style coule comme l'eau d'une rivière vive et rieuse. Actions et émotions sont fort bien rendues et l'on ne peut que s'attacher à nombre de ses personnages. Il a su créer avec son Paris des Merveilles un univers cohérent et imaginatif. Si les noms et créatures féeriques rappellent immédiatement moult contes et légendes, l'auteur a su les incarner dans un ensemble plus moderne, renouvelant avec bonheur le genre.
La narration renvoie inévitablement aux grands feuilletons du XIXème et du début du XXème siècle. Chaque chapitre appelle la lecture du suivant et rend le livre très difficile à reposer.
Après tout cela, j'ai juste envie de dire un grand merci à
Pierre Pevel. Merci de m'avoir fait vibrer, rêver, trembler et rire avec sa merveilleuse trilogie. Merci de donner de la lumière et de la magie dans un contexte singulièrement sombre et difficile à vivre entre pandémie, crise économique et sociale, et j'en passe. On en a bien besoin, Monsieur le Magicien!