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Critique de JaneetWallace


Il y a le décor d'abord, celui d'une nature âpre et grandiose, d'un sud qui ressemble furieusement à la Corse. Pas la Corse des bords de mer et des cartes postales, non, celle des montagnes à la beauté farouche, des plateaux d'altitude parcourus par les chevaux sauvages, des grottes sculptées par les féés : ici, « nulle part le bleu de la mer ». Ici, c'est Ogliano, un village niché au creux du massif de l'Argentu. Les mêmes familles s'y côtoient depuis toujours, rejouant génération après génération, l'éternelle histoire de la tragédie humaine.
Tous les personnages portent en eux les racines du drame qui va se nouer au fil des pages :
Le narrateur, Libero, épris de justice et de liberté, « fils d'Argentina Solimane et d'elle seule », à la recherche d'un père qu'il n'a jamais connu. Libero, fils de ces montagnes qu'il a parcourues tant de fois avec son grand-père et qu'il connait comme sa poche.
Raffaele Delezio, mystérieusement fasciné par la lecture d'Antigone, beau et mutique héritier du tout puissant baron dont le palazzo brille de mille feux en été et qui parade parmi la population avec à son bras, la jeune et sublime Tessa.
Dario, chef des Carboni, le clan mafieux du village d'à côté qu'on fait mine d'ignorer, « parce qu'il vaut mieux ignorer ce que l'on ne peut combattre ».
Le jeune Gianni, enfant sacrifié, dressé à la dure par le terrible Lenzani.
Et ces femmes, ces mères, fortes et fières, victimes d'une violence qu'elles ne peuvent empêcher.
En guise de choeur antique, les voix des morts, qui racontent des histoires à jamais vouées au silence.
Ici, les rancoeurs et les querelles se transforment en haines héréditaires, la force fait office de justice, les chagrins tournent à la folie.
Face au poids du passé, les héros de cette tragédie moderne vont être mis à l'épreuve et vont devoir prouver ce qu'ils ont vraiment dans le ventre s'ils veulent se créer un destin et échapper à la fatalité.
Un livre foisonnant, tant en personnages qu'en coups de théâtre et révélations, une très belle écriture, tout particulièrement quand elle dépeint la nature (que de belles pages !), un rythme toujours soutenu, du romanesque… que demander de plus pour bien commencer l'année ?

« Les combines et les passe-droits en haut de l'échelle ont tué l'idée de justice. Ca c'est la première violence et il n'y a que ceux qui la subissent qui la voient. Elle en appelle une autre qui fait des morts. Tu sais pourquoi ? Parce que là où il n'y a plus l'espoir d'une égalité de traitement, il ne reste que la loi du plus fort. »
« J'avais troqué ma peine contre de la haine. Je la couvais. Dans l'Argentu, c'est ainsi que les yeux des hommes restent secs et que les femmes pleurent pour eux. »
« En réalité, beaucoup d'entre eux ne sont pas les monstres que l'on aimerait qu'ils soient. Ou alors, nous le sommes tous. Ce qui nous distingue les uns des autres, c'est ce qu'on fait de sa colère ».
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